18.3.05

états de l'âme

Dans la série le soufisme pour les nuls par un nul, je continue. Il faut savoir qu'il y a plein de façons de "graduer" la progression spirituelle. Hier soir on a parlé des grands états de l'âme, au sens de la nafs. Je rappelle que la nafs c'est l'ego, l'âme liée au monde sensible. Le travail spirituel permet petit à petit de purifier ou d'élever l'âme. Bon je suis pas sûr de pas dire des bêtises mais allons-y quand même. Toutes ces étapes correspondent à des références coraniques.

Schématiquement il y a d'après ce que j'ai compris les grandes étapes suivantes :
- l'âme despotique : on est complètement soumis à ses désirs, à ses passions, à ses peurs. C'est un peu le niveau zéro.
- l'âme admonitrice : l'ego commence à être un peu dompté, mais on a tendance à se juger. Une des propriétés du travail spirituel c'est que ça fait ressortir les défauts. Dans cet étape, on se juge, et se juger c'est encore une façon de se référer à soi, à son ego. C'est un point sur lequel je reviens en fin de note.
- l'âme apaisée : l'ego est dominé, les peurs, les désirs de puissance, de domination sont effacés. Hum que c'est abstrait : ça paraît si loin pour moi. J'en parle parce que pour pas mal de gens c'est un but en soi : on s'arrête là. Alors que le travail spirituel est sans fin, chaque étape n'est qu'un début (enfin d'après ce que j'en comprends).
- l'âme inspirée : là on entre dans la vraie connaissance de Dieu, j'en parlerai pas en détail ici.

Ce qui m'a frappé là dedans, c'est que justement hier j'avais lu une lettre du sheikh Ad Darqawi qui me semble bien s'appliquer à l'étape de l'âme admonitrice. J'en ai parlé au responsable du groupe, en lui disant "décidément tous ces hasards ça commence à faire beaucoup". Il m'a répondu en citant René Guénon : "le hasard n'est que l'explication de ceux qui ignorent les causes".

J'avais pas lu 50 lettres d'Ad Darqawi. Juste 2 ou 3. Dont celle qui parle de ce sujet. Je la cite ici, même si elle est un peu longue. Bon je rappelle que c'est vieux de près de deux siècles, et que tout n'est pas à prendre au pied de la lettre ; autre contexte, autre époque.

"La maladie qui afflige ton coeur, ô faqîr, vient des passions qui le traversent ; si tu les quittais et t'occupais de ce que Dieu t'ordonne, ton coeur ne souffrirait pas de ce dont il souffre. Entends donc ce que je te dis, et que Dieu te prenne par la main : si chaque fois que ton âme (nafs) t'attaque, tu te dépêchais à faire ce que Dieu t'ordonne et que tu lui remettais entièrement ta volonté, les suggestions psychiques et sataniques et toutes épreuves t'épargneraient sans aucun doute. Par contre, si dans les moments ou ton âme t'attaque, tu te mets à réfléchir là-dessus, à peser le pour et le contre et à te noyer dans le bavardage (intérieur), les suggestions psychiques et sataniques reflueront vers toi en légions jusqu'à te subjuguer et te submerger, et il ne te restera plus aucun bien mais rien que du mal ; que Dieu nous guide, nous et toi, sur le sentier de Ses saints, Amen.
Le vénérable maître, le saint Ibn 'Ataï-Llâh dit dans ses hikam : 'Puisque tu sais que le diable ne t'oubliera jamais, à toi de ne pas oublier Celui qui tient la mèche de ton front [i.e. Dieu]' (Coran, XI, 59). Et notre maître disait : 'La vraie manière de faire du tort à l'ennemi, c'est de s'occuper de l'amour de l'Ami ; par contre, si tu t'occupes à faire la guerre à l'ennemi, il aura obtenu ce qu'il a voulu de toi, et tu auras perdu en même temps l'occasion d'aimer l'Ami'. Et nous disons : tout bien est dans le souvenir (dhikr) de Dieu, et la voie qui mène vers Lui ne passe pas ailleurs que par la résignation à l'égard du monde, l'isolement à l'égard des gens et la discipline extérieure et intérieure. 'Rien n'est plus utile au coeur que la solitude, car par elle il entre dans l'arène de la méditation', comme l'a dit le vénérable maître, le saint Ibn 'Ataï-Llâh (que Dieu soit satisfait de lui) dans ses hikam. Et nous disons : rien n'est plus utile au coeur que l'abnégation à l'égard du monde et le fait d'être assis devant les saints de Dieu.
La détrônisation de l'ego est pour nous et pour tous les maîtres de la Voie une condition nécessaire ; et en ce sens l'un d'eux a dit : 'Cela même que vous craignez de moi, mon coeur le désire'. Mais il ne faut pas, ô faqîr, que tu en dises autant, avant de l'avoir dit à ta propre âme obligée à marcher sur ce chemin, et non par ailleurs."

Bon cette lettre parle de plein de choses, dont un grand nombre me passent au dessus de la tête (ou du coeur). Mais il y a bien cette idée que dans le conflit intérieur, lutter contre son âme en la jugeant revient à lui laisser les clés (je ne sais pas si je suis clair...). Un point peut-être : l'ennemi, le diable, peut se comprendre comme les tendances de l'ego.

Hum je m'embrouille je ne suis pas sûr d'être compréhensible. Ni même d'avoir compris ce que j'essaie d'expliquer. Il y a cette idée que si on part dans ce qu'il appelle le bavardage intérieur, on lutte en quelque sorte sur le terrain et avec les armes de l'ennemi.

Se juger, c'est en quelque sorte penser qu'on détient l'aune pour mesurer ses défauts, et donc c'est encore une manifestation de l'ego.

Bon une précision : tout ça est bien raisonné, mais je rassure le lecteur : j'ai un mal fou à connecter tout ça à une réalité intérieure. Disons que j'essaie de rendre compte de lectures mais je n'ai pas accès à la connaissance, loin de là.

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