Cahin Caha

Je sais ce titre est un peu facile... mais bon... je suis mort de fatigue, et bien arrivé à Séoul. Coup de bol, j'ai rencontré une Coréenne que je connaissais à l'aéroport. Elle était là pour accueillir une dame importante, une Argentine. Tout le monde suit ?

Bref après avoir déposé la dame argentine, la dame coréenne m'a laissé aux bons soins du chauffeur. Et me voilà lancé dans Séoul avec un chauffeur qui ne parle que Coréen, mon téléphone portable qui pour une raison qui m'échappe ne marche pas ici, en route pour mon hôtel.

Drôle d'arrivée. Assez chouette en fait. Au niveau décalage horaire et fatigue c'est pas top, mais la ville a l'air assez fascinante. Bien sûr il y a des tas d'immeubles modernes, mais au détour d'une rue nous voilà dans un quartier de collines avec des petites maisons aux toits de tuiles, avec des tas d'enseignes que je comprends pas du tout. Partout des églises.

Au coin d'une rue, deux soldats américains avec des sacs de courses, puis un parc, puis l'hôtel. Encore une chance que le chauffeur se soit pas trompé. Dans le hall de l'hôtel, une volée de jeunes femmes en robe "traditionnelle" (renseignement pris, ce sont des hôtesses... de Singapore Airlines).

A la télé c'est assez space. Des pubs pour le mondial et l'équipe de Corée. Deux chaînes avec du baseball. Une chaîne japonaise avec un vieil épisode de Rawhide en noir et blanc (!). Clint Eastwood doublé en Japonais c'est pas mal.

Le temps de lire mes mails, et je découvre qu'à peine suis-je parti que mes charmantes collaboratrices me balancent un petit missile. Sympa. Vais me faire une petite sieste puis à nous deux Séoul !

J'ai fait mon wird dans l'avion. Je réalise au passage que je ne pourrai pas assister à une réunion avant au moins deux semaines, et ça me fait tout drôle. Peut-être qu'il y a une mosquée à Séoul ? Faut que je me renseigne.

Je viens de passer une demi heure avec la personne de mon équipe qui me déteste et refuse de me parler. Celle qui a écrit une note incendiaire à mon endroit en mettant mon patron en copie. Et celle qui avait déjà essayé de me faire virer il y a 6 mois.

Le pire c'est que je l'aime bien ! Mais rien à faire elle est carrément bloquée sur la position "pitbull".

Je lui ai dit un peu ses quatre vérités. Ca fait du bien ! Rien de concret n'en est ressorti, mais d'une certaine manière j'ai marqué mon territoire. On verra bien ce qui se passera ensuite, mais j'avais un peu peur, et au moins j'ai affronté ça.

Mes lecteurs vont encore se dire "quel veinard"... Je pars demain pour une semaine en Corée du Sud. Mes histoires de boulot sont très loin d'être arrangées, disons que l'aiguille du baromètre est coincée sur "avis de tempête".

N'empêche que si je dois perdre ce boulot il faut reconnaître que j'aurai eu l'occasion de faire des voyages rigolos. La Corée... je crois bien que c'est assez fascinant. Je vous raconterai de là-bas j'espère.

Hier soir petite réunion chez moi. Enfin petite... on était quand même 8 ! Pour des réunions en dehors de la zaouia c'est pas si mal. Ca faisait à peu près 15 jours que je n'avais pas participé à une réunion... ça fait du bien !

Je ne sais pas l'expliquer. La chaleur des frères ? Le goût ? Aucune idée. On m'a raconté une histoire : un frère sénégalais de la voie, en visite au pays, a parlé de notre tariqa à des gens. On lui a dit "votre sheikh doit être un très grand sheikh pour que vous fassiez les pratiques que vous faites dans un pays comme la France !".

Et pourtant ça semble si "facile" ! Bon je ne suis pas le champion des pratiques ni de la charia, mais je n'ai jamais vécu une réunion sans en sortir heureux. L'effet ne dure pas toujours longtemps, mais ça marche à tous les coups.

Après la réunion, j'ai discuté avec un frère qui connaît bien les soucis de l'entreprise. Il m'a conseillé de contre-attaquer. Il y a une femme dans mon service qui non seulement ne m'adresse pas la parole mais encore m'a écrit un mot incendiaire en mettant mon patron en copie.

Eh bien le conseil de ce frère, c'est de l'attaquer. Je vais faire ça ! En essayant de m'orienter, mais taïaut ! Peut-être que ça changera le rapport de forces. Le résultat reste très incertain, et n'est pas dans mes mains, mais au moins je reprendrai un peu la main.

Hum ça me prend pas mal la tête mes histoires de bureau en ce moment. J'en ai même rêvé cette nuit. Mais c'est normal ! Espérons que les choses vont s'améliorer.

Tiens comme c'est vraiment une période compliquée, et de perplexité, je renoue avec un truc que j'avais pas fait depuis très longtemps : tirer au sort une sapience d'Ibn Ata Allah. Ca donne ça :

"Il ne convient pas à qui marche dans la voie (sâlik) qu'il parle des grâces qui lui sont prodiguées (wâridat) ; cela diminuerait leur influence sur son coeur et s'opposerait à ce qu'il soit sincère avec son Seigneur au moment où il est favorisé."

Comme toujours, ces aphorismes me plongent dans des abîmes de réflexion. Je ne sais pas si j'ai quelque chose à en tirer par rapport à ma situation professionnelle, mais bon...

Ca me ramène plutôt aux questions du type "est-ce que je goûte ?". Et si on goûte, doit-on en parler ? Je remarque depuis que je suis dans la voie que les gens qui ont le plus "d'ancienneté" sont en général très humbles et très discrets par rapport à ce qu'ils peuvent vivre.

Bon d'accord il y a les hâls (ou plutôt ahwal au pluriel) qui sont parfois violents, mais ça c'est une manifestation extérieure. Les grâces dont parle Ibn Ata Allah sont sans doute d'un autre ordre, encore que je ne puisse pas en parler.

L'autre jour quand j'ai déjeuné avec ce frère qui m'a pas mal réconforté, on a parlé de la voie, je lui ai dit que j'avais comme souvent des doutes, des doutes sur ma foi même. Il m'a dit "est-ce que tu goûtes ?". J'ai répondu oui. Je crois bien que je goûte. Il m'a alors dit "dans ce cas ce n'est rien d'avoir des doutes !".

Il m'a demandé aussi "est-ce que tu sens que Dieu t'aime ?". Et là je n'ai pas su quoi répondre... Hum tout ça est assez difficile à expliquer, et ça part dans tout les sens.

Pour revenir à l'aphorisme, tout est dit : sincérité, adab, etc...

Entretien avec mon boss : en gros il me donne 3 semaines pour rétablir la situation, sachant que sur les 3 semaines je ne serai là qu'une semaine et demi ! Mais bon c'est déjà ça.

On va voir ce qui se passe. Je suis en général pas mauvais sous la pression. Mais c'est pas confortable !

Hier soir j'ai fait plus de dhikr que d'habitude, ça m'a fait du bien. En revanche j'ai eu du mal à m'orienter pendant l'entretien. Mais un petit peu quand même... Mon patron est un noeud d'angoisses, c'est assez difficile. Le pire c'est que tout ce qui se passe en ce moment est aussi difficile pour lui que pour moi. Enfin non : son job n'est pas en jeu !

Déjeuner avec un frère que j'aime beaucoup... ça m'a un peu sorti des embrouilles du boulot. On a parlé de ma situation naturellement.

Il m'a conseillé un truc tout simple : m'orienter quand je discute avec mon patron ou dans d'autres situations de conflit. On va voir ça dès demain matin : j'ai un rendez-vous avec le patron pour parler de mon avenir.

Pour les fidèles du blog, et sans surprise, le Vil Informaticien Psychopathe va, lui, continuer à sévir. Alors même qu'il a récemment menacé de traîner mon patron devant les tribunaux ! Il faut croire qu'il faut crier fort pour avoir raison.

Je ne sais pas encore comment ça va tourner pour moi, mais dans un sens si je pars je serai sans doute soulagé de m'échapper de cette ménagerie !

Retour de Varsovie, pas grand chose à en raconter.

Mais du côté boulot, ça va pas trop fort : il est possible que je perde mon emploi ! Faites des voeux pour moi !

Je repars demain pour Varsovie. Bon pour ceux qui pensent que j'ai un job de rêve on se calme tout de suite : il y a toujours autant de problèmes et de conflits avec les femmes de mon équipe, j'ai un patron bizarre avec qui ça se passe pas trop bien, etc... Ici je parle peu des tracas, mais il y en a plein !

Reste que les voyages c'est quand même génial. 4 jours en Pologne, je suis impatient !

Hier je suis tombé (merci Arte !) sur des trucs de Bach joués par Glenn Gould. Hallucinant. Je n'écoute presque pas de musique classique. Mais comment ne pas être remué par son côté complètement habité...

On le voit assis sur une chaise toute petite, ce qui lui donne l'air d'un albatros, ou d'un myopathe, tout dégingandé et tout courbé. Et son visage est ailleurs... on dirait un autiste. Hum... myopathe et autiste... et pourtant c'est ça qui m'est venu en tête.

Il regarde ses mains, comme surpris qu'elles fassent des mouvements pareils, et il semble écouter des musiques célestes... Hum j'en parle bien mal mais j'ai trouvé ça magnifique.

Pour ceux qui ne lisent pas les commentaires de ce blog, une lectrice a mis en commentaire récemment des vers magnifiques de Goethe, inspirés je crois par le Diwan de Hafez, que je ne résiste pas au plaisir de recopier ici :

"Dans la respiration sont incluses deux grâces :
Aspirer l'air, et s'en délivrer.
L'un oppresse, l'autre soulage ;
Tel est le merveilleux mélange de la vie.
Remercie donc Dieu quand il te presse,
Et remercie-Le encore quand il te relâche à nouveau."

Dans le soufisme on parle très souvent d'états de contraction et de dilatation... étonnant non ?

Réunion samedi à la zaouia, j'étais bien content de revoir les frères après 2 semaines sans les voir... et paf ça ne rate jamais au moment de chanter j'ai été bouleversé comme d'habitude.

Les chants qu'on fait sont très beaux ; en plus samedi c'était parmi mes préférés (et oui avec le temps on finit par avoir ses préférés...). Bon il n'y a pas que les chants dans une réunion. Disons que ça m'émeut particulièrement.

J'ai expliqué qu'on a des petits soucis de voisinage ; il faut donc qu'on se "contrôle" au niveau décibels. Eh bien du coup les chants sont encore plus beaux. C'est plus difficile de chanter doucement qu'à pleins poumons. Mais ça oblige à plus écouter les autres. Et le résultat est génial.

Boulot, boulot, boulot, les réunions et les rendez-vous s'enchaînent... besoin de souffler moi.

Vivement ce soir ! 17 h et j'ai encore trois gros trucs à faire.

A Téhéran, j'ai acheté un tableau, un fixé sous verre (c'est-à-dire un tableau peint sur le revers d'une plaque de verre). J'ai déjà quelques fixés sénégalais chez moi. Là c'est marrant : c'est un tableau que j'avais vu l'an dernier lors de mon premier voyage, et que j'avais regretté de ne pas avoir acheté. Il faut croire qu'il a bien voulu m'attendre un an...

Ca représente une scène des premiers temps du chiisme. Hum je suis pas trop fort en histoire de l'islam, alors le chiisme... D'après le marchand, c'est une scène lors d'une bataille (dont le nom m'a échappé, mais qui n'est pas Kerbala), où meurt Ali Akbar, fils de Hassan, le 3ème imam pour les chiites.

Hum en même temps en cherchant un peu dans wikipedia ça dit pas ça du tout ! A l'aide ! Je suis perdu ! C'est plutôt Hussein le 3eme imam ! Je devrais pas écouter les marchands...

Pour moi qui ai des origines russes, il y a quelque chose d'assez troublant : dans le dessin, jusque dans les cottes de maille et les vêtements, je retrouve des choses qu'il y a dans des vieilles icônes... Il doit y avoir une correspondance... c'est en tout cas très beau.

La Perse voue un culte à ses poètes, et parmi eux en particulier à Hafez. Un recueil de ses oeuvres, le Diwan, est, dit-on, présent dans toutes les maisons. Bon je ne sais pas si c'est dans les moyens de tous les Iraniens, mais cette culture est vraiment présente.

Lors de mon séjour, j'ai eu la chance de passer un peu de temps à la Maison des Artistes d'Iran, où se tenaient des conférences et des tables rondes. Le bâtiment est une ancienne caserne (!) rénovée et qui comprend des salles de conférences, un théatre, des salles d'expositions, etc...

Au rez de chaussée, il y a un très beau jardin, et on peut prendre un café sous une véranda qui donne sur le jardin (voir photo). C'est assez marrant : on a à la fois un grand sentiment de calme et de tranquillité à cet endroit, avec des chants d'oiseaux, des très beaux arbres (comme l'arbre à grenadine, le grenadier, magnifique), et en même temps, on est en plein centre de Téhéran, donc bruits, klaxons, etc...

A un moment j'ai pris un café à cet endroit avec quelques personnes, françaises et iraniennes. Un mendiant nous a tirés par la manche pour qu'on lui achète des petites enveloppes. Dans ces enveloppes, quelques vers de Hafez, qui sont comme un présage. On m'a d'ailleurs raconté qu'on utilise souvent le Diwan pour trouver la réponse à une question qu'on se pose.

Je me suis fait traduire les quelques vers qui étaient dans mon enveloppe : ça disait à peu près "ce n'est pas le temps d'aller à l'école ou d'étudier, il faut écouter les oiseaux, profiter du moment qui se présente et goûter les fruits de l'arbre" (je cite très approximativement de mémoire).

Allez savoir pourquoi, ces mots me sont allés droit au coeur, et m'ont parlé... Peut-être que je suis sensible à la poésie !

Juste avant de partir à Téhéran, j'ai passé le week end à fêter l'anniversaire d'un ami très cher à la campagne. Bon tout le monde était assez euh... disons que presque tout le monde avait un verre dans le nez.

Le samedi soir on a dansé jusqu'à 5 heures du matin. Je danse assez rarement : je ne vais jamais en boîte, et je suis de moins en moins souvent invité dans des fêtes (c'est des trucs de jeunes !). Là c'était vraiment super.

A un moment j'ai cru avoir une hallucination. Bon on va encore me prendre pour un dingue, ou me demander si j'étais passé au contrôle antidopage, mais voilà : pendant que je dansais, j'ai eu l'impression que je voyais en très grand le visage du sheikh au dessus des gens. Comme s'il était là et me souriait en me voyant.

Ca a duré au moins 10 minutes. Etrange...

Bon après en me couchant j'ai eu aussi l'impression en fermant les yeux que plein d'images défilaient devant mes yeux. Peut-être que c'est cette boisson au gingembre que j'ai bue !

Quoi qu'il en soit cette vision du sheikh m'a vraiment surpris... il doit y avoir un sens à tout ça.

Bon le retour au bureau s'annonce assez sportif ; je suis pas sorti des embrouilles avec l'équipe ! Je raconterai ça quand j'aurai le temps.

Téhéran... plein de choses à raconter aussi. Quel pays ! Quelle ville ! J'y reviens vite.

Et voila... de retour a Teheran. Il y a un an lors de mon premier sejour j'etais dans un drole d'etat moralement, content d'avoir un boulot mais un peu au fond du trou pour le reste.

Juste avant de partir j'ai passe le week end a la campagne pour l'anniversaire d'un de mes amis les plus chers... J'ai brule au soleil comme un idiot, tout le monde croit que je reviens du ski. Puis grosse fiesta, avec la boule a facettes et tout et tout. Genial.

Au passage pardon pour les accents c'est le clavier local...

Teheran malgre le contexte politique me semble tres semblable a l'an dernier : l'enfer des embouteillages, les gens toujours aussi gentils, toujours autant de jolies filles partout, et beaucoup d'energie. Et cette impression d'une religion qui parce qu'elle est imposee aux gens est comme dessechee.

Bien sur ce n'est que mon petit avis. Du coup c'est paradoxalement un environnement tres materialiste. Et le premier diner auquel j'ai ete invite (bourgeoisie un peu nostalgique il est vrai) non seulement tout le monde picolait mais on m'a plusieurs fois repete "vous pouvez boire, soyez sans crainte". Je trouve ca dingue. Pas que les gens boivent, mais qu'on marche a ce point sur la tete.

Et lors de mon heure et demi de taxi cet apres midi pour retourner a l'hotel le chauffeur (charmant, il ne parlait que Persan donc pas facile de discuter mais bon...), le chauffeur donc a mis dans son autoradio une espece de dance music russo-italienne carrement gratinee. Davai Davai !

Hum c'est un peu dans le desordre tout ca... j'essaierai de faire le tri dans les jours qui viennent. Un pays ou les gens disent sans arret que tout va mal mais ou la peche des jeunes donne confiance pour l'avenir, ca me rappelle quelque chose. Mais quoi...

A bientot !