31.3.05

lectures

Cette semaine, pour la première fois depuis des mois, je n'ai rien lu de spirituel ou de religieux. J'avais emmené les lettres d'Ad Darqawi et une édition du Coran, mais tout ça est resté au fond de mon sac. Je ne sais pas trop expliquer pourquoi. Peut-être que j'avais besoin de faire un pause. Peut-être que c'est plus facile de lire ça quand on est seul chez soi...

J'ai lu des très beaux romans du coup. Mais je me sens un peu bizarre. Comme coupé des nourritures que j'ai eues pendant longtemps. Heureusement qu'il y a une réunion ce soir. Et puis qui sait, je vais peut-être me remettre au Coran avec un regard différent.

Quoi qu'il en soit je sens bien que les prochaines semaines vont me bousculer un peu : nouveau boulot, nouvelles habitudes, etc... et toujours pas la paix dans mon coeur. Mais ça, je ne crois pas que les lectures puissent y changer grand chose. A part "la illaha illa Llah" je ne vois pas ce qui marcherait. Les Mourides complètent en disant "Muhammadun Rasulullah" quand ils psalmodient, mais je vais m'en tenir à ce qu'on fait dans la tariqa.

un autre elhadji

Le pote qui était avec nous à Gorée a été super impressionné par un type qui bosse là bas et qui s'appelle Elhadji. Bon pour ce pote c'était son premier séjour en Afrique, je comprends qu'il ait été un peu soufflé par le côté profond et simple des gens.

Elhadji, avec qui j'ai beaucoup discuté (devinez de quel genre de sujets...), est un type super. Il a une drôle d'histoire : toute sa famille est tidjane, et lui a été ramené dans le droit chemin après une adolescence très turbulente par des mourides. Il se retrouve donc seul mouride dans sa famille. Bon les confréries sont proches, mais c'est quand même assez rare.

Ce n'est pas un saint, et vu sa cote auprès des filles il y a des moments où je n'aimerais pas être à sa place (il est marié...). Mais il est droit. Ca ça n'a pas forcément grand chose à voir avec la religion : il y a des gens droits et honnêtes partout, et des malhonnêtes partout. Disons qu'il a le coeur franc. Comment on sent ça ? Aucune idée. C'est juste ce que je ressens quand je parle avec lui.

mort

Un gosse de 17 ans est mort quasiment sous nos yeux lundi. Quand on est arrivés sur la plage, il était entouré de plein de gens, inerte, quelqu'un lui faisait du bouche à bouche et essayait de lui faire des massages cardiaques. D'après ce que j'ai appris plus tard, il serait mort soit d'hydrocution soit d'une crise d'épilepsie qui aurait provoqué la noyade.

Ca a duré pas mal de temps avant que des pompiers arrivent et se décident (je passe les détails) à l'emmener à Dakar dans un bateau. Naturellement il était certainement mort depuis longtemps à ce moment là. C'était un très bon nageur, comme tous les gamins du coin. J'ai entendu dire qu'il voulait se baigner en vitesse avant de partir au Magal.

Un moment très triste. Ca m'a montré aussi les différences de réactions : les occidentaux ont tendance à dire "mais c'est honteux que les secours ne soient pas mieux organisés, qu'il n'y ait pas des pompiers mieux formés, avec du matériel, etc...". Les gens du coin vont plutôt dire "c'est Dieu qui en a voulu ainsi".

Bon c'est pas si simple que ça, avec d'un côté les blancs matérialistes et de l'autre les pauvres noirs fatalistes. En l'occurence je crois que si c'était arrivé sur une plage de chez nous le gamin serait mort aussi. Quand on l'a ramené sur la plage il était déjà mort. La réaction des gens n'est pas simplement "fataliste".

Mon beau-père, lui, me dit "les gens d'ici c'est incha allah et hop on en parle plus". Bien qu'il ait vécu longtemps dans ce pays je crois que c'est plus compliqué que ça. C'est vrai que ça ne doit pas conduire à se dire "puisque Dieu décide de tout ne faisons rien", mais pour moi c'est surtout une façon d'affronter le malheur, de lui donner un sens.

Ca paraît bête, mais ça m'a mis en pleine figure la fragilité de la vie. Je ne pense pas souvent à la mort, pas de façon concrète. Et là ce gamin de 17 ans, qui n'a encore rien laissé dans ce monde, si ce n'est son nom... Je ne savais pas quoi faire. Le soir j'ai fait des prières pour lui. J'y reviendrai sans doute. Là c'est encore un peu confus dans ma tête, dans mon coeur.

magal

Mardi c'était le magal de Touba. C'est le pélerinage le plus important de l'année pour les Mourides. C'est la célébration de l'anniversaire du retour d'exil de Cheikh Amadou Bamba, le fondateur de la confrérie. Je suis pas trop au courant, mais il a été exilé par les français pendant de longues années je crois (au passage pour ceux qui accusent les confréries soufies de s'être pliées dans l'histoire aux désirs des pays colonisateurs c'est un des très nombreux exemples de résistance... mais bref ça c'est un autre sujet).

Tous les ans le Sénégal s'arrête à cette date et près d'un million de pélerins (sur une population de moins de 15 millions) vont dans la ville de Touba. C'est dans l'intérieur des terres, il doit faire un chaleur de bête... je n'ai pas vu d'images du pélerinage mais ça doit être impressionnant.

Un ami qui a fait le pélerinage m'a raconté un peu : prières, chants, pélerinage sur la tombe du Cheikh, il y a plusieurs jours d'intense ferveur. Je me sens bien ignorant pour en parler... par contre ça fait de Dakar une ville fantôme, vidée de ses habitants. Gorée aussi est très calme pendant 2 ou 3 jours.

chants

Un soir vers 9 heures alors que j'étais sur la terrasse de la maison, j'ai entendu des chants qui m'ont semblé étrangement familiers. Un homme avec une de ces voix africaines un peu nasales, qu'on dirait dorées, faisait apparemment des sortes d'improvisations autour d'une trame de versets coraniques et de prières sur le prophète, avec des répons de la part d'autres voix.

Je ne me souviens pas de la mélodie, mais c'était tout proche, et très beau. Après une demi heure, on est passé à des chants en coeur, beaucoup plus réguliers. Ca m'a immédiatement rappelé les chants qu'on fait à la fin de la wadhifa. C'était d'une beauté... Mon frère et un pote qui était là avec nous étaient assez scotchés aussi je crois. On a passé la soirée jusqu'à assez tard à discuter en écoutant les chants.

A un moment pendant les chants je suis sorti pour voir d'où ça venait. Au coin de la rue (les rues sont très étroites et en sable) il y avait quelques nattes étalées sur le sol à la sortie de la maison des voisins. Et un cercle d'hommes (7 ou 8) dans une posture familière, assis les uns contre les autres en tailleur. A ce cercle s'ajoutaient quelques femmes qui participaient aussi aux chants. L'ensemble a duré au moins 3 ou 4 heures.

Ce qui est marrant c'est que mon frère et ce pote sont assez musiciens, donc leur écoute était plutôt centrée sur l'aspect musical. Mais je n'ai pas pu m'empêcher de penser que ce qui les touchait c'était surtout la ferveur qui sortait de tout ça.

Le lendemain ma mère s'est inquiétée de ce que ça l'avait empêchée de dormir, et s'est demandé si ça serait comme ça tous les jeudis. Pas pu m'empêcher de sourire. Renseignement pris ça tourne : chaque jeudi c'est un membre différent de ce petit groupe qui accueille les autres, prépare le thé, offre des petites choses à manger.

Moi je m'étais endormi bercé par les chants, avec un grand sourire.

retour difficile

Dormi 2 heures dans l'avion cette nuit... du coup je suis vraiment à côté de mes pompes. Bon en plus Paris sous la grisaille après une semaine dans cet endroit ça fait drôle... plutôt déprimant en fait.

Il faut dire que Gorée est un endroit à part : on y est à la fois en Afrique et pas du tout en Afrique. C'est un peu hors du temps, on est à l'abri du monde. La vie s'écoule à 2 à l'heure. Mais bon tout a été dit et écrit sur cet endroit, je ne sais pas trop quoi ajouter.

Reprendre le fil de ce blog... faut que je m'organise. Déjà premier point je ne suis pas allé à la mosquée là bas. Il y a pourtant une très jolie mosquée qui ressemble vaguement à une hacienda mexicaine (me demandez pas pourquoi). Comme c'est un tout petit endroit je me suis peut-être dit inconsciemment qu'y aller reviendrait aux oreilles de ma famille très vite.

En plus dans un séjour en famille dans une maison pas très grande j'avais déjà du mal à m'isoler pour faire mon dhikr matin et soir, alors... mais dans un sens je regrette un peu. C'est un endroit où je suis déjà allé plein de fois, j'y ai des bons et des mauvais souvenirs, donc tout ça s'est un peu mélangé pendant mon séjour.

Je m'attendais à ce que le fait d'être musulman change beaucoup de choses, et en fait non. Je parle aux gens comme avant, je ne "sens" rien de plus ou presque. Il faut dire que l'islam au Sénégal est à la fois très présent et très "doux" si on peut dire ; incha allah ou hamdulillah reviennent dans une phrase sur deux mais les gens sont très accueillants et respectueux des différences. Là comme ailleurs les choses se feront petit à petit pour moi.

Peut être que ça vient du fait que l'islam s'est développé là bas par des confréries, qui, même si elles n'utilisent pas le terme de soufisme, sont très proches des tariqas soufies. D'ailleurs la Tidjaniyya (d'origine marocaine) est très présente, de même qu'une branche de la Qadiriyya. Quand à la principale appartenance, les Mourides, c'est aussi une confrérie qui a beaucoup de points communs avec ce que je connais dans la tariqa.

22.3.05

départ

Ayé j'ai mon billet. Je pars demain pour une semaine au Sénégal. Veinard que je suis. Drôle de journée ; du coup j'ai couru dans tous les sens.

Pour mes milliers de lecteurs avides ça veut dire que pendant une semaine ce blog va tourner au ralenti ou même pas du tout... je verrai si je trouve un cybercafé.

Premier voyage en pays musulman depuis ma conversion... je sais pas trop si ça va me faire quelque chose de spécial. On verra. Par exemple je ne sais pas si je vais aller à la mosquée. Comme c'est un petit endroit où tout le monde se connaît, et que ma mère et mon beau-père ne sont pas au courant, je ne sais pas trop. D'un autre côté c'est bien tentant d'aller pour la première fois à la mosquée là bas.

la voie, les musulmans et le retour aux sources

C'est marrant : un frère m'a dit l'autre jour que pour quelqu'un qui a été élevé dans l'islam c'est à la limite plus difficile d'entrer dans la voie que pour quelqu'un qui n'était pas musulman à l'origine.

Attention : la tariqa s'inscrit strictement dans la Sunna. Simplement, il y a des choses qui peuvent un peu dérouter les gens au début. Plus je cotoie des frères d'origine maghrébine ou noire africaine, et plus je prends conscience de tout ça. Il faut savoir que dans le Maghreb, les voies ont souvent été vues dans les 30 dernières années comme un peu "démodées" ou comme des symboles du passé. Je suis bien ignorant en la matière mais je crois bien qu'il y a de ça.

Le chemin spirituel c'était pas "moderne". Sans parler du fait que beaucoup de musulmans sont dans une approche très "rationnelle" (hum j'essaie de faire attention aux mots j'espère ne pas dire trop de bêtises), alors que les tariqas il y a des côtés un peu irrationnels. Et puis le culte des saints, tout un tas de trucs un peu folkloriques qui sont associés à tort ou à raison à l'islam soufi sont vus aussi comme des pratiques un peu désuètes, ou un peu naïves.

Et encore je ne parle pas de ceux qui condamnent fermement tout ça, qui jugent que toute cette tradition mène à la perdition. Les censeurs. Bon je vais pas me lancer dans un historique sur le déclin et le renouveau du soufisme dans les 50 dernières années, beaucoup de gens ont fait ça très bien.

Pour revenir à mon sujet, il y a par exemple un frère ivoirien qui m'a raconté qu'après sa première réunion dans la tariqa il s'est dit "mais qu'est-ce que c'est que ça je ne reviendrai pas !". Et puis dès le lendemain il a eu une envie très forte de revenir. Il faut dire que par exemple les ahwal (c'est le pluriel de hâl, ces moments où on s'oublie et où on peut avoir des cris ou des mouvements incontrôlables) ça fait un peu drôle à voir au début.

J'imagine que pour un musulman ça peut même être choquant. J'ai déjà parlé de ça : ça n'a pas tant d'importance que ça, et plein de cheminants n'en éprouvent pas pendant des années. Bon et puis il y a d'autres préjugés chez beaucoup de musulmans qui sont tenaces (par exemple le fait d'avoir un guide spirituel peut être mal compris)

Je suppose que pour quelqu'un comme moi qui n'est pas musulman au départ il n'y a pas de préjugés là dessus. On en a peut-être d'autres mais pas ceux là. Dans ce sens je comprends ce que m'a dit le frère qui me disait que c'était pas forcément évident pour les musulmans "de naissance".

Du coup ceux qui entrent dans la voie je crois bien que c'est parce qu'ils ressentent un appel très profond. Bon je généralise, il y a tellement de façons différentes d'en arriver là... Mais un truc assez émouvant qu'on m'a raconté, c'est que pas mal de frères ou de soeurs originaires du Maghreb ont des souvenirs d'enfance où ce sont leur grands parents qui les emmenaient dans des zaouias. Encore cette idée d'un retour à l'enfance. Ca me plaît bien.

départ en coup de vent ?

Depuis que je sais que c'est bon pour le boulot je me demande si je pars pas en coup de vent une petite semaine au Sénégal. Ma mère, mon beau père et d'autres membres de la famille y sont pour 15 jours. C'est bien tentant. Après tout je n'aurai pas de vacances avant un certain temps une fois que j'aurai pris mon poste, donc...

Du coup ce matin j'appelle Air Sénégal International, et là patatras : tout le système de réservation informatique est en panne... de là à voir la main de Dieu... Je précise qu'il y a aussi des bonnes raisons pour ne pas partir : des raisons disons familiales et pas mal de trucs dans la tariqa.

Je vais bien voir je vais rappeler tout à l'heure.

21.3.05

contes et légendes

Hier soir (décidément quel week end) j'ai dîné avec plusieurs frères. A un moment ils ont commencé à raconter à tour de rôle des histoires sur Madagh. C'est la ville où se trouve la zaouia principale, c'est en quelque sorte le coeur de la tariqa. C'est là que je vais aller en avril (si tout se passe bien) pour le mawlid (la commémoration de la mort du prophète).

Les histoires sur Madagh... c'est hallucinant, il y a des anecdotes complètement incroyables. Je suis impatient d'y aller. Je sais pas trop par où commencer... bon il y a les mejdoub. D'après ce que j'en sais, un mejdoub c'est quelqu'un qui est "ravi en Dieu", c'est à dire en gros quelqu'un qui a décollé un jour et qui est resté en orbite. Bon il y a des degrés, il y a même, m'a-t-on dit, des gens qui sont mejdoub 6 mois puis qui redescendent...

En France, un type comme ça serait probablement envoyé dans un asile. D'ailleurs il y en a sans doute dans les asiles. Les mejdoub sont souvent redoutés, parce qu'ils peuvent "voir" des choses et ne se privent pas pour les dire. Je suppose que parfois ça ne doit pas trop faire plaisir. J'ai déjà évoqué ici ces histoires d'ivresse ; disons que les mejdoub sont ivres en permanence.

Le plus célèbre de l'histoire est un certain Hallaj. Il faudra que je fasse un petit topo sur lui à l'occasion. Il a vécu au moyen âge, et a été un martyr célèbre : il était tellement "parti" qu'il a dit des choses qui lui ont valu d'être condamné à mort par les autorités de l'époque. C'est à la fois quelqu'un qui est admiré dans le soufisme et qui représente une sorte d'extrême. La plupart des grands maîtres en tiennent pour plus de sobriété. Mais je m'écarte de mes contes et légendes.

Je ne sais pas trop ce que je peux raconter. Il y a des trucs tellement dingues que je vais passer pour un malade. Hum je vais laisser mijoter.

junior

Dans le groupe de Paris il y a un "autre" Gibril ; il est d'origine sénégalaise, et lui c'est son prénom euh de naissance disons. Samedi il m'a fait marrer en me disant qu'il allait m'appeler junior puisque ça fait beaucoup moins longtemps que lui que je porte ce prénom.

Hum pour mes lecteurs non-musulmans j'ai deux prénoms : on peut m'appeler indifféremment de mon prénom de naissance ou de mon prénom musulman... je sais ça fait drôle. De fait il n'y a pratiquement que dans la tariqa qu'on m'appelle Gibril, et même là ça m'arrive qu'on m'appelle de mon premier prénom. Je crois que c'est le genre de chose qui arrive à tous les convertis. C'est marrant mais "avant" je trouvais ça bizarre d'avoir un prénom musulman, je me disais "quel intérêt" ou alors "bonjour la confusion"... aujourd'hui ça me semble naturel. Bon le prénom c'est un sujet à part entière j'en parlerai à l'occasion.

Bref pour revenir à Gibril c'est quelqu'un qui est nettement plus jeune que moi, mais même s'il fait souvent le clown il me semble souvent très sage. Les rares fois où j'ai discuté de sujets sérieux avec lui j'ai beaucoup apprécié son point de vue. Du coup dans un sens je le considère comme un grand frère. Sur d'autres aspects je suppose que c'est moi qui pourrais lui apprendre des choses, mais bon... va pour junior.

tête un peu vide ou trop pleine ?

C'est bizarre... je ne sais pas si c'est cette histoire de boulot, mais j'ai une sensation de confusion aujourd'hui. J'ai passé beaucoup de temps avec des frères de la voie ce week end. Du coup c'est un peu comme si j'avais emmagasiné tellement de choses en peu de temps que j'ai du mal à faire le tri pour en parler aujourd'hui.

A vrai dire je ne sais pas trop par quoi commencer. Bon c'est clair que le fait de me remettre à travailler ça va changer pas mal de choses pour moi. Je dois être un peu maboul, mais ces derniers mois je ne m'en faisais pas alors que mes proches étaient (légitimement) inquiets sur ce sujet. Il faut croire qu'une fois de plus ma vieille baraka m'a protégé.

Sur le travail... je n'ai jamais été trop content de moi dans les situations de boulot. J'ai fait beaucoup de choses différentes, j'ai passé du temps à me chercher. Rien ne dit que je me suis trouvé, mais je crois que je vais avoir une approche un peu différente par rapport à il y a 5 ans. Peut-être que je vais avoir moins peur de m'engager, d'avoir des responsabilités. Je ne mets pas ça seulement sur le compte de mon évolution spirituelle. J'ai sans doute mûri.

Samedi j'ai discuté brièvement avec le responsable du groupe de Paris. Il ne parle pas à tort et à travers, aussi ses paroles ont un certain poids. C'est marrant il y a quelques semaines il m'avait dit un truc du genre "tu devrais peut-être te concentrer un peu sur la recherche d'un emploi"... et me voilà.

Bref samedi il m'a parlé d'une idée importante sur le travail. Ca vaut pour le reste de notre vie je suppose mais bon... l'idée c'est qu'il faut s'attacher à faire son travail le mieux possible, comme euh un don qu'on fait en quelque sorte. Pas pour une récompense. Pas pour les résultats qu'on peut en attendre. Mais juste pour faire bien. Hum c'est un peu difficile à faire passer. Comment se fait-il que ça paraisse si simple quand il me l'explique et que j'aie autant de mal à le reformuler ?

Ce week end en fait j'ai discuté avec beaucoup de gens différents. Je suis toujours frappé par la diversité des gens dans la voie. Alors bien sûr plus ça va et plus je me rends compte que comme dans tout groupe, les gens ont des défauts, des qualités, certains projets avancent, d'autres non, il y a des conflits, des divergences. Mais il y a aussi ce côté accueillant, le fait qu'on est accueilli spontanément par les autres. Et toute cette bonne volonté, ça fait avancer tout le monde.

J'ai l'impression que j'ai des choses à apprendre auprès de chacun. Un frère de province qui a dormi chez moi ce week end m'a parlé beaucoup du don. Du fait que tout simplement on reçoit beaucoup plus dans la voie si on se donne complètement. Ca sonne peut-être un peu creux mais tant pis.

Hum ça ne passe pas cet état de confusion... il va falloir que je laisse infuser un peu je crois.

du cochon, du cochon

Vendredi soir dîner chez mon père. J'ai annoncé la bonne nouvelle pour le job, du coup tout le monde était bien content. Bon mon père est un peu anxieux de nature donc comme c'était pas signé il s'est un peu retenu. Mon frère était là aussi.

Au menu, glurps : de la choucroute. Comme si Dieu avait décidé de me faire un petit clin d'oeil pour me faire "redescendre". J'ai déjà dit à mon père et ma belle-mère (sa deuxième épouse) depuis des années (bien avant l'islam) que la choucroute c'est pas trop mon truc, mais rien à faire, ça imprime pas. C'est un bon cas pratique : un pote m'avait justement posé le problème (que ferais-je en cas de choucroute chez les parents...).

Là c'est une question de choix personnel. Comme je sais que pour mes parents ça va être un choc le jour où je leur dirai que je suis musulman, je préfère ne pas les heurter. Donc j'ai mangé (très peu). J'aurais pu dire "ah non je suis devenu végétarien" ou "je suis barbouillé je vais juste manger du pain", mais bon j'ai décidé de faire ça. Je crois que c'est l'intention qui est la plus importante, et entre blesser mes parents inutilement et faire un petit coup de canif alimentaire le choix me paraît simple.

Mon frère était de bonne humeur (lui aussi est super content que j'aie retrouvé du boulot), donc il m'a un peu vanné. Il a regardé dans son assiette, et a dit "humm voyons..., du cochon, du cochon, du cochon, encore du cochon... y a beaucoup de cochon dans cette assiette". Tout ça avec un petit sourire. Bon les parents n'ont rien capté, mais moi je me retenais pour pas rigoler. Ma petite soeur a dit "j'espère que vous êtes pas musulmans". Re-sourire. Je me marre en y repensant.

Attention mon frère faisait ça sans aucune mauvaise arrière pensée. C'était super affectueux en fait. Après coup on en a parlé je lui ai expliqué que le choix est assez simple. Il commence sans doute à comprendre pourquoi ça ne va pas être très facile d'en parler aux parents. Mais bon je ne suis pas le premier ni le dernier à me convertir. Chaque chose en son temps. Et mon père qui me demande "tu bois toujours pas d'alcool ?"... hum.

18.3.05

el hajj

Encore un petit souvenir de jeunesse au Sénégal. J'espère que je vais pas choquer avec ça. Le Sénégal même si je ne voyais certainement que le côté pittoresque de la religion il faut bien dire que c'est mon premier contact un peu prolongé avec une culture musulmane. J'y ai fait de nombreux séjours entre 17 et 21 ans.

C'est là que j'ai rencontré pour la première fois quelqu'un qui avait fait le pélerinage. Enfin j'ai su qu'il l'avait fait mais on en a jamais beaucoup parlé. Et pour cause : c'est le type à qui j'achetais de l'herbe (je sais c'est mal). Je le connaissais seulement sous ce nom : El hajj. Je me souviens que je lui avais demandé s'il avait fait le pélerinage, après que quelqu'un m'avait expliqué ce que ce nom voulait dire, et qu'il m'avait répondu "oui, bien sûr".

Je ne sais pas trop pourquoi cet épisode m'est revenu en mémoire. Sur le moment je crois bien que je m'étais dit "eh bien... el hajj et tout et tout et il est dealer...". Pas que ça me choquait, mais je trouvais ça curieux. Du coup, pendant des années, quand j'entendais "el hajj" je pensais à lui. Pas qu'on ait particulièrement sympathisé, mais c'est plutôt un souvenir marrant.

Je prenais en général un taxi pour aller chez lui. Au fond d'une cour, il était là, dans une chambre dans la pénombre. On buvait un thé, on faisait nos petites affaires, on discutait et je repartais avec mes lunettes de soleil, avec sans doute l'impression d'être un peu un aventurier. Hum. A l'époque je le répète je ne comprenais rien à la religion, je voyais ça comme un truc "pour les autres".

Je suis pas en train de dire que c'est ça qui m'a amené à Dieu. C'est juste un souvenir qui me fait sourire. A l'époque j'étais jeune et bête, j'avais pris des risques idiots avec ça. Mais bon il y a prescription.

al hamdulillah !

Coup de fil à l'instant... on dirait bien que c'est bon pour le job auquel j'étais candidat. Je suis super content. Bon je les vois lundi pour signer, rien n'est fait mais là c'est bon à 99 %.

Gros gros soupir de soulagement. Je sais pas trop quoi dire. Vais laisser mijoter, et je vais passer un bon week end. Quand je pense à mes mauvais pressentiments d'hier... je me marre.

Al hamdulillah (Dieu soit loué).

C'est marrant cette nuit j'ai rêvé que j'avais le poste mais que du coup je pouvais pas aller à Madagh en avril... on saura lundi.

enfance, décidément

Hier soir à la réunion il y avait un "nouveau". Il est né en France mais d'origine Kabyle. Je lui ai demandé ce qui l'avait amené vers la voie... en fait quand il était petit, il allait en vacances tous les étés en Kabylie. Il y retourne encore souvent.

Apparemment il y a des zaouias partout là bas. Sa grand-mère l'emmenait parfois dans une zaouia, mais il ne se souvient pas très bien, il ne comprenait pas ce qui se passait là bas et en quelque sorte il a cherché à retrouver ça. Bon je résume un peu ce qu'il a dit, mais ça m'a beaucoup ému.

Ca m'a ramené à un des trucs qui tournent dans ma tête : cette idée que l'on retrouve quelque chose de l'enfance dans la foi, dans la spiritualité. Peut être que c'est moi qui suis particulièrement sensible à cette idée... quoi qu'il en soit j'ai trouvé ça chouette ce chemin.

états de l'âme

Dans la série le soufisme pour les nuls par un nul, je continue. Il faut savoir qu'il y a plein de façons de "graduer" la progression spirituelle. Hier soir on a parlé des grands états de l'âme, au sens de la nafs. Je rappelle que la nafs c'est l'ego, l'âme liée au monde sensible. Le travail spirituel permet petit à petit de purifier ou d'élever l'âme. Bon je suis pas sûr de pas dire des bêtises mais allons-y quand même. Toutes ces étapes correspondent à des références coraniques.

Schématiquement il y a d'après ce que j'ai compris les grandes étapes suivantes :
- l'âme despotique : on est complètement soumis à ses désirs, à ses passions, à ses peurs. C'est un peu le niveau zéro.
- l'âme admonitrice : l'ego commence à être un peu dompté, mais on a tendance à se juger. Une des propriétés du travail spirituel c'est que ça fait ressortir les défauts. Dans cet étape, on se juge, et se juger c'est encore une façon de se référer à soi, à son ego. C'est un point sur lequel je reviens en fin de note.
- l'âme apaisée : l'ego est dominé, les peurs, les désirs de puissance, de domination sont effacés. Hum que c'est abstrait : ça paraît si loin pour moi. J'en parle parce que pour pas mal de gens c'est un but en soi : on s'arrête là. Alors que le travail spirituel est sans fin, chaque étape n'est qu'un début (enfin d'après ce que j'en comprends).
- l'âme inspirée : là on entre dans la vraie connaissance de Dieu, j'en parlerai pas en détail ici.

Ce qui m'a frappé là dedans, c'est que justement hier j'avais lu une lettre du sheikh Ad Darqawi qui me semble bien s'appliquer à l'étape de l'âme admonitrice. J'en ai parlé au responsable du groupe, en lui disant "décidément tous ces hasards ça commence à faire beaucoup". Il m'a répondu en citant René Guénon : "le hasard n'est que l'explication de ceux qui ignorent les causes".

J'avais pas lu 50 lettres d'Ad Darqawi. Juste 2 ou 3. Dont celle qui parle de ce sujet. Je la cite ici, même si elle est un peu longue. Bon je rappelle que c'est vieux de près de deux siècles, et que tout n'est pas à prendre au pied de la lettre ; autre contexte, autre époque.

"La maladie qui afflige ton coeur, ô faqîr, vient des passions qui le traversent ; si tu les quittais et t'occupais de ce que Dieu t'ordonne, ton coeur ne souffrirait pas de ce dont il souffre. Entends donc ce que je te dis, et que Dieu te prenne par la main : si chaque fois que ton âme (nafs) t'attaque, tu te dépêchais à faire ce que Dieu t'ordonne et que tu lui remettais entièrement ta volonté, les suggestions psychiques et sataniques et toutes épreuves t'épargneraient sans aucun doute. Par contre, si dans les moments ou ton âme t'attaque, tu te mets à réfléchir là-dessus, à peser le pour et le contre et à te noyer dans le bavardage (intérieur), les suggestions psychiques et sataniques reflueront vers toi en légions jusqu'à te subjuguer et te submerger, et il ne te restera plus aucun bien mais rien que du mal ; que Dieu nous guide, nous et toi, sur le sentier de Ses saints, Amen.
Le vénérable maître, le saint Ibn 'Ataï-Llâh dit dans ses hikam : 'Puisque tu sais que le diable ne t'oubliera jamais, à toi de ne pas oublier Celui qui tient la mèche de ton front [i.e. Dieu]' (Coran, XI, 59). Et notre maître disait : 'La vraie manière de faire du tort à l'ennemi, c'est de s'occuper de l'amour de l'Ami ; par contre, si tu t'occupes à faire la guerre à l'ennemi, il aura obtenu ce qu'il a voulu de toi, et tu auras perdu en même temps l'occasion d'aimer l'Ami'. Et nous disons : tout bien est dans le souvenir (dhikr) de Dieu, et la voie qui mène vers Lui ne passe pas ailleurs que par la résignation à l'égard du monde, l'isolement à l'égard des gens et la discipline extérieure et intérieure. 'Rien n'est plus utile au coeur que la solitude, car par elle il entre dans l'arène de la méditation', comme l'a dit le vénérable maître, le saint Ibn 'Ataï-Llâh (que Dieu soit satisfait de lui) dans ses hikam. Et nous disons : rien n'est plus utile au coeur que l'abnégation à l'égard du monde et le fait d'être assis devant les saints de Dieu.
La détrônisation de l'ego est pour nous et pour tous les maîtres de la Voie une condition nécessaire ; et en ce sens l'un d'eux a dit : 'Cela même que vous craignez de moi, mon coeur le désire'. Mais il ne faut pas, ô faqîr, que tu en dises autant, avant de l'avoir dit à ta propre âme obligée à marcher sur ce chemin, et non par ailleurs."

Bon cette lettre parle de plein de choses, dont un grand nombre me passent au dessus de la tête (ou du coeur). Mais il y a bien cette idée que dans le conflit intérieur, lutter contre son âme en la jugeant revient à lui laisser les clés (je ne sais pas si je suis clair...). Un point peut-être : l'ennemi, le diable, peut se comprendre comme les tendances de l'ego.

Hum je m'embrouille je ne suis pas sûr d'être compréhensible. Ni même d'avoir compris ce que j'essaie d'expliquer. Il y a cette idée que si on part dans ce qu'il appelle le bavardage intérieur, on lutte en quelque sorte sur le terrain et avec les armes de l'ennemi.

Se juger, c'est en quelque sorte penser qu'on détient l'aune pour mesurer ses défauts, et donc c'est encore une manifestation de l'ego.

Bon une précision : tout ça est bien raisonné, mais je rassure le lecteur : j'ai un mal fou à connecter tout ça à une réalité intérieure. Disons que j'essaie de rendre compte de lectures mais je n'ai pas accès à la connaissance, loin de là.

17.3.05

toujours pas de nouvelles

Je devrais pas m'énerver comme ça mais on ne se refait pas on dirait. C'est pas pour tenir le lecteur en haleine. Juste que ça me stresse de pas avoir de nouvelles de ce job.

Peut-être qu'il y a une leçon pour moi dans tout ça. D'une part, je n'ai pas fait mes meilleurs efforts pour chercher du travail récemment. En quelque sorte cette piste en cours me suffisait. Par ailleurs j'ai ce côté "Perrette et le pot au lait" : je me projette au lieu d'attendre sagement et j'attends des choses là où je devrais simplement faire de mon mieux. Inconsciemment je m'y suis vu, avec les gens, les trucs à faire, le fait de retravailler etc...

J'ai déjà parlé d'un hikam qui dit "ne perds pas ton temps à convoiter ce qui t'est garanti, consacre toi plutôt à ce qui t'est demandé"... la sagesse c'est tellement plus facile d'en faire "profiter" les autres que soi-même !

La dernière fois que j'avais un peu trop cru en un job pour finalement ne pas l'avoir alors que j'étais parmi les tout derniers candidats en lice, je m'étais plus ou moins dit que je ne recommencerais pas à me projeter comme ça. Mais bon la nature humaine... D'ailleurs qu'est-ce qui est pire ? Etre recalé en "finale" ou ne même pas recevoir de réponse à une candidature ?

Difficile de répondre. Ca me rappelle (allez savoir pourquoi) la question totalement idiote "est-ce que tu préfères que ta femme te quitte pour un homme ou pour une femme". Je saurais pas dire pourquoi ça me fait penser à ça. Sans doute parce que c'est aussi une question idiote. J'ai encore du mal avec l'idée que "l'encre est sèche, les rouleaux sont rangés".

Dans le fond ça me ramène toujours au même sujet : on se croit aux commandes, on s'imagine qu'on maîtrise, et plus on croit ça plus on tombe de haut. Bon là en l'occurence j'ai pas non plus eu de "non". Mais que c'est difficile de se dire "j'ai fait de mon mieux, arrivera ce qui arrivera". On se dit toujours qu'on aurait pu ajouter ceci, mieux présenter cela, etc... mbref on verra bien.

Une autre parole sage qu'on m'a répétée récemment, c'est que ce qui est fait est fait. Ca a l'air bateau, mais comment dire... c'est pas facile à admettre non plus.

préjugés ?

Hier dîner chez ma mère. A un moment j'ai parlé de cette histoire un peu débile d'interdiction d'une pub singeant la Cène suite à une plainte d'une association catholique. Et là ma mère qui sort "tu te rends compte si c'était un symbole musulman il y aurait tout de suite une fatwa appelant à des attentats".

Hum. C'est vrai que la fatwa contre Salman Rushdie (qui n'est toujours pas levée à ma connaissance) a beaucoup marqué les gens, et à juste titre. Mais bon quand elle m'a sorti ça j'ai pensé que décidément c'était pas le moment de lui parler d'islam. J'ai juste fait remarquer que ce n'est pas à cause d'une fatwa qu'il faut mettre tous les musulmans dans le même sac, de même qu'on ne mettrait pas tous les catholiques dans le même sac sous prétexte, au hasard, que le pape déconseille le préservatif. Elle a alors répondu "oui bien sûr, d'ailleurs je connais très bien l'islam, je sais qu'il y a une majorité de gens très bien, je connais plein de musulmans etc...".

Pourquoi j'ai l'impression alors que c'était comme un cri du coeur sa première réaction ? Encore une fois je me rends compte que l'islam fait peur. Ca changera insha allah mais bon... ça m'a fait réfléchir sur ce qu'on appelle tolérance.

Un frère me parlait l'autre jour de ça : la tolérance c'est accepter les autres, mais parfois en les jugeant. C'est un peu vaseux en fait quand on y réfléchit. Je préfère (même si Dieu sait que j'en suis loin !) l'idée de non jugement. Bon c'est assez subtil. Le non jugement ce n'est pas dire "je m'interdis de juger les actions d'Hitler". Mais beaucoup de gens qui se pensent tolérants (et peut-être moi le premier) ne sont pas à l'abri des préjugés.

Hum c'est un sujet pas simple. Encore quelque chose que je vais laisser à mijoter.

glurps

Troisième entretien ce matin pour le job qui m'intéresse bien. C'est bizarre : l'entretien s'est très bien passé, avec un type très sympa qui ne travaille pas dans la structure mais qui joue le rôle de conseil pour ce recrutement. Et pourtant j'en suis sorti avec un assez mauvais pressentiment.

Bon ceci dit je suis pas madame Soleil, mes pressentiments en général... mais du coup je suis stressé. Je sais bien que je devrais me dire "tu as fait ce que tu peux, le résultat ne t'appartient pas", mais je me suis mis la pression tout seul. J'en ai parlé à plein de gens, je m'attends à ce que ma mère m'appelle pour savoir si ça s'est bien passé, etc... Ca prend une importance démesurée en quelque sorte.

On verra bien. Dans un sens ce serait trop beau que ça marche aussi "facilement".

donner, recevoir

Fouya je m'embarque dans un sujet euh bateau on va dire, au minimum casse gueule. Tant pis. On dit souvent que c'est plus difficile de recevoir que de donner. Je crois que c'est très vrai. Au fil d'une discussion l'autre jour je réfléchissais à ce qu'on trouve dans la voie.

Et là ma conscience m'a soufflé un truc du genre : "avant de savoir ce que la voie t'apporte, tu devrais plutôt te demander ce que tu peux donner" (je sais ça ressemble à un célèbre discours de Kennedy mais bon...).

Une parole du sheikh dit plus ou moins "celui qui veut avancer rapidement dans la voie doit donner le plus possible, sans compter et sans attendre en retour". Donner son temps, son énergie, son amour. De fait quand je vois certains frères je suis pas mal épaté. Il y a deux idées là dedans : le fait de donner, et le fait de donner sans rien attendre. Pas simple. On comprend tout de suite que le don (surtout quand on donne quelque chose qui nous est cher) n'est pas si facile que ça.

Et recevoir alors ? C'est encore pire... bon recevoir ça veut tout dire et rien dire. Par exemple l'orgueil, ou le manque d'estime de soi empêchent plein de gens d'accepter de recevoir de l'affection des autres. On se protège. Recevoir dans le cadre de la foi, d'un chemin spirituel, c'est peut être pas si différent. Je ne sais pas trop.

L'état de disciple est censé être une humilité, une attitude qui fait qu'on est en état de recevoir. De recevoir les grâces de Dieu j'imagine. Il y a plusieurs images qui illustrent ça : par exemple l'idée qu'on est un jardin, qu'il faut bien retourner et préparer la terre pour que quand la pluie tombe la terre en tire profit pour faire pousser des belles plantes. Ou encore l'idée du bol qui doit être orienté (tiens tiens l'orientation...) vers le haut : s'il est posé à l'envers, il ne retiendra rien. Hum je mélange plusieurs idées comme souvent.

Il y a quand même cette idée, un peu difficile à mettre en pratique, qu'il faut accepter de ne rien comprendre, de s'en remettre à Lui, pour éventuellement recevoir. Ca c'est pas facile. Je discutais récemment avec mon libraire préféré, et il me disait en substance "on ne comprend rien, on croit pouvoir expliquer les choses et puis on est toujours surpris". J'envie sa sagesse.

Je me rends compte que je dérape, mon sujet commence à devenir un peu trop large. Un peu plus et je vais parler de l'Abandon de la Volonté Propre d'Ibn Ata Allah. C'est sans doute que tout ça est un peu trop embrouillé dans mon esprit. Donner et recevoir. J'aurais dû me méfier avant de m'embarquer dans un sujet pareil.

16.3.05

le vide et ses amoureux

Bon sans entrer dans les détails j'arrive enfin à mettre en ligne (ça marchait pas depuis ce matin... j'ai bien cru que j'allais m'énerver)

Hier j'ai déjeuné avec une amie de ma mère, l'idée c'était que comme elle a peur de tout ce qui est ordinateurs j'y suis allé pour l'aider à faire ses premiers pas et à se connecter à internet. Comme ça a pris plus longtemps que prévu (étonnant non ?) on a pas mal discuté.

J'ai déjà expliqué que ma mère a une peur bleue du vide. Quand j'ai dit à cette amie que moi je suis plutôt dans les amoureux du vide elle a compris immédiatement ce que je voulais dire. Marrant il y a décidément deux sortes de gens : ceux qui comprennent du premier coup cette idée et les autres.

Ca veut dire tout bêtement avoir une nature contemplative. Ce qui est bizarre c'est que pour beaucoup de gens, non seulement c'est un concept qui leur échappe, mais ça leur fait peur. Pourquoi ? Je n'en sais rien. Mais je ne peux pas m'empêcher de penser que c'est quelque chose qu'on a tous en nous, mais que certains perdent. Je ne sais pas si c'est être "rêveur", je pense que c'est plus riche que ça.

Pour ceux qui se sentent "amoureux du vide", faites l'expérience : il y a des gens qui vont comprendre instantanément si vous leur dites, d'autres ne comprendront rien. Pas de jugement là dedans. Bon et puis c'est un peu facile pour moi en ce moment : je ne travaille pas. Peut être que quand j'aurai retrouvé un boulot je ferai moins le malin là dessus.

15.3.05

doigts croisés

Coup de fil à l'instant... j'ai un troisième entretien pour le job qui m'irait pas mal. Hum. Ca veut dire que je suis en "finale", et qu'il n'y a plus que moi et un autre candidat. Ne pas s'enflammer mais c'est plutôt une bonne nouvelle.

On verra ça dans quelques jours. Insha Allah. Je me répète ce qu'on m'a dit plusieurs fois : si c'est le job qui est pour moi ça se fera. Mais bon dans le passé perdre en finale j'ai déjà testé, je sais ce que c'est. Et je sais que je serai déçu si ça ne marche pas. J'ai pas des dizaines d'autres pistes de boulot en plus...

Disons que si ça marche ça sera vraiment chouette. Je pense vraiment que c'est une priorité maintenant pour moi de retrouver un travail. Ca n'a pas toujours été le cas, pour des raisons diverses. Attention je n'idéalise rien : je me doute que ce job ne sera pas facile (hum je m'enflamme j'en parle comme si c'était fait...). Si ça se fait j'y verrai sans doute un signe assez fort. J'y reviendrai. Dieu est plus savant comme on dit.

puissance du dhikr

Une autre impression de l'atelier de samedi. A un moment le frère qui animait l'atelier a proposé aux gens présents (une quarantaine de personnes) de faire un petit moment de dhikr. Et nous voilà pendant quelques minutes à dire tous ensemble "la ilaha illa Llah".

On en a reparlé après avec ce frère. Sur le moment je n'avais pas mis les mots sur l'impression que j'avais eue, mais je crois que c'est exactement ça : à partir du moment où on a fait ce petit moment de dhikr, l'atmosphère dans la pièce a changé. Du coup si ça se trouve les gens présents seront incapables de se souvenir en détail de ce qui s'est dit, mais ils garderont une impression.

C'est pas euh disons de l'hypnose... c'est juste que le dhikr installe les gens dans un état où ils ressentent les choses. Peut-être que le cerveau déconnecte un peu et que du coup il se passe autre chose.

Hum ça fait un peu baba cool mon truc... Pas grave. C'est vrai que pour moi le dhikr c'est devenu quelque chose de courant donc je ne me rends plus compte de ce que ça peut faire à quelqu'un qui n'en a jamais fait. Et dire que je suis à peine au dessus du niveau zéro du dhikr... Bon y a clairement deux sortes d'ateliers. Celui sur la descente du Coran avec Sidi Abd el Haqq était plus euh intellectuel on va dire. Mais celui de samedi c'était vraiment du témoignage, et ça ça passe pas que par les mots.

à qui je m'adresse ?

Pas si simple. Je me suis posé la question après l'atelier de samedi. Dans les ateliers il y a très souvent des foqaras dans le public, et parfois ce qui se dit doit être pas facile à comprendre pour des euh profanes disons. Loin de moi l'idée de comparer ce blog à une conférence ou à un atelier, mais il y a une similitude... a priori mes innombrables lecteurs se répartissent en trois catégories :
- des gens qui me connaissent sans être dans la voie ni dans l'islam
- des gens de la voie
- des musulmans qui ne sont pas dans la voie

Difficile de parler de la même manière aux trois catégories. Je vais prendre un exemple : mon frère a regardé une fois mon blog mais ne se sent pas du tout concerné. Est-ce parce que je ne parle que de la voie, de mon chemin ? Parce que je parle de choses qui demandent un certain niveau de connaissances de base sur l'islam pour être comprises ? Je ne sais pas trop.

Après tout je ferais aussi bien de ne pas me poser la question. Disons que je m'adresse à qui veut bien s'intéresser à mes hauts et bas. C'est sûr que quand je parle de dhikr, de hikam, ou que j'utilise d'autres mots inconnus des non musulmans je suppose que c'est pas simple à suivre mais bon... peut être faire un glossaire quelque part ? Je vais y réfléchir.

interdiction et intention

En ce moment il y a cette histoire d'interdiction d'une pub pour une marque de fringues. Libé faisait un gros dossier hier dessus. La pub a été interdite à la demande d'une association catholique parce qu'elle s'inspire de la Cène, avec des femmes dans le rôle des apôtres et un homme torse nu de dos.

C'est à peu près la 15ème fois que ce genre d'affaire arrive, avec sans surprise des débats sans fin. Ce qui est marrant c'est que contrairement à d'autres affaires du même type l'affiche en question ne me paraît pas vraiment "offensante" pour la foi chrétienne. Autant il y a eu dans le passé des affiches pour des films ou autres qui étaient salées, autant là je ne vois pas bien...

Bon sur les grands principes genre peut on tout montrer etc... je ne sais pas trop quoi dire. Je ne sais pas trop non plus comment je réagirais si je voyais une utilisation euh "limite" de symboles musulmans. Personnellement je suis plutôt libéral sur tout ça. Je ne sais pas si comme ne manqueront pas de le dire les media c'est l'illustration d'un nouvel ordre moral, du politiquement correct et que sais-je encore.

Ce qui me semble plus intéressant dans cette affaire de pub c'est qui a demandé l'interdiction et dans quelle intention. Du peu que j'en sais c'est une association proche du cardinal Lustiger. D'habitude dans ce genre d'histoire ce sont des associations disons plutôt extrémistes dans la galaxie catholique qui font ce genre de choses. J'ai peu de connaissances sur le sujet aussi je dis peut-être des bêtises, mais il me semble que Lustiger est assez euh modéré.

Alors est-ce que c'est un résultat de la "nouvelle" stratégie de reconquête de l'espace public engagée par l'église ? On se rappelle qu'à la Toussaint y avait eu des tas d'animations, et qu'on avait entendu des catholiques dire "on ne se fait pas assez entendre, faut plus qu'on laisse le terrain médiatique aux autres religions etc...".

Ce qui est marrant c'est qu'au final ça a plutôt fait de la pub à la marque de fringues, et que pas mal de gens (moi entre autres) n'auraient jamais vu la photo "offensante" sans cette interdiction. Bon si l'intention c'était de faire parler de l'église catholique c'est réussi. Si c'est pour poser un jalon, pour faire en quelque sorte de l'intimidation de sorte que la prochaine fois les publicitaires s'auto-censureront je ne sais pas... la seule analogie que j'aie en tête est plutôt idiote : c'est la stratégie du président du club de foot de Lyon, qui crie au scandale à tout propos, très probablement pour influencer à la longue les jugements sur son club. C'est de bonne guerre. Après tout quasiment tous les lobbys font de même.

Hum je sais pas trop où je voulais en venir en parlant de tout ça. Pas grave.

14.3.05

attention à mon ego

C'est marrant ça fait plusieurs fois que je me retrouve dans la position bizarre d'expliquer à des gens intéressés ou euh disons "nouveaux" ce que c'est que la voie. Ou plutôt dans la position de répondre à leurs questions. Faut que je m'habitue ça risque d'arriver souvent.

Là où ça fait drôle c'est quand il s'agit de musulmans. Par exemple samedi j'ai discuté avec un jeune homme d'origine bosniaque. Il a lu beaucoup de livres sur la spiritualité, le soufisme et il a l'air motivé. Et me voilà en train de lui expliquer des trucs sur la voie. Hum.

Là où je dois faire attention, c'est que c'est flatteur. Flatteur aussi quand tel frère algérien me dit qu'un truc que je lui ai dit l'a beaucoup touché. Faudrait pas que ça fasse gonfler mon ego. Déjà je me suis surpris à penser en écoutant le jeune homme bosniaque me parler de ses lectures "il a beaucoup lu mais c'est pas dans les livres etc...". Plutôt gonflé de ma part de penser un truc pareil : d'une part s'il y en a un qui lit beaucoup c'est bien moi, et d'autre part à ce que je sache je n'ai pas encore appris grand chose autrement que par le mental. L'essentiel m'échappe donc.

Bon je suppose que la nature humaine est ainsi faite. Et puis bon c'est pas non plus si grave. Je n'ai fait que renseigner des gens sur des aspects très concrets (les réunions, etc...). Mais connaissant ma tendance à me la péter, je dois faire attention.

Et surtout je pense qu'il faut que je remette les choses en perspective. C'est hallucinant d'être là à discuter de religion, de spiritualité, avec des gens que je ne connais pas. Vu d'où je viens ça fait quand même drôle.

Un truc en amenant un autre je repense à une discussion récente avec un frère. On comparait la qualité de l'enseignement dans nos études respectives. Ce frère est entré dans la voie et en islam assez jeune, sans doute vers 18 ans. Du coup pendant ses études il était déjà dedans. Ca m'a filé le vertige. Je repense à mes études (saouleries, fêtes, etc...) et je ne regrette absolument rien.

Mais un instant je me suis demandé comment ça aurait été si j'avais été dans la voie à l'époque. Et là ça m'a fait vraiment drôle. Je ne sais pas si j'aurais plus tiré profit de la scolarité... mais je pense que j'aurais vraiment été un alien sur le campus de mon école. Et probablement que je me serais senti assez euh étranger aux préoccupations de mes petits camarades. C'est pas vraiment le côté extérieur (pas d'alcool, la prière, le dhikr etc...) mais surtout le côté intérieur. Un truc qui m'impressionne chez beaucoup de frères c'est qu'ils font de leur mieux dans leur travail, dans leurs études. Hum. Huhum. Encore un vaste sujet.

question marrante ?

Samedi il y avait une conférence (il y en a une par mois en gros). Ces conférences sont destinées à faire connaître la voie à l'extérieur, et à répondre aux questions que les gens peuvent se poser, notamment sur les rapports entre soufisme et islam.

Là il y a eu une question marrante. Un jeune homme dans l'assistance a posé des questions sur le côté universel, sur le fait qu'on arrive au même but par des chemins différents, et pour préciser sa pensée il a demandé : "est-ce qu'au fond on ne pourrait pas être soufi tout en étant chrétien ?". C'est une bonne question. Sur le moment ça m'a fait sourire. Mais en fait ça mérite qu'on s'y attarde un peu.

Bon déjà un détail de vocabulaire : je ne suis pas soufi. On peut j'imagine se dire soufi quand on a atteint un degré d'élévation que j'ai du mal à évaluer. Moi on va dire que je suis faqir, ou disciple, ou cheminant... Mais pour revenir à la question, ben comment dire... il y a des traditions ésotériques dans toutes les religions. Et les qualités qu'on cherche à développer dans une voie sont universelles. Donc c'est vrai que dans un sens on pourrait se dire que n'importe qui peut suivre un enseignement soufi pour développer son coeur.

Hum. Je ne sais pas trop quoi penser des "soufis new age" comme il y en a beaucoup aux Etats Unis par exemple. Mais disons que dans une voie comme la nôtre, ça fait sourire ce genre de question : la voie ne s'envisage que dans le cadre de l'islam. Je pense que des gens peuvent tirer un profit spirituel de certains enseignements, y compris soufis, sans forcément être musulmans.

Mais disons que c'est pas pareil. C'est marrant ça me fait penser à un frère qui me disait un jour que si c'était à refaire il aurait bien rejoint la voie dans un premier temps quitte à attendre quelques mois pour se convertir. Pour moi ça allait ensemble. Pour ceux (nombreux) qui sont musulmans quand ils commencent à fréquenter la voie aussi. Alors pour répondre au jeune homme... c'est difficile (de fait il ne semble pas y avoir d'équivalent aux voies spirituelles dans la chrétienté aujourd'hui).

La tariqa est strictement sunnite malékite, et les foqara sont censés appliquer les 5 piliers de l'islam (je dis sont censés parce que pour les non musulmans on s'y met progressivement). C'est difficile à faire comprendre, mais je crois que ça n'aurait pas de sens sans ça. Le soufisme (du moins dans cette voie-ci) ne se conçoit qu'ainsi. Attention : il y a des niveaux de pratique très variés dans la voie, et personne ne juge personne. Pour prendre mon cas personnel je ne fais pas les 5 prières canoniques. J'y viendrai sans doute mais pour le moment je suppose que pour certains je ne suis pas musulman. Mais ça m'éloigne de la question.

Je ne suis pas sûr d'être qualifié pour répondre à cette question d'ailleurs. Disons que le chemin implique d'après tous ceux qui y ont passé quelques années de la persévérance. Ce n'est pas au bout de quelques mois que je peux faire le malin.

Tout ce que je sais c'est que je me sens en paix quand je fais mes ablutions et la prière. Le dhikr ça va ça vient, il y a des jours (très souvent) où j'ai du mal à me concentrer. Et je suppose qu'un jour ou l'autre je vais avoir des réticences, me dire "je le ferai demain"... on verra. Je crois que l'islam donne un cadre. Et je ne pense pas que ce soit l'exotisme qui me plaise. Il y a autre chose.

C'est marrant il y a un frère algérien qui vient d'arriver dans la tariqa qui me dit souvent "je comprends pas que tu sois venu là"... il veut dire que pour un non-musulman s'imposer les contraintes de l'islam il trouve ça étonnant. Je ne sais pas trop quoi lui répondre. Il ne me juge pas en disant ça, disons qu'il est euh épaté. J'ai pourtant pas de quoi être fier je crois.

verre d'eau et boue

Une image qu'on m'a donnée il y a peu sur le travail spirituel. Je dois reconnaître que pour le moment c'est assez virtuel pour moi : il me faudra certainement du temps pour comprendre ça. Mais c'est une chouette image alors...

Notre âme est comme un verre d'eau, où il y aurait de la boue au fond. L'eau est claire cependant (en gros, ça veut dire qu'on se voit comme quelqu'un qui n'a pas de problèmes). Le travail spirituel c'est comme remuer le contenu du verre. Ca fait drôle parce que du coup l'eau se trouble et on n'y voit plus rien, mais c'est le seul moyen de faire remonter la boue à la surface et de s'en débarasser.

Hum j'imagine qu'on pourrait faire une analogie avec d'autres formes d'introspection, ou même avec un travail psy. Mais j'aime bien cette image. Attention c'est pas pour faire peur. Mais je crois bien que c'est difficile d'apprendre à se connaître sans voir aussi les côtés sombres qu'on a. Et l'avantage de la voie, c'est qu'il y a cet amour qu'on reçoit et qui aide à supporter les difficultés.

Mais peut être que je mélange tout en disant ça. Faudrait que je donne des exemples concrets à l'occasion.

lettre

Vendredi je suis tombé en arrêt en lisant une lettre du sheikh Ad Darqawi. Je ne sais pas trop dire pourquoi. Je la reproduis ici :

"Je déambulais ce jour-là à Fès dans le souk al-Rasîf, énormément ivre et lucide à la fois, conjoignant puissamment les deux états, lorsque mon âme me dit soudain "Tu es le Pôle", sans qu'aucun de ses querelleurs internes y trouve à redire. Or, voilà qu'un homme vint vers moi d'un pas rapide et, lorsque nous nous trouvâmes face à face, me dit de façon tout à fait claire : "le Pôle". Puis il s'en alla et je fis de même sans me retourner, car mon Seigneur me suffisait. Cela dit, son image est restée gravée dans ma mémoire, et je le vois encore comme s'il se trouvait devant moi en ce moment-même : il était de taille moyenne, avait bel aspect et des cheveux noirs ; c'était une vue magnifique. Il ne m'a pas dit "Tu es le Pôle", mais seulement : "le Pôle".

Salut !"

Je pense que ça m'a marqué parce que la veille on avait parlé de ce concept de Pôle. En gros (sur ce que j'en comprends) chaque époque a son Pôle, c'est à dire un maître qui est susceptible de nous guider vers Dieu. L'homme que voit le sheikh dans cet épisode... au début j'ai cru que c'était le Prophète lui-même, puis j'en ai discuté avec un frère. C'est probablement le Khidr (littéralement le Verdoyant), un messager qui est apparu à de nombreux saints. C'est lui qui rencontre Moïse dans la sourate 18 (je crois), dans un épisode étonnant.

Moïse veut le suivre, Khidr le prévient qu'il ne peut le suivre qu'à condition de ne pas poser de questions, et qu'il ne comprendra pas ce qui arrivera. S'en suivent des épisodes où la perplexité de Moïse va grandissant.

Je ne suis pas bien sûr du sens de cette parabole, sinon que même Moïse, pourtant un grand prophète, peut être dépassé en science, en connaissance. Ce personnage de Khidr est d'après mes maigres connaissances très important dans le soufisme.

Quand au concept de Pôle... hum il faudra encore une fois que j'y revienne. Dans la lettre il y a aussi naturellement la description de ces états simultanés d'ivresse et de lucidité... dans la série "le soufisme pour les nuls" c'est un état assez élevé je crois. Ce qui m'étonne toujours dans ces lettres d'Ad Darqawi c'est la simplicité avec laquelle il parle de tout ça.

Je vais passer pour un dingue, mais par exemple la fin de la lettre (il n'a pas dit "tu es le Pôle" mais simplement "le Pôle") me laisse une impression vraiment forte. Mais bon je suis incapable de dire pourquoi.

11.3.05

pouvoirs publics

Ca c'est un sujet avec lequel je suis pas trop à l'aise mais bon. J'ai déjà parlé je crois de cette conférence extraordinaire où le conférencier a laissé percer son agacement contre un ministre qui a dit à la télé "j'ai lu le Coran, je sais ce qu'il y a dedans". C'est clair qu'en ce moment l'islam est un sujet sensible. C'est marrant d'ailleurs parce que ce qui fait débat en Angleterre ou aux Etats Unis par exemple n'a rien à voir avec ce qui se passe en France. Mais bref...

Je ne suis pas à l'aise avec l'idée souvent agitée d'un soufisme qui serait "l'antidote" à l'intégrisme. Je crois que le soufisme est souvent mal compris, ou plutôt que c'est une étiquette sous laquelle on mélange pas mal de choses. D'ailleurs je ne peux pas parler au nom du soufisme, tout juste de mon expérience et de la voie à laquelle j'appartiens. Quand à l'intégrisme ça désigne tellement de choses différentes... certains soufis se considèrent comme les vrais fondamentalistes par exemple. Les mots sont importants, et je crois que ça fait partie de ce qui me met mal à l'aise.

Par ailleurs la plupart des voies se tiennent plutôt à l'écart du débat public. Au CFCM il y a très peu de représentants des voies spirituelles. Je crois que c'est parce qu'on ne cherche pas le pouvoir (je ne dis pas que les groupes qui sont très actifs sur la scène publique le cherchent mais bon... chacun son truc disons).

Je vois bien que les pouvoirs publics cherchent la clé en quelque sorte. Alors il doit y en avoir pour se dire "ah voyons voir ces soufis ont l'air plutôt aimables, et si on les rencontrait". Je crois que le gouvernement a rencontré plusieurs fois des représentants de diverses voies. Mais je me demande bien ce qu'il peut en résulter. C'est sûr que tout ce qui peut faire que les français aient une moins mauvaise vision de l'islam est à encourager. Mais je ne prétends pas être dans le "vrai islam", après tout Dieu guide les gens comme il le veut. Même si j'ai du mal à comprendre les censeurs, je ne peux pas faire grand chose pour les changer. Et puis qui suis-je pour juger.

En parlant de mauvaise image, il y a cet excellent André Santini qui avait dit il y a quelques temps "l'islam est une religion de paix, il faut juste éviter les extrêmes tels que les salafistes et les soufistes (sic)." Je ne suis pas sûr de ma citation mais c'était l'idée en gros. Sur les salafistes j'y reviendrai un jour, mais pour rester sur Santini quelqu'un de la voie lui a écrit suite à cette déclaration pour lui dire qu'il devrait faire plus attention à ce qu'il dit (je ne suis pas au courant des détails). Apparemment lui ou son cabinet ont réagi de façon très agressive.

Et à la limite le problème n'est pas là : tant qu'on explique que "l'islam c'est bien MAIS...", c'est qu'il y a un problème. Hum je suis en terrain difficile là. Entre la peur de l'arabe, l'ignorance sur l'islam, la crise d'identité de la France (tous sujets qui mériteraient d'être traités à part), l'islam est devenu dans l'esprit des gens un problème. Ou un sujet de préoccupation. J'ai beau me dire que je devrais pas me préoccuper de tout ça, c'est plus fort que moi. Par ailleurs je ne suis pas sûr (même si certains musulmans pensent le contraire) que l'identité de quelqu'un se résume à sa religion.

D'ailleurs c'est marrant mais sur la politique, la place de l'islam en France et ce genre de sujets, j'ai l'impression que les opinions sont très variées dans la tariqa. Ca c'est chouette. C'est une richesse.

wadhifa (réunion) d'hier soir

Réunion à 5 hier soir. C'est un peu bizarre : d'une part j'ai eu par moments des pensées parasites qui m'ont empêché de me concentrer (toujours plus ou moins les mêmes trucs qui tournent dans ma tête), alors que d'habitude la concentration vient très facilement en groupe.

Et d'autre part c'était... bien. Il y a des moments où je me sens profondément ému. Plus je connais la voie et moins je l'idéalise : il y a des problèmes comme dans toutes les communautés. Mais les réunions, c'est vraiment quelque chose. Je ne sais pas trop comment l'expliquer. Il doit y avoir une énergie spirituelle qui circule. C'est à la fois intime et partagé.

Hum pas facile de parler de tout ça. Dans toutes les voies soufies il y a des réunions. Je suppose qu'on peut classer ça dans les actes de prière ou de récitation coranique si on se place d'un point de vue musulman plus large. D'ailleurs on conclut généralement par la prière du soir. Prier en groupe c'est mieux que seul, ça c'est une évidence (encore que... hum c'est loin d'être évident en fait... il y a des moments où on prie seul et où c'est très bien, et il y a des gens qui préfèrent prier seuls plutôt qu'en groupe).

La vertu des réunions je ne suis peut être pas le mieux placé pour en parler mais ça marche. Je veux dire qu'on se sent bien et qu'on sent qu'on est comme... élevé. Hum je vais encore passer pour un malade. Pas grave.

Il y a (en principe) un petit cours en fin de réunion. Hier c'était sur la prière sur le prophète. Vaste sujet ! Je ne suis pas sûr d'avoir tout compris. Mais bon c'est toujours pareil : je pense qu'une partie importante de ce que j'apprends ne passe pas par le cerveau. Bon sur le prophète il y a tellement à dire... en plus dans le soufisme il y a des concepts un peu pointus ou même métaphysiques qui me dépassent un peu.

Des prières sur le prophète on en fait sans arrêt : à la fin de chaque prière canonique, et dans le dhikr. Hum encore un sujet où je ne sais pas trop par quel bout commencer. C'est qu'on touche à des idées vraiment énormes. En même temps c'est concrètement assez simple. On essaie de s'imprégner des vertus prophétiques. Hum j'ai pas les idées claires sur tout ça j'y reviendrai par petits morceaux.

façon de lire, Coran et langue Arabe

J'ai discuté avec un frère hier, on a parlé de la lecture du Coran. Je lui ai dit que j'avais fini ma première lecture. Il m'a dit qu'en un an il n'en est pas encore venu à bout. Mais je crois que sa façon de lire est intéressante, peut-être plus que la mienne. Moi j'ai tout lu mais je n'ai pas vraiment pris le temps de m'arrêter.

Lui lit en picorant. Il s'arrête sur un verset. Il ne lit pas dans l'ordre. C'est marrant il était épaté que j'aie déjà lu tout une fois et moi j'étais épaté par sa façon de lire. Comme quoi...

Ca m'a fait penser à une conversation que j'ai eue récemment avec mon frère. Il s'intéresse à la météo, et il a un livre qui semble très complet là dessus. Il me disait qu'il n'a jamais réussi à "entrer" dedans, jusqu'au moment ou un pote est passé chez lui. Ce pote a pris le bouquin, et s'est mis à lire un peu au hasard, sans suivre l'ordre des chapitres. En quelque sorte ça a décoincé mon frère, ça lui a donné une clé d'accès au livre.

Alors bon c'est peut être bizarre de comparer la lecture d'un livre de référence sur la météo avec la lecture du Coran, mais c'est à ça que j'ai pensé quand on parlait de lecture hier. Bon pour le Coran après il y a le fait de le lire en Arabe ou pas, mais c'est un autre problème. J'ai déjà vécu la difficulté d'expliquer pourquoi la récitation en Arabe est "riche".

Je suis naturellement incapable de lire l'Arabe. Mais si je faisais l'effort d'apprendre l'alphabet, je pourrais lire les sourates en Arabe. Je ne comprendrais pas ce que je lis, mais je ne comprends pas non plus quand on récite "Yasin" (la sourate n° 36) pendant les réunions, et pourtant c'est... puissant disons. Je crois que c'est Sidi Jamal (un des fils du sheikh) qui a dit en réponse à une question sur ce sujet : "votre esprit ne comprend pas, mais le coeur, lui, comprend". Hum je me doute que c'est difficile à admettre mais bon...

Sur l'Arabe il faudra bien sûr que j'y revienne... bon d'une part c'est beau. Tout bêtement. Je suppose que dans une mosquée ça doit être encore plus fort mais quand on fait la prière en groupe et que c'est un certain frère qui mène la prière, c'est d'une beauté... ça vient de sa voix, qui est "dorée", mais aussi de la langue.

D'autre part l'Arabe c'est la langue de la révélation. Hum le concept de langue sacrée c'est un peu difficile à faire passer mais bref... je voyais récemment un chiffre ; il me semble que moins de 30 % des musulmans dans le monde sont dans des pays arabophones. Et pourtant le fait de réciter le Coran en Arabe a comment dire... un pouvoir. Ce n'est pas une obligation imposée par une autorité comme a pu l'être la messe en latin pendant des siècles.

En plus c'est une langue (celle du Coran du moins) difficile à traduire apparemment. C'est marrant, mais même le mot islam semble difficile à traduire. De ce que j'en comprends un sens possible est soumission, mais apparemment ça ne rend pas compte du sens complet. Hum je suis sur un terrain que je connais mal. Enfin mal... moins mal qu'il y a un an, et certainement moins bien que dans un an.

10.3.05

printemps et consultation

Aujourd'hui j'ai entendu partout des chants d'oiseaux dans Paris. C'est certainement le printemps qui arrive. C'est marrant comme ça vient d'un coup.

Non je n'y vois pas de signes. Pas cette fois. J'ai refait une prière de consultation hier soir avant de me coucher, mais je ne sais toujours pas si je pose la question comme elle doit être posée. Quand à la réponse... même le fait de ne pas en avoir peut être une réponse (ça y est on va encore me prendre pour un illuminé).

C'est très beau le texte de cette prière. Ca dit à un moment "si ça doit être un bien pour moi, pour ma religion et pour ma vie future alors facilite moi [cette chose]". Je ne sais pas pourquoi mais ça m'émeut. Je n'ai plus le texte complet en tête.

Quelqu'un de la voie m'a dit que Dieu nous pousse parfois à la limite de ce qu'on peut supporter. Mais pile à la limite : de la sorte on avance. Mouais. Je ne conteste pas. Je me dis juste que j'aimerais avoir la tête moins dure. J'avancerais peut-être avec moins d'à-coups. Bon et puis je vois pas pourquoi je me plaindrais : je suis en bonne santé, j'ai de quoi manger et plein de gens qui m'aiment.

Et en plus (même si j'en doute souvent) j'ai la chance d'être sur ce chemin... je sais pas trop comment en parler comme souvent. On verra.

C'est comme cette histoire des désirs : la voie consiste (entre autres) à apprendre à notre ego à dominer ses désirs (désir de domination, de puissance, etc...). Mais pour autant ça ne veut pas dire qu'on ne doit éprouver aucun désir. Hum encore un sujet qui me laisse bien perplexe. Quid des femmes ? Vaste sujet sur lequel, fidèle aux habitudes de la maison, je reviendrai certainement.

marrant

Justement le jour où je sais pas trop quoi dire ici, le serveur a l'air carrément en carafe. Comme quoi y a des coïncidences bizarres...

Je plaisante hein. Je suis justement en train de m'auto-former à "ne plus tenter de voir des signes partout". Quoique. Mon pote "spirituel" (bon il s'appelle Stef c'est plus simple de l'appeler comme ça) voit des signes partout. Il a écrit un truc très beau là dessus : "le monde qui nous entoure n'est fait que de signes, il suffit de les voir pour s'émerveiller de la perfection avec laquelle tous les évènements s'enchaînent".

Quand je vous dis qu'il va finir soufi...

réunion ce soir, foi

Réunion ce soir en petit comité. On devrait être 4 ou 5. C'est bizarre je suis à la fois impatient et un peu grognon. C'est mon humeur du moment je suppose. Et puis je crois qu'après l'enthousiasme du tout début, je commence à être plus dans un rythme de croisière.

J'ai du mal à me faire à l'idée que les choses n'arrivent pas vite. Que la foi n'est pas un sprint mais une course de fond. Quel sujet d'étonnement la foi... plus ça va et moins je sais ce que ça veut dire. A la limite je crois que j'en avais une idée plus précise et plus simple "avant". Mais bon... l'idée que j'en avais était pas forcément juste.

Je ne dis pas qu'il faut vivre ça de l'intérieur pour en parler, je n'aurais pas cette prétention. Et ça m'a suffisamment énervé dans le passé ce genre de phrase pour que j'essaie de ne pas être comme ça. Ca me fait penser à un ami très cher mais qui a vécu des trucs pas drôles dans sa famille. Quand on se dispute, il y a toujours un moment où il dit "de toute façon tu ne peux pas comprendre ce que j'ai vécu"... que répondre ?

Ca m'énervait aussi beaucoup quand l'élue de mon coeur me disait qu'il y avait des choses sur la foi que je ne pouvais pas comprendre. Je me disais "c'est elle qui ne fait pas l'effort de m'expliquer".

Hum une chose en amenant une autre je repense à cette idée de preuve. La foi n'a pas besoin de preuves je crois. C'est quelque chose que je pensais "avant", et je n'ai pas changé d'avis. En même temps c'est vrai qu'il y a des choses difficiles à expliquer.

Quand j'ai pris la shahada, j'ai dit au frère qui me l'a donnée que je n'étais pas sûr de ma foi à 100 %. Il m'a répondu "c'est quelque chose qui descend sur votre coeur ; si ce n'est pas ça vous le saurez très vite." D'ailleurs je pense que beaucoup de croyants gardent un tout petit doute dans un coin. Ce que le responsable du groupe de Paris a appelé "le minimum syndical" la première fois que j'avais parlé de foi et d'engagement avec lui.

Alors je ne sais pas trop. Par moments je ressens un sentiment d'injustice : ma vie n'est pas ce que je voudrais, etc... en même temps je tiens à garder ça. Le peu de grâce (je ne sais pas comment l'appeler autrement) que j'ai reçue, je crois que je veux garder ça en moi. Insha Allah comme on dit.

9.3.05

je m'énerve tout seul

Un truc qui n'a rien à voir avec la voie mais qui reste une énigme pour moi : j'adore m'énerver tout seul. Enfin j'adore c'est vite dit. Il y a des gens qui m'énervent (je sais c'est mal mais c'est comme ça). Au lieu de les éviter, je les cherche. Et me voilà à grogner contre mon journal. Ou a pester contre l'auteur d'un blog dont je trouve les idées péteuses et le style pompeux.

Dans ces cas là je sais très bien qu'au lieu de revenir sur le blog en question je devrais faire autre chose, lire des trucs qui me plaisent, agir, être positif etc... d'où vient ce besoin de m'énerver ? Je suppose qu'il y a une explication psychologique. C'est presque du masochisme.

J'ai beaucoup aimé, et j'aime toujours, la polémique pour la polémique. Enerver mon interlocuteur. Etre de mauvaise foi. D'ailleurs un truc qui m'a fait bouger il y a pas mal de temps c'est mon père qui m'a dit "où est passé le gamin un peu énervant, insolent, blagueur ?". Bon je ne sais pas où il est passé moi non plus, mais sur le moment ça m'avait fait réfléchir à ma vie, et depuis je dois dire que j'ai changé pas mal de choses.

Le côté polémique, ça n'est jamais éloigné d'un côté cynique : j'aime l'humour noir, j'ai tendance à avoir ce qu'on appelle mauvais esprit. Mais bon en l'occurence m'énerver tout seul contre quelqu'un que je ne connais même pas (un présentateur de télé, un journaliste, ...) ça n'est ni drôle ni agréable.

Un exemple de mauvais esprit : je me suis dit plus d'une fois "qu'est-ce que ça doit être chiant la sainteté". Et pourtant j'ai cette aspiration à la pureté, je chemine. Mais je mélange tout : cette compulsion à revenir sur des gens qui m'énervent c'est une chose. Le côté malicieux c'en est une autre. D'ailleurs quand je suis à la zaouia il y a des moments où je plaisante sans arrière pensées, sans être méchant je crois mais avec ce côté plaisantin que j'ai toujours eu. Pas qu'à la zaouia d'ailleurs.

Bon c'est sûr aussi que si j'étais plus occupé je ne lirais plus ces gens qui m'énervent.

routine, repentir

Pas trop le moral aujourd'hui... c'est des choses qui arrivent. Je sais que dans les qualités de comportement qu'on est censé acquérir, il y a notamment le fait de ne pas montrer quand ça ne va pas, mais bon... on va dire que j'ai des progrès à faire.

Par ailleurs c'est un peu étrange. J'ai l'impression de faire mon dhikr sans effort en ce moment, et même par moments de me laisser un peu aller, de ne plus penser pendant que j'invoque. Mais en même temps j'ai peur que ça ne devienne une routine, quelque chose que je fais comme on se lave les dents.

Avant de m'endormir hier j'ai lu une page sur le repentir. Qu'on ne s'y trompe pas je ne suis pas du tout dans un état d'esprit genre "seigneur j'ai péché je me repens etc...", à la limite (j'en ai déjà parlé) le côté repentir et crainte révérentielle ne me touche pas trop. C'est marrant, je pensais avant que le fait de culpabiliser les gens est un des grands ressorts des religions.

Je ne sais pas si c'est la bonne façon de poser le problème. Pas besoin de religion pour avoir des problèmes de conscience. Et le repentir... je ne sais pas trop en parler. Vaste sujet. Est-ce qu'on se repent du mal qu'on a fait aux autres ? Des opportunités qu'on a laissé passer ? Ca me fait penser aux remords et aux regrets.

Dans le dhikr, il y a une partie où on se repent. Parfois en le disant je suis en "pilote automatique", parfois ça me serre le coeur. Tiens ça me fait penser qu'il fuadra que j'explique ici un de ces quatre pourquoi c'est important d'invoquer en Arabe. Un truc très difficile à faire comprendre.

Une pensée en amenant une autre, je repense à ma conversation d'hier soir. Mon ami m'a demandé ce qui "concrètement" a fait que je me suis senti en confiance avec les gens de la tariqa... je lui ai répondu que justement c'est tout sauf concret. C'est quelque chose qui se passe dans le coeur, donc c'est plus ou moins inexplicable.

enfance et paradis perdu

Je mélange certainement plein de choses mais ça arrive : une chose fait penser à une autre et ainsi de suite. J'ai discuté longuement hier avec mon ami qui est un peu méfiant vis à vis des religions. Je vais pas résumer tout ce qu'on s'est dit (nos discussions sont souvent animées, mais son avis compte pour moi c'est bien de discuter avec quelqu'un qui n'a pas les mêmes façons de penser sur la spiritualité).

A un moment j'ai été super étonné : je lui parlais de la confiance qu'il y a spontanément entre frères dans la tariqa, du fait que même avec quelqu'un qu'on ne connaît pas on peut très vite se mettre à parler de choses très personnelles. Il m'a posé la question suivante : "est-ce que tu as déjà éprouvé ça depuis ton enfance ?". Promis juré je ne l'ai pas orienté. Mais en gros je lui ai demandé de préciser ce qu'il voulait dire... je n'avais pas rêvé : il voulait bien dire que ce que je décrivais, cette confiance spontanée, c'est quelque chose qu'on a quand on est à la maternelle ou en tout cas enfant, et qu'on perd par la suite.

Hum huhum ! En plus il ne lit pas mon blog. Mais c'est dingue qu'il pense lui aussi d'une certaine manière que je retrouve quelque chose de l'enfance. J'étais très étonné...

Du coup ce matin en y repensant j'ai fait le lien avec le thème du paradis perdu. Bon ça n'a peut-être rien à voir, je mélange souvent les choses. Mais récemment quelqu'un me parlait du Sénégal, d'enfance, de paradis... perdu. Et par ailleurs c'est un thème qui m'intéresse depuis longtemps... à travers ce que je perçois de la culture américaine. J'ai essayé d'expliquer ça à mon père il n'y a pas longtemps, vainement.

Mon point c'était que le paradis perdu est un thème super important si on veut comprendre les américains. Je sais pas trop d'où je sors cette idée, certainement de pas mal de romans que j'ai lus. C'est un peu bateau et simplificateur, mais je crois que les américains ont profondément cette idée qu'ils ont trouvé un paradis, et que ce paradis a été en quelque sorte souillé. On parle souvent de l'innocence perdue, ou du fait que les américains sont des "grands enfants", il y a ce mélange supposé de candeur et de pragmatisme.

Bref je ne sais pas trop bien m'expliquer mais c'est quelque chose qui me touche profondément depuis des années. Est-ce parce que j'ai un souvenir de vacances aux Etats Unis quand j'étais tout petit ? Je ne sais pas trop. Un très beau livre qui m'a fait penser à ça c'est Pourfendeur de nuages de Russell Banks, une histoire hallucinante de fermiers blancs très pieux qui luttent contre l'esclavage avec des méthodes de guérillero vers 1850.

Je sais plus où je voulais en venir. Ah si : la voie c'est peut-être une façon de retrouver ce paradis perdu de l'enfance. Je dis bien peut-être.

8.3.05

le fait d'être guidé

Aha encore un sujet qui mériterait un exposé d'une heure... bon il y a cette citation qui dit que celui qui prétend cheminer dans la voie sans sheikh a shaytan pour maître. C'est un peu déroutant j'imagine cette idée mais bref. Shaytan c'est le diable, mais c'est aussi notre ego. Chercher à cheminer sans être guidé est risqué dans ce sens j'imagine : l'ego est tellement rusé qu'on peut très bien passer des années à chercher sans avancer, tout en étant parfaitement de bonne foi et résolu.

J'ai discuté samedi avec un frère qui vient d'arriver dans la tariqa. Une fois de plus son histoire est unique. Il a été élevé dans l'islam. Il m'a expliqué que ça fait des années qu'il cherche une voie spirituelle. Il a récupéré à droite et a gauche des wirds de différentes voies, s'est fait son propre mélange à sa sauce, et a énormément lu sur le soufisme, sur la spiritualité. Il m'a dit qu'à un moment il passait plus de deux heures par jour à invoquer.

La question de la guidance (indépendamment des critiques diverses et variées dont je ne parlerai pas ici aujourd'hui) est centrale dans le soufisme. D'ailleurs quand j'invoque, j'ai toujours à l'esprit cette idée que je ne sais pas encore comment m'orienter, alors que je sens que c'est important.

Pour revenir à ce frère, il m'a raconté sa première rencontre avec le responsable du groupe. J'étais mort de rire. Ce frère est "à fond". Il a été très dérouté : le responsable lui a dit d'abandonner toutes les invocations qu'il faisait et de se contenter d'un dhikr assez bref. Du coup il est très frustré, il voudrait "en faire plus"...

Je me suis senti un peu drôle : j'ai réalisé que j'étais en train de le rassurer, de lui dire "fais ce qu'on t'a conseillé, ne t'inquiètes pas du reste". Moi. Donner des conseils. A quelqu'un qui a la foi depuis des années, qui cherche, qui a une vraie soif intérieure. Faut croire qu'on est toujours le vétéran de quelqu'un d'autre. Peut-être que c'est là que j'ai pris conscience du fait que j'ai déjà parcouru un petit bout de chemin.

lecture

En ce moment je lis moins "spirituel" qu'il y a quelques temps. Question de distance j'imagine. J'ai même commencé un roman, le premier depuis des mois (un Grisham un peu paresseux mais pas mal).

Ah si quand même : j'ai fini ma première lecture du Coran (champomy !!). Du coup j'ai repris la sourate 2 (la génisse). C'est une des plus longues, elle est si souvent citée un peu partout que je voudrais prendre un peu de temps pour la lire bien. Rien ne presse.

Rien ne presse non plus sur le soufisme. Toujours rien lu d'Al Ghazali ni de Rûmi. J'ai discuté l'autre jour avec un frère qui a énormément lu. Pas sûr qu'il faille que je me précipite pour lire. Vu l'état de perplexité où me mettent certains trucs que je lis (et encore je dis perplexe pour être sympa), je me dis que j'ai de quoi faire.

En revanche j'ai quasiment toujours sur moi un livre (soit la Futuwah, soit des lettres d'Ad Darqawi), pour les trajets en métro par exemple. C'est marrant je discutais tout à l'heure avec mon pote "spirituel" et je lui ai dit comme souvent qu'il allait mal finir (= s'intéresser au soufisme). Bon c'est une vanne entre nous. Mais il m'a dit que peut être qu'il s'imprègne lui aussi. C'est pas de moi cette idée d'imprégnation mais j'en ai déjà parlé : c'est exactement ce qui m'arrive avec beaucoup de livres. Je suis incapable d'en parler, bien souvent je ne sais plus trop ce qu'il y a dedans, mais je sens que je m'imprègne.

Parlé en vitesse avec mon frère aussi. Il n'a fait aucun commentaire sur le blog. Je suppose qu'il m'en parlera le moment venu.

autorisation

Un des trucs qui ont le plus choqué mon frère quand je lui ai parlé de mon engagement, c'est le fait que j'aie à ses yeux besoin d'une autorisation. C'est comme ça qu'il voit le fait que j'ai besoin d'en parler aux parents un jour ou l'autre. Et ça s'est manifesté aussi sur un truc très concret : Je lui ai dit qu'avant de faire ce blog j'en avais parlé au responsable du groupe de Paris. Il était outré.

Je ne sais pas si c'est parce qu'il a peur pour moi, ou si c'est parce qu'il pense que si j'étais sûr de moi je ne devrais pas avoir à demander son avis à qui que ce soit. Il a peut être raison en partie. En l'occurence, si j'ai posé la question pour le blog c'est parce que je crois qu'il y a des choses qui peuvent être mal comprises sur la tariqa. C'est vrai qu'en théorie je devrais m'en moquer complètement, mais je pense que je ne voulais pas risquer de nuire à la voie.

Je vais prendre un exemple : le wird, c'est à dire les invocations qui nous sont confiées pour le dhikr, n'est pas public. Pas que ça soit des formules cabalistiques, mais simplement ça reste dans la voie.

Pour le reste je pense que tout ce qu'on fait est transparent. D'ailleurs parler de la voie peut contribuer à lutter contre certaines idées fausses qui circulent sur le soufisme (rhaa faudra que je le fasse un de ces quatre ce post sur les reproches faits au soufisme). Le fait d'avoir un guide c'est une chance. Bon les hâls je comprends que ça peut faire drôle pour les gens mais tant pis. Ce n'est pas propre à la tariqa.

Je crois que ce qui fait peur à mon frère c'est l'idée que "j'obéisse" à des ordres, à une hiérarchie. Comme dans une secte. Ca me fait sourire. Bon en même temps je suis sûr que les gens qui sont dans des sectes pensent de bonne foi qu'ils sont bien guidés etc... mais ça, la différence entre une secte et la tariqa ça mériterait un post en soi. Ma liste de sujets à traiter commence à gonfler dangereusement.

l'amour, les choses bien faites

Houla dans quoi je m'embarque moi... un billet sur l'amour. Hum. Je réfléchissais à un truc récemment en fait. A plusieurs trucs. Je me rends compte que je ne sais pas trop par quoi commencer.

Il y a longtemps, j'ai été très amoureux d'une jeune femme. Après coup je me suis demandé (et je me demande toujours) si ce que j'ai éprouvé était vraiment de l'amour. Je m'explique. Une fois que cette histoire s'est terminée (de façon pas trop agréable pour moi), je me rends compte que je n'ai pas vraiment souhaité du bien à cette jeune femme.

Alors on n'est pas des saints. Je suppose que c'est quelque chose que beaucoup de gens ont éprouvé. Mais l'amour est-ce que ça ne devrait pas être laisser partir celle qu'on aime si c'est ce qui doit arriver, et souhaiter qu'elle soit heureuse ? Là en l'occurence je me disais plus ou moins consciemment "puisqu'elle ne sera pas avec moi autant qu'elle retourne à sa merde et qu'elle soit malheureuse". Enfin ce n'est pas exactement ce que je me disais, mais d'une part je n'imaginais pas qu'elle puisse être heureuse sans moi, et d'autre part je ne souhaitais pas vraiment qu'elle le soit.

Hum. On dit que l'amour c'est donner sans attendre en retour. Là c'est clair que j'y suis pas. Mais bon encore une fois pas d'angélisme : tout le monde a du vivre ça. Je voyais hier soir un film où le héros finit par retrouver celle qu'il aime quand il accepte enfin de renoncer à elle et à ne souhaiter que son bonheur, à souhaiter qu'elle rencontre enfin quelqu'un qui la rende heureuse. Bon c'est du cinéma hollywoodien, et c'est certainement bateau, et en plus ça se finit bien. Inutile de dire que dans la vraie vie c'est pas toujours comme ça.

Bon avec tout ça je sais plus où je veux en venir... ça m'apprendra à poster sur des sujets aussi compliqués. Quelqu'un m'a dit il y a quelques semaines que quand on renonce à certaines choses (pour moi ça a un sens très concret : renoncer à l'élue de mon coeur entre autres), on reçoit quelque chose en échange. Ou plutôt c'est par le renoncement qu'on s'approche de Dieu. Hum mes lecteurs non religieux vont hurler.

J'ai toujours du mal à faire la part des choses entre se résigner, accepter ce qui nous arrive et se battre, rêver quoi qu'il en coûte. Vaste sujet. C'est délicat de se dire qu'on doit tout mettre en oeuvre, du moins tout ce qui est en notre pouvoir, et accepter l'idée que le résultat ne tient pas à nous une fois qu'on a fait ce qu'on peut.

Une idée en amenant une autre je repense à une discussion avec mon frère sur le sujet du boulot. Il m'a dit en gros "on est pas plus bêtes que les autres, il n'y a pas de raison de ne pas prendre notre place, de ne pas avoir de l'influence sur les autres, du plaisir dans le travail etc...". J'ai rattaché ça au fait de bien faire les choses. Pour tout un tas de raisons j'ai toujours alterné le goût des choses bien faites et une conduite quasi suicidaire consistant à foirer ce qu'on me confie.

Bon ça c'est encore un vaste sujet. Mais faire bien ce qu'on nous confie, même des petites choses, c'est certainement quelque chose qui me ferait avancer. Après qu'on le fasse pour Dieu, pour ses parents, pour la reconnaissance, pour toute autre raison, c'est un autre problème. Je repense à ce hadith que j'ai lu et qui dit en gros "prie à chaque fois comme si c'était la dernière fois". Hum je m'égare ça c'est encore autre chose. Quoi qu'il en soit je connais des gens qui font au mieux ce qu'ils ont à faire. A moi d'essayer d'en faire autant.

7.3.05

entretien

Deuxième entretien cet après midi pour le job qui pourrait bien m'aller... ça s'est bien passé. Rien n'est fait, mais j'ai eu plutôt un bon feeling. Ca serait drôle que ça marche, justement maintenant, et justement ce job... bref.

Rien ne dit que ça va le faire. Ca m'est déjà arrivé plus d'une fois d'être en "finale" comme on dit sur un poste, et de me faire battre. Mais bon là, au risque d'être déçu, je suis optimiste. Pas que je me dise que si c'est le job qui me va (que Dieu a fait pour moi), alors ça se fera. Mais tout simplement j'ai eu des bonnes vibrations. Y a intérêt parce que à part ça j'ai pas des dizaines de pistes.

C'était très détendu. Un moment marrant quand même : ils m'ont demandé quand j'étais disponible pour commencer, ce à quoi j'ai répondu que j'étais libre, à part un déplacement prévu dans la semaine du 18 avril (suivez mon regard). Léger blanc. Ils m'ont dit qu'ils prévoyaient un début vers le 15 avril.

Mais bon ça c'est des détails. Si ça doit se faire et que ça m'empêche d'aller à Madagh, tant pis. Si ça se fait et que je peux y aller, tant mieux. Et si ça se fait pas... mbref.

Hum faut pas que je m'enflamme ça m'a coûté assez cher dans le passé, mais plus j'y pense et plus je trouve que ça s'est bien passé. Incorrigible.

rêves

Discussion avec mon pote "spirituel"... par moments c'est pas croyable les trucs qu'il me sort. Sur son blog je lis un petit truc sur les signes... c'est mot pour mot ce que m'a dit quelqu'un de la voie il y a quelques semaines. Quand je lui ai dit ça il m'a répondu "arrête ça me file des frissons".

Là il m'a parlé des rêves. Il voit ça comme une deuxième chance, une façon de vivre les choses qu'on a pas pu vivre dans la vie réelle. Je ne sais pas pourquoi mais ça me touche beaucoup. De la même manière il parle de sa fille qui doit avoir 5 ou 6 ans, qui est dans son monde quand elle joue. Je le cite : "qu'est-ce qui est vrai ? ce monde qu'on construit en tant qu'enfant ou bien ce monde dont tout le monde se met d'accord sur les règles ?".

Sur les rêves et leur sens on pourrait parler pendant des heures. C'est marrant il m'a dit "il y a des rêves prémonitoires, on comprend leur sens parfois longtemps après". Quand je vous dis qu'il est soufi sans le savoir ! Enfin les soufis n'ont pas le monopole de ce genre d'idées, loin de là.

Mais avoir un ami avec qui je peux parler de spiritualité comme ça c'est vraiment génial. On peut parler de signes, voire même de Dieu, sans gêne, sans que l'un des deux ait besoin de prendre des précautions oratoires. Qu'on ne se méprenne pas : avec ce pote on parle surtout du reste : la vie, l'amour, etc... Mais j'aime bien sa façon de voir les choses.

long dimanche

Passé toute la journée seul hier. Beaucoup de choses tournaient dans ma tête, comme souvent. Je ne suis pas si sûr que la solitude me soit profitable mais bon peut-être que je me rendrai compte plus tard de ce que ça m'apporte.

Je me suis posé beaucoup de questions (tiens donc) sur ma foi, sur ma sincérité. Il n'aura pas échappé au lecteur sagace que c'est un sujet qui revient souvent chez moi. Je finis presque toujours par me dire "si on te retirait tout ça maintenant, qu'est-ce que tu penserais ?". Et je me dis aussi "contente toi de faire ton dhikr, on verra dans quelques mois".

Hier ça a fini par m'apaiser de me dire que je suis là, avec quelque chose que je n'avais pas avant. Quel que soit le chemin qui m'a amené là, je suis content de faire mon dhikr, content de participer aux réunions, content de prier. Les questions, les doutes, je suis certain que quelqu'un de la voie me dirait "c'est ton ego qui se défend, il refuse de laisser les rênes".

En même temps, comme un rappel, au moment où je me croyais apaisé après toute une journée à me faire des noeuds au cerveau, coup de fil de mon père. Bon sans entrer dans les détails je suis en colère contre lui en ce moment. Et là paf ça n'a pas loupé j'ai eu une bouffée de colère il m'a gonflé et je me suis un peu énervé. Le pire c'est qu'il m'a rappelé après pour s'excuser. Il est tellement stressé que je ne lui dis même pas quand j'ai des entretiens pour ne pas qu'il se stresse plus encore. Bref ça m'a montré que ma paix intérieure était toute relative et très fragile.

Plein de boulot encore. M'orienter. Faire mon dhikr. Lâcher prise. Hum le lâcher prise c'est une très grosse difficulté. Je suis d'un têtu...

samedi soir, hikam et commentaires

Soirée à la zaouia. C'est toujours aussi chaleureux. Que ce soit avec des frères que je connais ou d'autres que je ne connais pas on parle très simplement de tout, de la vie, de boulot, etc... Je suis toujours épaté par la variété des situations et des façons de penser des gens.

En général dans la partie "formelle" il y a une phase ou on discute de tel ou tel point. Là j'ai posé la question sur ce fameux hikam qui m'occupe pas mal et qui dit que quand on est face à un choix difficile, il faut aller dans la direction qui s'oppose à ce que voudrait notre ego.

Vaste sujet. Je suppose que si je me pose la question c'est par rapport à mes histoires de coeur. Mais bon ça a une portée plus générale. C'est marrant j'ai eu des réponses assez différentes. Un frère m'a dit "prenons un exemple concret : quand on rentre tard le soir et qu'on a le choix entre se vautrer devant la télé ou alors de faire son dhikr, on serait plutôt poussé à se vautrer devant la télé...". Mais bon le hikam parle de choix difficile. Donc important à mon avis.

Il ne s'agit pas de se punir : si on a le choix entre deux appartements pour le même prix, il n'est pas question de prendre le plus pourri. Mais un autre frère m'a peut-être donné une clé. En me disant que parfois c'est difficile de pardonner.

Alors ça oui ça me parle. J'ai du mal à pardonner par exemple à un ex pote avec qui j'ai plus ou moins travaillé récemment. J'ai du mal à me pardonner aussi mais ça c'est un autre problème. Le plus simple pour ce pote c'est certainement de me dire "c'est un con tant pis pour lui". Lui pardonner c'est plus difficile. Hum j'en parle mais j'aurai du mal à appliquer mes bons conseils à moi-même.

D'ailleurs ce week end je réalisais que j'ai beaucoup de mal à écouter les gens. Je les écoute quand ils m'approuvent, je suis même très content de les écouter dans ces cas là. Comme tout le monde j'écoute surtout ce qui m'arrange. Mais je me suis demandé qui j'écoutais vraiment, dans le sens de "quels sont ceux dont j'écoute les avis quand ils ne vont pas dans mon sens". Et là ça fait pas lerche. Quand on me fait des reproches, ou qu'on me dit que sur tel ou tel point je déconne, je n'écoute pas. Enfin pas beaucoup.

Dernier truc sur samedi : je suis super détendu là bas. Autant je suis grave ces temps ci avec plein de gens, autant dans la tariqa je plaisante, je me marre etc... Rien que pour ça c'est vraiment chouette.

ruses de Dieu

Encore un sujet que je connais mal mais c'est marrant je suis tombé là dessus deux fois en très peu de temps dans mes lectures, je sais pas trop quoi en tirer, mais voilà. Les lectures en question c'est le Coran (traduction et commentaires de A. Penot) et un livre de lettres d'Ad Darqawi. Dans le commentaire de Penot, il explique (je cite approximativement) que quelque chose qui peut dérouter les chrétiens (pour qui en gros Dieu est amour), c'est cette idée de "ruses de Dieu".

Les ruses de Dieu, ou le fait que Dieu est plus rusé etc ça revient à de nombreuses reprises dans le Coran. Je n'y avais jamais vraiment prêté attention. A. Penot explique qu'en fait ça manifeste le fait qu'en islam on est maintenu à égale distance de la crainte et de l'espérance. Hum c'est bien abstrait j'en ai peur. Crainte d'être "joué", d'être trompé. Espérance de la miséricorde divine. J'en parle ici pour les raisons que j'ai dites, mais je ne suis pas sûr de savoir quoi en faire.

En quelque sorte Dieu peut nous égarer, nous induire en erreur. Il y a un verset qui dit plus ou moins "préserve moi de Tes ruses". Ca paraît bizarre de demander à Dieu de nous protéger de Lui, mais je dois pas tout capter.

Hum ça part fort pour un lundi. Manquerait plus que je parle de prédestination et de libre arbitre pour aller acheter du Doliprane. Pour revenir aux ruses divines, je crois (air connu) qu'il faudra que j'y revienne. Je suppose qu'il doit y avoir une lecture liée à la nafs de tout ça mais j'ai pas les idées trop claires là dessus.

La crainte... je me rends compte que dans l'islam on dit tout le temps qu'il faut craindre Dieu, de plein de façons différentes. J'ai déjà dit ici que je n'éprouve pas vraiment ça. Ca fait partie de mes doutes : si je ne crains rien, est-ce que ça ne montre pas que je ne crois pas ? Mais bon ça c'est encore un autre sujet.

4.3.05

déjeuner et blog

Mangé avec mon pote "spirituel", j'adore avoir son regard, ses avis. Par moments c'est incroyable : là on parlait des histoires de mon frère qui s'est fâché avec son meilleur ami, et il m'a dit "c'est très noué dans ces cas là le mieux c'est de trancher et de renouer différemment". C'est presque mot pour mot ce que m'a dit (sur un autre sujet) le frère avec qui j'ai discuté hier.

Il m'a parlé de ce blog en me disant "c'est cool à suivre au jour le jour on se demande alors quand est-ce qu'il se décide à en parler à ses parents"... je prends moi aussi plaisir à écrire tous les jours. Pas que ça me prenne des heures : j'écris en général sans y réfléchir avant.

Pour mes parents... je crois que je vais en parler à ma mère bientôt. Je ne sais pas trop. Mon père je crois que j'attendrai. Je lui ai dit que je me posais des questions sur Dieu, sur la foi. Il n'a pas fait de commentaires. Bon en même temps je pense que ça doit être assez voyant je crois bien que j'envoie consciemment ou pas des tas de signaux.

Je repense à la question de mon frère qui m'a demandé si j'avais besoin de l'approbation des parents. Vaste sujet. Il m'est revenu un rêve que j'ai fait il y a plus d'un an et où en quelque sorte je demandais leur approbation sur l'élue de mon coeur. Peut être que le sens était indépendant d'elle, que je demandais leur approbation sur mon chemin à moi. Allez savoir. Quand je pense que c'était à une époque ou non seulement je ne pensais pas me convertir mais où j'étais archi contre l'idée même d'y penser...

la place de la voie

Aha en voilà un sujet qu'il est copieux. J'ai discuté avec un frère hier. Il m'a remis certaines idées en place. Je lui expliquais qu'en ce moment pour un certain nombre de raisons je suis content d'avoir les frères, les réunions, cette chaleur qui me fait du bien.

C'est marrant c'est sans doute un des plus "gentils" que je connaisse, mais il m'a un peu secoué là dessus. Il m'a dit de faire attention : si je plonge dans la voie "pour la voie" en quelque sorte, je fais fausse route. D'abord parce que j'ai des choses à faire par ailleurs. Et puis parce que selon lui la voie n'est qu'un outil en quelque sorte. Pas un but en soi. C'est étrange d'ailleurs : je ne sais pas trop quel est mon but dans tout ça.

Bon en même temps pas la peine de me faire des noeuds au cerveau : les choses se mettront en place d'elles mêmes, je suis persuadé que ça se mettra à la bonne distance. Je crois qu'une partie de mon malaise d'hier soir vient de là : en étant dans une soirée d'une autre voie, "étrangère", j'ai sans doute réalisé qu'en effet ce n'est qu'un groupe humain. Comme la notre. Hum et pourtant il y a bien quelque chose dans tout ça qui m'est devenu essentiel.

Pour revenir à ce que m'a dit ce frère : je dois profiter de la vie au lieu de me bloquer. Lâcher prise (tiens donc...). Je rends mal compte de ce qu'il m'a dit mais ça m'a fait du bien. Il m'a demandé si j'étais taureau... faut dire que j'ai la tête dure, je suis du genre à m'acharner.

Autre phrase que j'ai lue hier soir en m'endormant : le sheikh plante une graine en nous, ce sont les foqaras qui la font pousser. La fréquentation des frères nous montre des choses. Enfin je commence à m'en rendre compte disons.

Je sens que par moments ça va secouer. Je sens aussi que le voyage au Maroc va me faire du bien (ça y est j'ai donné les sous ! si tout va bien j'irai en avril).

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