31.1.05

patience, rêves, prière et mosquée

Je suis impatient de nature. Dans tous les domaines. On cite pourtant ce verset du Coran (c'est une des choses que j'ai le plus souvent entendues) : "Dieu est avec les patients". De ce côté là la route est encore longue. Mais ne dit-on pas aussi que la voie (et la religion) ne serviraient à rien si tous les hommes étaient accomplis spirituellement ?

A cet égard j'ai fait un rêve étrange cette nuit : j'étais un homme-hippopotame (on ne rit pas). En y réfléchissant cet animal symbolise un côté terre à terre, rassurant, un peu lent mais fermement accroché au sol. Peut être que j'aspire à plus de sérénité, à être solide et placide comme un hippopotame.

J'ai rêvé également d'un prénom : Elias. Si j'ai le bonheur de fonder une famille, faudra que j'y repense.

Demain j'ai un rendez-vous près de la mosquée de Paris. Je crois que je vais en profiter pour faire la prière de la mi-journée à la mosquée. Je n'ai jamais fait de prière dans une mosquée, ce sera une grande première. Certains frères m'ont mis en garde : avec mes yeux bleus et mes manières de débutant, il est possible que des gens "bien intentionnés" viennent me voir après pour m'expliquer le bon chemin pour l'islam. Mais (orgueil ou pas ?) je crois que je suis assez grand pour me défendre.

Du coup la journée de demain risque d'être riche. On verra ce que ça donnera... naturellement le rendez-vous en question est important pour moi. Patience, pourquoi devrais-je absolument tout avoir tout de suite ? Après tout il y a 3 semaines je n'avais pas encore fait ma shahada... Le temps passe à la fois si vite et si lentement.

déformation soufie ?

Toujours en pleine lecture de la vie du Prophète par Martin Lings. D'une part c'est très enrichissant de lire ça et le Coran en parallèle (je n'ai toujours pas fini ma première lecture du Coran, mais j'avance petit à petit). On comprend beaucoup mieux certains versets en comprenant qu'ils ont été révélés en réponse à des problèmes très concrets qu'affrontait le prophète.

D'autre part je me rends compte que plus j'avance plus je lis différemment. Je m'explique : il y a bien sûr dans la vie de Muhammad et des compagnons un exemple à prendre au premier degré, de même que le Coran a un sens littéral. D'ailleurs pour beaucoup de musulmans l'exemple du Prophète est insurpassable non seulement sur le plan spirituel mais aussi sur des plans très concrets (mariages, conduite des affaires de tous les jours, etc...).

Ce que m'apporte (peut-être) la voie, c'est le fait que quand je lis tout ça je pense immédiatement qu'il y a un sens ou des sens cachés à trouver... un exemple pour éclairer : la vie de Muhammad, de même que le Coran, sont remplis de violence : batailles contre les Qurayshites notamment. Les compagnons n'espèrent qu'une chose : avoir le privilège de mourir en martyres afin de gagner le paradis. L'époque était ainsi. De même on comprend mieux l'Hégire et le début de l'Islam une fois qu'on s'est fait une idée des liens de clans si complexes qui traversent les tribus arabes.

Là où j'ai sans doute une déformation soufie, c'est que sur les violences par exemple, je transpose en lutte intérieure ce qui semble n'être qu'un compte rendu de batailles farouches entre musulmans et infidèles. Je suis encore bien ignorant sur le sujet, mais un thème très courant dans le soufisme est le "jihad majeur" recommandé par le Prophète à ses compagnons après une campagne victorieuse.

Le jihad majeur, c'est celui qu'on conduit contre son ego. Je me rends compte que pour certains musulmans des concepts comme Shaytan (Satan) ou les anges sont ... très concrets. Pour moi je ne me représente pas Shaytan comme une entité qui "existe" (hum j'espère que je ne suis pas en train de blasphémer). Je me le représente comme le symbole des passions qui nous gouvernent.

A ce sujet une discussion avec mon aimée où on a eu du mal à se comprendre : je lui disais que (euh ça je ne l'ai pas inventé j'ai lu ça quelque part mais bon il faut toujours que j'étale ma science dirait-on), je lui disais donc que Shaytan est plus dangereux dans l'obéissance que dans la désobéissance.

Pour elle le sens c'est que quand on pratique et donc qu'on obéit, on court le risque sans s'en rendre compte de glisser sur une savonnette appelée innovation. Il faut savoir qu'en Islam l'innovation blâmable (i.e. non approuvée par le consensus des savants) est le pire péché imaginable. En quelque sorte Shaytan serait là aux aguêts prêt à nous faire faire une pratique qu'on croit bonne mais qui ne serait que chemin vers la perdition. Je ne sais pas très bien quoi répondre à ça : l'innovation est tellement souvent reprochée aux soufis par les censeurs...

Pour moi le sens est bien différent (j'ai eu du mal à lui expliquer...) : dans l'obéissance (l'observance des commandemants), l'ego risque plus de se gonfler d'orgueil, de se croire arrivé en quelque sorte, que dans la désobéissance, où il est aisé de voir qu'on fait fausse route. Hum je parle encore une fois de sujets où j'ai de bien maigres connaissances, mais ça illustre la différence entre de nos conceptions. Hébé, si on m'avait dit que j'aurais des débats théologiques un jour...

Et je ne parle pas de sujets plus épineux tels que l'Unicité divine. Peut-être aussi que je prends tout ça beaucoup trop avec le cerveau. C'est bien joli de faire l'intello, mais il faut que je revienne aux trois bases : la pratique, la pratique et la pratique.

marée basse

Week end difficile ; je me suis emballé sur l'élue de mon coeur, or rien n'indique que les choses vont s'arranger, ça semble même mal parti. Je devrais m'en remettre à Dieu mais j'ai du mal.

Je pense à ce que m'a dit un frère sur ce genre d'épreuve : d'une part je peux mettre en oeuvre extérieurement tout ce que je peux pour que les choses se passent selon mes souhaits. Et en même temps il faut que j'essaie intérieurement de me détacher, d'accepter que l'issue ne dépend pas de moi. Facile à dire.

D'une certaine manière j'ai l'impression que ce passage pas facile me met à nu, me fragilise. Je crois que ça aurait été le cas sans la voie, mais là le fait d'être dans la voie me fait me prendre en pleine figure mes contradictions, les choses que je regarde pas trop en face dans ma vie. Je me sens seul, sauf quand je prie ou que je fais du dhikr. Ce n'est pas très gai mais je crois que je dois en passer par là.

Je ne dis pas que la voie consiste à subir des épreuves tout le temps. Mais j'ai quand même l'impression que je dois être plus lucide sur moi, sur les subtiles stratégies qu'emploie mon ego pour me faire croire que tout va bien, que les choses s'arrangeront d'elles même.

Hum je ne suis pas sûr que tout ça ait un sens concret pour qui me lit. Disons simplement que je n'ai pas trop le moral. J'ai un peu du mal à me concentrer, sauf pendant la prière. Je dois à la fois être plus patient, et avancer concrètement.

Comme il se doit dans une phase de ce genre, je me pose aussi des questions sur ma foi. C'est étrange parce qu'en même temps pendant la prière je me sens vraiment bien, et à certains moments je suis vraiment ému. Il faut dire que je n'ai pas fini d'apprendre ce que c'est que la foi. C'est à la fois quelque chose de vivant, de subtil, de fragile aussi...

Peut être que c'est dans les moments difficiles qu'on éprouve mieux ce que c'est. Pas que la foi soit le refuge des malheureux ou la béquille sur laquelle on s'appuie, mais tout simplement les difficultés nous mettent à nu, et c'est peut-être là qu'on peut mieux sentir ce besoin ou cet élan spirituel. Faudra que j'y revienne.

Inutile de dire que mes rêves de fonder un foyer sont légèrement en berne.

28.1.05

proximité et voiles

Je reviens sur ce que m'a dit récemment un frère... ça m'a beaucoup fait réfléchir même si je ne suis pas sûr d'avoir tout compris. Il m'expliquait que d'une certaine manière la difficulté n'est pas dans l'éloignement de Dieu mais au contraire dans sa proximité. Tout ça n'est pas très clair pour moi.

Je crois qu'il voulait me faire comprendre que c'est en nous, au plus près de nous, que se trouvent les voiles qui nous empêchent de nous diriger vers Dieu. Ces voiles sont ce que nous avons de plus enfoui dans l'ego : volonté de reconnaissance, soif de domination, etc...

Pour illustrer ça (même si je ne suis pas sûr que ça rende mon explication beaucoup plus claire), une anecdote : un disciple était auprès de son maître depuis plus de 10 ans. Il avait l'impression qu'autour de lui d'autres disciples changeaient, qu'ils avançaient à grands pas, alors que lui-même faisait du surplace. Il consulta le maître là dessus, celui-ci lui répondit : "si je t'avais dévoilé d'un seul coup tout ce que tu as appris auprès de moi, tu serais mort sur le coup".

Deux conclusions : d'une part il avait bel et bien changé, même s'il ne s'en était pas rendu compte, et d'autre part ce dévoilement d'une présence divine si proche peut "consumer" totalement celui qui s'y expose. D'où, soit dit en passant, la nécessité d'avoir un guide. Mais je m'éloigne de mon sujet.

Chacun a ses freins, ses voiles qui l'empêchent d'avancer. Pour moi ça peut être le fait que je me pose trop de questions, que je doute parfois des raisons qui m'ont amené là, que j'ai besoin du regard des autres (la liste est longue). Et je m'attends à ce qu'alors que je croirai être arrivé quelque part il me faudra constater que je dois à nouveau repartir à zéro ou presque.

Pour ce frère les voiles sont d'un autre ordre : il a du mal à se "lâcher", il se pose des questions sur la compatibilité entre la voie et le fait que dans ce monde on est en compétition parfois féroce. Il m'a parlé d'un autre truc marrant : il se méfie énormément de l'exotisme et de son attrait. De même que s'il était dans une démarche bouddhiste (par exemple), il ne veut pas que sa démarche soit polluée par un attrait disons "culturel" pour l'islam.

Ca illustre la diversité des démarches et des freins qu'on rencontre. Je sais que le côté "musulman" ne me fait pas peur, au contraire. Mais peut être suis-je justement victime de cette attirance vers l'exotisme à mon insu.

Je me trompe peut être mais il me semble de plus en plus qu'à ce stade la voie va agir comme un miroir grossissant et me montrer certains aspects de moi qui ne sont pas terribles. Attention : j'ai l'air de me poser plein de questions, mais en même temps je goûte par moments une sorte de sérénité et de certitude. La certitude que je suis dans un chemin qui m'appartient, et qui me convient.

27.1.05

paraboles...

J'ai déjà parlé de la parabole de l'ouvrier de la onzième heure, que j'ai découverte en écoutant Faouzi Skali lors d'une de ses conférences. Cette parabole m'a permis de parler spiritualité avec mon père quelques semaines plus tard...

Je rappelle le principe : un chantier, un ouvrier arrive à la onzième heure, alors que tout est quasiment fini, et il se fait payer comme les autres. Ca a deux sens (au moins !) : ce n'est pas la quantité de nos oeuvres qui nous assure le salut, et surtout la miséricorde divine ne se mesure pas.

J'en reparle car je tombe sur un livre appelé ... la onzième heure, de Martin Lings. Je lis la biographie du prophète du même auteur en ce moment. Je sens que je vais acheter un nouveau livre prochainement !

the times they are a changing ?

Reçu hier une carte de voeux de quelqu'un de ma famille. C'est quelqu'un de très gentil, un peu lunaire, et très intuitif. On s'aime bien même si on ne se voit pas très souvent.

Sa carte dit : "2005 une année de changements intérieurs et extérieurs ?". Hum. Huhum. Bon sa femme complète en dessous en disant "change pas trop quand même t'es très bien comme ça", mais ça m'a pas mal troublé.

Ca doit se voir qu'il y a des changements en moi. Première chose : c'est clair que l'alcool ça a choqué pas mal de monde dans ma famille (eh oui j'avais disons... une réputation dans le domaine). Le fait que je sois assez zen aussi sans doute. Là en l'occurence le fait que cette personne de ma famille perçoive ou anticipe des changements m'a fait très plaisir.

Si en plus en 2005 j'ai le bonheur de fonder un foyer (insha allah devrais-je dire), ça me fera une drôle d'année.

anecdote pas croyable

Encore une discussion hier soir, cette fois à propos d'une visite au Maroc auprès du shaykh. On m'a raconté qu'un frère, qui a un travail important à Paris, était parti pour quelques jours lui rendre visite.

Une fois sur place, il est resté un tout petit peu plus. Le shaykh lui disait "reste il n'y aura pas de problème", tant et si bien qu'il est resté quasiment 2 mois (je crois). Là où l'anecdote est savoureuse, c'est que naturellement quand il est rentré en France personne à son travail ne semblait avoir remarqué son absence (je suppose qu'il a du les appeler une fois ou deux quand même...). De deux choses l'une : soit c'est une leçon d'humilité sur l'utilité réelle qu'on a dans son job, soit c'est ... autre chose.

Ca m'a fait immédiatement penser à cet épisode tiré de la vie du Prophète (j'avance doucement ma lecture mais j'avance) : Muhammad, encore à la Mecque, a commencé à préparer l'exil à Médine (l'Hégire). Ses ennemis dépêchent quelques hommes devant sa maison pour lui faire la peau quand il sortira de chez lui. Et là, une intervention divine détourne le regard de ses ennemis, de sorte qu'il peut sortir tranquillement (avec Abû Bakr il me semble) pour gagner une cachette dans les montagnes à l'extérieur de la ville.

Et si le shaykh avait retenu le frère parce qu'il "savait" que personne ne s'en rendrait compte à son travail ? Hum il se passe des drôles de choses.

vouloir que ça marche

Après la séance d'hier soir, un frère avec qui je suis rentré m'a dit "quand on invoque, il y a toujours ce piège de vouloir à tout prix faire que ça marche". Il veut dire par là que c'est difficile de se laisser aller, que plus on cherche à se laisser aller, plus on risque d'aboutir à l'effet inverse.

Tout cela est assez compliqué à expliquer. Lorsqu'on invoque, on essaie de s'orienter intérieurement vers le shaykh, et à travers lui vers Dieu (le shaykh n'est qu'un véhicule vers Dieu dans un sens). En quelque sorte il s'agit de se déprendre de soi-même. En plus lorsqu'on invoque en groupe on sent bien que certains "partent" très facilement. Je suppose que ça accentue le désir de se laisser aller. Mais ce laisser aller ne s'obtient pas par un simple exercice de la volonté.

Je me souviens que lorsque j'avais assisté pour la première fois à une "grosse" réunion, j'avais été sinon surpris du moins un peu perplexe face aux "hâls" de certains, qui sont spectaculaires. J'ai déjà expliqué ici que ces états ne doivent pas être recherchés pour eux mêmes, mais ils manifestent clairement que le faqir "part" (je ne trouve pas d'autre mot).

Pour des esprits formatés à l'occidentale, et encore plus si on est d'un milieu athée et qu'on cumule à ça des études scientifiques, tout ça est difficile à saisir. C'est difficile d'accepter l'idée qu'il y a des choses qu'on ne pourra pas comprendre rationnellement. Et c'est difficile également d'accéder à ce "laisser aller".

Hum je me relis ça n'a ni queue ni tête. Pas grave. Comment décrire ce que je ne comprends pas ? Quels mots utiliser pour parler de cette dimension intérieure dont je n'ai qu'une vague intuition ? Bien sûr j'ai des moments où je m'oublie, où je tremble. Mais c'est très difficile de s'appuyer sur quelque chose qu'on ne peut pas formuler avec les outils dont on a l'habitude. Je suppose que des gens qui ont plus avancé spirituellement ne se posent même plus la question.

Je cherche... quand on est dans une activité sportive par exemple, il y a des moments où on sent bien qu'on ne pense plus, qu'on déconnecte une partie du cerveau. On sent ça a posteriori : "je n'étais plus moi-même !". Je suppose que ça doit être quelque chose de comparable. Bon plus je me relis et plus je me dis que je me suis embarqué dans un sujet qui ne s'explique pas : plus j'essaie et moins c'est clair.

26.1.05

laïcité, menaces et phrases trop longues

Je signale le blog (et oui) de M. Jean Bauberot. C'est un chercheur en sciences sociales (il dirige l'Ecole Pratique des Hautes Etudes me semble-t-il), protestant, et c'est le seul membre de la commission Stasi à s'être abstenu au moment du vote du rapport final qui a donné le corpus de la loi dite "sur le voile".

Ce blog est un peu aride, mais le point de vue de ce monsieur est intéressant. Je me suis empaillé à titre personnel avec pas mal de gens sur cette loi (alors que j'étais loin d'avoir découvert la foi, mais pour des tas de raisons). Là, il expose un certain nombre d'idées qui valent la peine d'être examinées.

En particulier, je pense depuis longtemps que cette laïcité tellement menacée qu'il faudrait la défendre à tout prix fût-ce en dressant les gens les uns contre les autres, cette laïcité donc (oula dans quelle phrase je me suis embarqué moi) cache pas mal de choses. Sans dire comme certains que c'est ce qui tient lieu de religion dans ce pays, je suis persuadé que le débat sur la "laïcité" et les fameuses "valeurs républicaines" (rire nerveux) cache surtout une vraie crise de l'identité nationale. Qui sommes nous ? Que voulons nous être ? Avons nous accepté le fait que la France n'est plus un pays blanc et chrétien ? Je m'emballe un peu, je renvoie mes rares lecteurs au blog de M. Baubérot pour des avis plus tempérés.

Il me semble qu'on s'en sortait aussi bien sans cette loi. Il me semble qu'il y a sans doute des problèmes plus urgents à régler en France. Il me semble aussi que si notre président a sorti ça de son chapeau sans que rien ni personne ne l'y incite il devait avoir ses raisons, mais je préfère ne pas m'interroger dessus. Il me semble aussi qu'on confond musulmans et arabes, qu'on n'a toujours pas digéré la guerre d'Algérie (hum je m'emmêle les pinceaux et je parle de beaucoup de choses à la fois).

Pour une fois voilà un texte qui ne traite pas de la voie et de spiritualité. Mais après tout je me sens concerné, et pas seulement en tant que musulman.

signe de chez signe

Là on m'objectera que c'est peut être moi qui cherche à voir des signes partout. J'ai parlé à l'élue de mon coeur. Je ne sais toujours pas ce que l'avenir nous réserve, même si je souhaite de tout mon coeur vivre avec elle.

Elle a fait il y a quelques jours une prière dite de consultation (istikhara je crois)... sur un sujet qui nous est cher à tous les deux. L'idée est de demander à Dieu une indication, un signe. Bien entendu il peut ne pas y avoir de réponse, ce qui est une réponse en soi, ou la réponse peut venir après beaucoup de temps.

Et avant hier elle est allée à la Fnac avec une amie plus agée qu'elle. Cette amie lui a demandé de lui trouver un disque de ... Marvin Gaye. Première surprise : apparemment c'est plutôt inattendu venant d'elle. A la question "tu cherches une chanson en particulier ?" elle a répondu... "let's get it on". Rhaaa. J'imagine la réaction de l'élue de mon coeur : c'est euh disons "notre chanson", elle représente beaucoup pour nous.

Inutile de dire que quand elle m'a raconté ça je n'ai pu m'empêcher d'y voir un signe. Elle aussi je suppose. Je ne devrais pas m'emballer, mais c'est de bon augure. Insha Allah comme on dit.

en parler à mes proches

Depuis quelques jours j'ai beaucoup de mal à me concentrer. Peut-être qu'il y a trop de bouleversements à la fois dans ma vie. Un frère avec qui j'ai déjeuné hier me faisait remarquer que j'évoque souvent le fait de parler de mon engagement à mes parents, à mon frère. C'est vrai que c'est un sujet qui me préoccupe.

Son conseil là dessus : "laisse venir le moment, ça se fera comme ça se fera". Hum facile à dire, ou plutôt difficile à entendre et à mettre en oeuvre pour moi. Cet engagement dans la voie c'est peut être la première fois de ma vie que j'ai quelque chose qui m'appartient en propre, que je ne dois pas aux choix de mes parents. Sans faire de psychologie à un euro, c'est à la fois quelque chose qui me tient énormément à coeur (je ne me souviens pas de m'être jamais engagé comme ça) et quelque chose sur quoi j'ai peut être besoin de l'approbation de proches.

D'où ce blog, d'où le fait que j'en ai parlé à 2 amis proches... comme si j'avais besoin de me rassurer. Après tout plein de gens ne se posent pas la question comme moi. Il faut dire aussi que je crois que je ne garderai pas ça pour moi vis à vis de ma famille pendant des années. Et j'anticipe les réactions de mes parents.

Par moments je me dis que s'ils me voient heureux, serein et sûr de mon choix ils comprendront, par moments j'ai plus de doutes : l'islam n'a pas vraiment une image excellente en France (pour le moins) et les préjugés sont tenaces. Bien sûr il y a beaucoup d'ignorance, d'incompréhensions, mais j'imagine que la première fois où je leur annoncerai il y aura un léger blanc.

Déjà un chemin spirituel ça va les étonner, mais en islam par dessus le marché... je suis aussi inquiet quand je vois comment certains musulmans considèrent les athées ou les chrétiens et les juifs. Mais ça c'est encore un autre sujet. Bizarrement j'ai l'impression que dans ma famille ce ne sont pas les personnes les plus "tolérantes" en apparence qui le prendront le mieux. Il faut dire aussi que contrairement à certains frères de la voie qui sont gênés par le côté musulman ou plutôt qui ont des réticences, je me rends compte que ce n'est pas mon cas.

Et après tout ça se fera d'une façon ou d'une autre. Quand je pense à ce que j'étais il y a un an, et quand je pense que je vais avancer dans la foi, peut-être me marier et avoir des enfants, je me dis que ça aura été une drôle d'année. Et dire que tout le monde autour de moi me dit "2004 quelle année pourrie". Le fond de mes doutes vis à vis de mes proches est peut être là : j'ai changé, je vais certainement encore changer, et les changements ça peut déranger les gens. On verra ; à la grâce de Dieu.

La réunion de ce soir vient bien, ça va me permettre de recharger les batteries. Comme d'habitude j'ai hâte d'y être.

25.1.05

ignorance, savoir et connaissance

Je reprends mon "soufisme pour les nuls". Aujourd'hui à partir d'un hikam d'Ibn 'Ata Allah que j'aime bien : "Celui que tu vois répondre à toute question, exprimer tout ce qu'il contemple, mentionner tout ce qu'il sait, tu peux conclure à son ignorance".

Comme souvent, ça a certainement des sens que je n'envisage pas encore. Par exemple je pourrais l'appliquer à ce blog, et plus généralement à ma personnalité. On m'a parfois reproché d'avoir réponse à tout, de toujours chercher à avoir le dernier mot dans une conversation, de vouloir absolument convaincre les autres que j'ai raison, de m'exprimer avec assurance sur des sujets que je ne connais pas.

Cette sagesse n'est pas du tout propre au soufisme. Je regardais hier soir un reportage sur des apprentis guides de haute montagne. Leur "maître" (il faut bien l'appeler ainsi), un type avec un look insensé et une aura visible, expliquait qu'il n'y a pas d'arrogants dans son métier. Ou alors seulement les jeunes, qui croient tout savoir. La montagne rend humble, si bien que plus les guides avancent en expérience, plus ils sont modestes.

Ca ne veut pas dire qu'on ne doit pas utiliser son savoir : j'ai eu beaucoup de plaisir ce week end quand mon frère m'a parlé de certains aspects de son travail où il prend du plaisir, et notamment le fait de "coacher" des gens moins expérimentés.

Je ne pense pas non plus qu'Ibn 'Ata Allah vise spécialement les savants. Il stigmatise plutôt une manière d'être, une posture de l'ego. Et dans le cadre de la voie, un sens qui paraît clair est que plus on progresse dans la connaissance de Dieu, plus on comprend (j'espère... là je parle vraiment de choses que je ne connais pas) qu'Il est incommensurable et qu'on ne pourra jamais le connaître. Il y a pas mal de phrases ou d'allusions à ça soit dans le Coran, soit dans des hadith, soit dans les pensées de maîtres.

Peut être aussi fait-il allusion au fait que certaines connaissances (spirituelles) ne doivent pas être exprimées devant tout le monde, ou du moins avec prudence... je ne sais pas trop, mais ce serait un sens différent. En tout cas derrière une apparente simplicité il y a comme d'habitude chez lui de quoi réfléchir pas mal de temps.

J'ai déjà parlé aussi de la différence entre savoir (pour résumer, ce qu'on apprend avec le cerveau) et connaissance (ce qu'on apprend avec le coeur). Hum c'est un vaste sujet qui m'entraînerait loin si j'en parlais ici. On va dire (air connu...) que j'y reviendrai.

24.1.05

projets de vie

Hum un week end qui m'a bouleversé. J'ai (enfin) l'impression que les choses avancent avec l'élue de mon coeur. On s'est mis à parler concrètement de vie à deux, de ce qu'on attend du couple, de comment on voit la spiritualité, de la famille, etc...

Je ne sais pas encore ce que ça donnera : si ça se trouve on ne se mettra pas d'accord (je prévois des nuages du côté de la façon d'envisager l'islam). Mais quand je vois le chemin parcouru ça donne le vertige.

Je ne crois pas que j'aurais pu me douter en lui parlant pour la première fois qu'un jour je serais musulman et qu'on parlerait mariage. Je sépare les choses : je suis engagé dans l'islam, et dans la voie, mais rien ne dit que je vais me marier.

Quoi qu'il en soit et quelles que soient nos différences (on a aussi beaucoup de points communs), j'ai parfois le sentiment qu'on est faits l'un pour l'autre. Pour elle c'est clair, elle pense ça depuis le début même si elle ne me l'a avoué qu'hier. Mais ça ne suffit pas.

En même temps je sais qu'elle va avoir beaucoup de mal à accepter le simple fait que c'est possible. Elle m'a laissé athée et me retrouve musulman, elle a passé des mois à essayer de renoncer à moi et je débarque à nouveau dans sa vie... pas facile. Elle peut aussi bien accepter que me rejeter et je ne sais pas du tout ce qui va arriver.

Je voudrais avoir la force de simplement me remettre dans les mains de Dieu. Hum je n'en reviens pas de dire des choses pareilles. Et pourtant c'est vraiment ce que je ressens.

Du coup naturellement ces deux ou trois derniers jours j'ai eu un peu de mal à me concentrer pendant mes exercices spirituels. Je crois que c'est un peu normal. J'ai besoin de pratiquer pourtant. Besoin de sérénité.

21.1.05

blog anglophone

Pour les anglophones je signale un blog d'une soeur australienne, que je trouve très ... spirituel, et bien écrit par dessus le marché.

Bon c'est un autre genre de blog, plus concentré on va dire, ou moins bavard. Mais j'aime bien le lire de temps en temps.



massage et contraintes

Une très belle image que m'a donnée un frère australien mercredi soir. La voie, la pratique, c'est comme un massage du coeur. C'est marrant c'est plutôt un intellectuel, mais il ne lit presque rien "sur" le soufisme (lire les hikam c'est pas pareil c'est comme de la poésie), et surtout il parle de tout ça de façon très sensuelle, comme s'il parlait d'un bon plat.

Ca doit être ça qu'on appelle le goût. Je me sens lavé après la pratique. C'est vraiment une sensation physique. Je réfléchissais (je sais, je réfléchis beaucoup trop) à l'aspect "contrainte". Le sens de "islam" c'est soumission, c'est à dire qu'on accepte de se soumettre à des contraintes. Mais en même temps, je ne le vis vraiment pas comme une contrainte. Je suis impatient de faire mes invocations chaque jour. Pourvu que ça dure.

J'ai déjà parlé des voies jamal et jalal, et de cette image des grains de riz (qu'on prend sur son dos un par un plutôt que tout le sac d'un coup). L'idée, c'est qu'on intègre les "contraintes" ou plutôt les rituels petit à petit, au fur et à mesure, sans contrainte. Tiens en parlant de contrainte ça me fait penser à un des premiers trucs qu'on m'a dit sur l'islam (c'est tiré du Coran il me semble) : Nulle contrainte en religion.

Sur le moment j'avais pensé "ah ouais c'est malin comme ça on fait culpabiliser les gens puisque chacun est responsable directement devant Dieu". Bon on va dire que je vois les choses différemment. Ou que je les goûte différemment ?

incompréhension ?

Dîné hier soir avec mon ami qui est pas trop pro-religion. C'est bizarre mais par moments ça se passe bien quand on parle de tout ça et par moments c'est assez tendu (c'est lui qui m'a un peu énervé avec le sujet du vinaigre...). Il y a des choses sur la foi que je n'arrive pas à lui faire comprendre.

On a parlé d'un sujet par exemple : "aide toi et le ciel t'aidera", ou bien comme le disait je crois l'imam Malik "rien ne tombe des arbres". Pour lui c'est un proverbe qui n'a rien à voir avec la religion, comme "après la pluie le beau temps", qui veut simplement dire que quand on veut quelque chose il faut y consacrer tous ses efforts et y croire.

Pour moi le sens est très différent. Il y a deux parties : "aide-toi" ça veut dire fais ce que tu peux pour obtenir ce que tu veux, "le ciel t'aidera" ça veut dire (pour moi) que c'est Dieu qui décidera de toute façon de ce qui adviendra. Je fais une analogie, évidemment, avec un échange que j'ai eu avec le responsable du groupe de Paris à propos de ma bien aimée.

Il m'a dit que je pouvais voir ça comme une sorte d'exercice spirituel : faire extérieurement tout ce que je peux pour qu'on puisse vivre heureux ensemble, tout en étant intérieurement détaché, c'est à dire résigné ou plutôt n'attendre le résultat que de Dieu. Hum difficile à faire comprendre à quelqu'un qui raisonne dans le concret. Mon ami pense que c'est beaucoup plus simple : on a plus de chances d'arriver à son objectif si on est convaincu qu'on va y arriver. Mais dans le fond je ne suis pas sûr qu'on parle de la même chose. Et du coup je ne suis pas sûr qu'on soit en désaccord.

Il faut dire que cet ami est très peu "spirituel". Quand je lui parle du vide par exemple il n'y comprend rien alors que pour moi ça a un sens. Du coup j'ai parfois l'impression que je suis obligé de lui répéter plusieurs fois les choses. En revanche je crois que même s'il ne comprend pas tout il observe ça avec une certaine bienveillance : il reste mon ami quoi qu'il arrive. Et je tiens à ce qu'il continue à me dire ce qu'il pense.

20.1.05

pièges

La voie est semée de pièges m'a-t-on dit. Quand on croit avoir compris quelque chose on peut très bien se rendre compte qu'il n'en est rien. Est-ce "apprendre qu'on ne sait rien" ? C'est marrant ça me fait penser à la série "Kung Fu" avec le petit scarabée qui n'était "pas assez rapide". Un frère me disait hier soir que la progression, l'apprentissage est tout sauf linéaire. On avance, on recule. Peut-être pas si mal choisi que ça le titre de mon blog.

Un des pièges contre lesquels on m'a mis en garde, et là en ce moment ça me parle vraiment, c'est que dans l'espèce d'enthousiasme où je suis en ce moment je risque d'être imprudent. D'en parler à des gens qui comprendraient pas. Ou alors de vexer involontairement un frère en croyant plaisanter. Je crains que ça me soit arrivé hier soir.

Un autre sujet de vigilance : je ne dois jamais oublier (Dieu sait si c'est difficile) qu'il vaut mieux que j'essaie de ne pas juger les gens. Par ailleurs, même si les avis divergent là dessus, je crois qu'il y a du vrai dans l'idée qu'on ne voit les défauts des autres que si on les a en soi.

diversité ?

A chaque fois que je rencontre des nouveaux foqara, je suis frappé par la diversité des parcours qui ont amené les gens dans la voie, par la diversité des approches. Discuté hier avec un frère d'origine iranienne. Il parle de la voie, du sheikh, de l'orientation d'une façon à la fois très simple et très vraie. Il m'a rapporté qu'il avait vu un faqir interroger le sheikh sur l'orientation. Celui-ci a répondu (je crois) "si je te le disais, tu perdrais l'orientation". Hum pour être énigmatique c'est énigmatique.

Je n'idéalise pas : d'une part la voie forme un petit groupe assez fermé, d'autre part le niveau disons socio-professionnel est sans doute au dessus de la moyenne. Mais ça n'a pas vraiment d'importance. C'est étonnant de voir tel frère, professeur d'université, dire qu'il ne lit aucun livre sur la religion. Chacun sa manière. Je sais que pour ma part je lis beaucoup. J'ai du temps pour ça et ça me nourrit.

Pour d'autres, la lecture n'apporte presque rien, tout est dans la pratique. De ce point de vue je n'ai pas été déçu hier soir. C'est bizarre : c'est la première fois depuis longtemps que je n'étais pas très impatient à l'idée de la réunion, et (peut être pour cette raison même) j'ai trouvé ça très très bien.

J'ai d'ailleurs eu du mal à m'endormir après. Je me sentais à la fois un peu vidé et plein d'énergie (encore un paradoxe). Ca tourne un peu dans ma tête. Et (autre paradoxe), il ne faut pas chercher à tout expliquer, ou alors on risque de passer à côté ! Pas très clair tout ça. Faudra que je fasse des efforts pour revenir là dessus.

19.1.05

hamdulilah

Ca veut dire "louange à Dieu" ou Dieu soit loué. Si vous assistez à une discussion entre musulmans (même non arabophones) c'est quelque chose que vous entendrez souvent.

Je me suis surpris à dire ça tout à l'heure. J'étais dans la rue, j'avais reçu un mail de l'élue de mon coeur où pour une fois elle a l'air contente, il faisait beau, j'avais rendez-vous pour déjeuner avec un ami que j'aime bien, bref tout allait bien. Et ça m'est venu. Y a des moments de grâce comme ça. Bon bien sûr y a aussi les épreuves, les difficultés, les rappels.

Bien sûr mon chemin spirituel ne fait que commencer. Et je sais que la route sera longue, parsemée d'embûches. J'ai pas choisi la voie la plus simple en plus. Mais voilà : j'ai envie de remercier Dieu pour ce petit moment de grâce que j'ai vécu.

Hum pour un athée je dois décidément paraître de plus en plus taré. Faut pas que je me grise de tout ce qui m'arrive. Faut aussi que je garde le contact avec la réalité. Je repense encore à cette histoire de prénom, et au fait que le frère de la librairie m'a dit de pas trop m'envoler. Ca doit se voir.

Je pense à un autre sujet : je sais que l'élue de mon coeur a beaucoup coupé dans ses relations d'avant l'islam. Bon elle a du temps devant elle. Mais je voudrais faire attention à ça. Ne pas me fâcher avec les gens. Il y a des musulmans par exemple qui refusent de s'asseoir avec quelqu'un qui boit de l'alcool. Je crois que ça m'arrivera pas. Tant pis pour les censeurs. Mais bon les censeurs, l'esprit et la lettre, tout ça c'est un autre sujet. Je préfère pour le moment en rester sur mon hamdulilah.

preuve et signe

Je reviens sur un point un peu compliqué. Pour moi ce n'est pas trop clair, alors quand j'essaie de l'expliquer c'est encore pire. Et pourtant j'ai trouvé quelqu'un qui est du même avis que moi (le frère de la librairie). Voilà : les preuves et les signes c'est deux choses différentes.

Je m'explique. J'ai déjà dit que je suis gêné par les gens qui s'acharnent à tout prix à trouver des preuves de l'existence de Dieu. Par exemple il y a ce livre (Les Evangiles, le Coran et la Science je crois) qui s'attache à montrer que certaines découvertes très récentes de la science sont "décrites" dans le Coran, ce qui prouve ipso facto que le Coran est un texte divin.

Je respecte les gens qui font ça mais je ne comprends pas bien leur démarche. Bon il faut dire que je ne suis pas encore bien à l'aise sur pas mal de choses (au hasard Dieu vs. la théorie de l'évolution). Je crois que c'est dans Ibn 'Ata Allah que j'ai dû lire quelque chose du genre "qu'avez vous besoin de prouver Dieu ?". En gros je trouve que Dieu se suffit à lui-même et que c'est lui faire peu confiance que d'avoir à prouver son existence. Ou alors si c'est prouver afin de démontrer aux incroyants et/ou aux fidèles d'autres religions qu'ils ont tort, je ne vois pas non plus très bien l'intérêt.

Si on croit en Dieu, la preuve est dans notre coeur, pas dans notre cerveau. Opposition classique dans le soufisme. En revanche, et là je ne m'attends pas à ce que tout le monde me comprenne, mais c'est ce que je ressens, en revanche dis-je, je crois qu'il y a des signes. Il y a des choses qui arrivent à certains moments plutôt qu'à d'autres, des rencontres, etc... moi je vois ça comme des signes.

Ca m'arrive fréquemment de demander à Dieu de m'envoyer des signes. Et je ne demande pas que les nuages écrivent "Dieu" en énorme dans le ciel, ni qu'un coup de tonnerre éclate. Hum c'est déjà subtil pour moi la distinction, alors pour d'autres... et pourtant certains comprennent parfaitement la différence !

Dans un mail, l'élue de mon coeur me demande ce qui m'a fait changer d'avis, alors qu'il y a un an et plus je lui tenais des discours sur le fait que tout était dû à l'évolution, à la nécessité, que le hasard existait et pas Dieu etc... je ne me rappelle pas que j'étais si catégorique mais c'est certainement vrai. Je n'ai pas trop su lui répondre sur ce qui m'a fait changer.

En revanche j'ai changé, c'est une certitude. Il va me falloir du temps pour accepter tout ça, pour concilier ce que j'ai toujours cru savoir et cette connaissance nouvelle qui me vient, mais je crois que ça ne posera pas de problème. On ne balaye pas comme ça (du moins pas moi) des décennies de façon de penser. Et je n'ai pas l'intention de rejeter tout ce que j'ai pu penser. Je crois que la foi va au contraire transcender tout ça.

Ainsi pour prendre un exemple, cette idée qu'il n'y a pas à prouver Dieu je l'avais déjà avant de commencer à croire... alors je suppose que mes idées "d'avant" étaient en grande partie bonnes.

18.1.05

siddhartha

Déjeuné aujourd'hui avec un ami que je n'ai pas vu depuis plus d'un an (il est de la "galaxie" de mon ancienne amie, aussi je n'ai pas cherché à le revoir alors que je l'apprécie beaucoup). Il a - lui aussi - plus ou moins arrêté de boire. Mais lui a des raisons assez différentes des miennes : il était clairement en train de devenir alcoolique.

On a parlé de pas mal de sujets, et je suppose que je suis un peu transparent en ce moment puisqu'il a fini par me demander si je "suivais un groupe ou un maître spirituel"... alors que je lui avais simplement dit que je me posais des questions sur la vie, sur le spirituel. Il a l'impression que je suis dans une recherche et dans une sorte d'ascèse. Ce n'est sans doute pas faux.

Du coup il m'a recommandé la lecture de Siddhartha de Herman Hesse. Apparemment c'est un livre qui lui a beaucoup apporté à un moment de sa vie où il se posait beaucoup de questions. C'est un roman initiatique qui a fait dire à certains que l'auteur est le seul occidental qui a compris l'esprit de l'Inde. Je n'ai rien à dire là dessus, n'ayant lu ni ce livre ni aucun autre sur la sagesse indienne.

Nous voilà à discuter comme si on s'était quittés la veille, sauf qu'entretemps on a arrêté de fumer et de boire. Hum ça n'a pas empêché qu'on a passé un très bon moment. Il se pose des tas de questions sur sa carrière (on lui fait plus ou moins un pont d'or pour travailler dans la finance). Je suis heureux d'avoir renoué le contact.

nouveau livre

Retourné à la librairie... j'ai toujours la banane quand j'y vais je n'y peux rien. Je me suis fait conseiller un des grands basiques qui manquent à ma bibliothèque : une biographie du prophète. Le patron m'a conseillé celle par Martin Lings. Inutile de préciser que Martin Lings a beaucoup écrit sur le soufisme (il est probablement membre d'une voie).

On a évoqué ma shahada, le choix du prénom... quelle chaleur je sens dans cet endroit. On a parlé de la Bretagne aussi (je crois que le patron pense que je suis breton, et en tout cas que l'élue de mon coeur l'est). Son collègue m'a parlé d'un breton de 70 ans qui est venu récemment et qui a dit un truc du genre "je me sens chez moi (en tant que breton) parmi les musulmans".

On a évoqué aussi le fait que pour certains censeurs le prénom Gibril ne devrait pas être donné... chacun sa vision de l'Islam on va dire. Pourquoi se battre pour ça. Il a redit que s'il a complété Gibril en Ahmed Gibril (même si ce n'est pas vraiment lui qui m'a choisi ce prénom, celui-ci est en quelque sorte "descendu"), c'est "pour que je ne m'envole pas trop vite". J'aime beaucoup cette image. Et j'aime ce prénom... mais ça je l'ai déjà dit.

les interdits

J'ai déjà parlé de cet ami très proche qui n'est pas très chaud sur la religion. On a dîné ensemble hier. Il semble vouloir me piéger, me mettre face à mes contradictions.

Tout ça n'est pas très clair, mais en gros il est mal à l'aise avec le fait que la religion c'est accepter un certain nombre d'obligations. Il m'a ainsi dit "ah mais alors c'est fini pour toi la vinaigrette ?". Je n'ai pas trop su quoi répondre. Son discours revient à dire "puisque tu as choisi l'Islam faut tout appliquer ou alors tu n'es pas logique avec toi même". Il fait mine de ne pas comprendre que j'aie arrêté l'alcool tout en continuant à manger de la viande pas hallal, etc...

Comment lui expliquer que la viande hallal, les interdits alimentaires, l'alcool, tout ça ne sont que des choses extérieures ? Peut-être que je me trompe, mais il me semble que ces interdits sont infiniment moins importants que ce qu'on peut ressentir intérieurement. Bon c'est pas mal d'avoir un regard extérieur sur ce qui m'arrive, mais comment dire... il faudrait que j'arrive à lui faire comprendre que chacun est libre de choisir les règles qu'il suit.

Attention, ça ne veut pas dire qu'on peut faire ce qu'on veut. D'une part on est responsable directement devant Dieu de ce qu'on fait. Et d'autre part, dans le contexte plus spécifique de la voie soufie, on dit que la shari'a (les règles) c'est le garde fou, ce qui permet de ne pas s'égarer, de rester en contact avec la réalité. Je reviendrai là dessus ; ça concerne notamment les gens qui commencent à éprouver des états spirituels importants.

Cet ami m'a posé une colle : que ferais-je si j'étais invité à manger chez mes parents et qu'il y avait du porc. Je crois qu'aujourd'hui je n'hésiterais pas : j'en mangerais. C'est plus important pour moi de garder une bonne relation avec eux que de suivre strictement l'interdit. Et je crois que c'est mon problème, mon choix. Je repense à ce hikam qui dit que nos oeuvres sont des formes mortes qui ne vivent que par la pureté de l'intention qui les habite.

En l'occurence, je ne sais pas trop quand ni comment je pourrai dire à mes parents que je suis musulman. Pas que j'en aie honte, au contraire. Mais simplement parce que si je peux éviter de les blesser c'est aussi bien. Mais on verra bien, si ça se trouve ça se passera beaucoup mieux que ce que j'imagine.

Pour revenir aux interdits, et plus généralement à la shari'a, je continue à appliquer le conseil qu'on m'a donné : y aller progressivement, ne pas me "charger" trop d'un coup, et surtout n'appliquer quelque chose que quand j'en sens la nécessité intérieure. Je sais ça peut paraître creux, mais pour moi ça veut dire quelque chose.

à nouveau des doutes ?

C'est un peu paradoxal : d'une part j'ai l'impression d'avoir de plus en plus "besoin" de pratiquer ; et d'autre part je suis comme souvent assailli par des doutes. Il faut croire qu'avec moi les choses ne seront jamais simples, mais que faire sinon aller dans le sens de sa nature ?

Je me pose des questions sur le paradis, l'enfer, tous ces concepts qui me paraissent un peu abstraits, alors que pour d'autres musulmans ça a l'air si ... réel. Peut-être qu'il faut juste que je me concentre sur la pratique. Pour ce qui est de l'enfer, du paradis, du jour du jugement, tout ça me ramène à la mort.

On n'a pas trop l'habitude d'y penser, ou plutôt je n'y ai jamais beaucoup pensé. Il y a un hadith (je crois) qui dit "vis pour l'autre monde comme si tu devais mourir demain, et pour celui-ci comme si tu devais vivre mille ans". La foi c'est (entre autres) refuser l'idée qu'on est juste là pour une parenthèse, sortis du néant pour y retourner.

La foi ça peut être aussi se dire qu'il n'y a pas de hasard. Je suis retombé hier sur ce hadith qui dit "l'encre est sèche, les rouleaux sont rangés". Bon ça nous ramène à mon bon vieux débat sur le libre arbitre et le destin, mais je crois que ce qui a commencé à me faire bouger c'est ce questionnement sur le hasard.

Quand à la mort... ce n'est pas être morbide que de penser que je pourrais mourir demain. Dans ses félicitations, l'élue de mon coeur m'a dit "je te souhaite de mourir musulman". Je comprends ce qu'elle veut dire. Hum faudra encore que j'y revienne, je n'ai pas les idées très claires sur l'angoisse face à la mort.

Au passage, une autre chose qui m'a fait changer c'est la mort récente de ma grand-mère. Il n'y a donc aucun mal à y penser. Et qu'on ne me dise pas "ah ok la foi c'est juste une béquille pour se prémunir de la peur de la mort, de la peur du vide". D'abord parce que je ne suis pas sûr de pouvoir expliquer ce que c'est que la foi. Et ensuite parce que je crois que c'est beaucoup plus que ça.

Je dis que j'ai des doutes. C'est un peu normal. En même temps j'ai ressenti un grand bien-être ce matin après la prière et le dhikr.

17.1.05

niveau de pratique

Je crois avoir déjà dit que si je suis arrivé au soufisme ce n'est certainement pas par hasard. Je suis loin de faire les 5 prières quotidiennes, mais je constate que je consacre quand même pas mal de temps à la pratique (les invocations propres à la voie prennent un peu de temps chaque jour).

Je réfléchissais à ça et je me disais que c'est quand même quelque chose : je passe d'athée complet à une pratique qui demande pas mal d'engagement. Je suis loin d'y consacrer autant de temps que certains, mais dores et déjà je suppose que je consacre plus de temps à la pratique que 90 % des croyants toutes religions confondue ! Pas que j'en tire une satisfaction particulière, c'est juste une constatation.

Il faut reconnaître que même si c'est difficile à faire comprendre, je reçois quelque chose en échange. En fait on passe du temps à pratiquer, mais comment dire... j'ai l'impression que je devrais presque me freiner. En tout cas au niveau actuel ça ne me pèse pas du tout. Je dois avoir besoin d'une pratique intense. En ce moment en tout cas.

encore un hikam qui laisse perplexe

Je n'ai pas le livre sous la main aussi je ne suis pas sûr de ma citation, mais il y a une sapience de Ibn 'Ata Allah qui dit à peu près :
Si tu Lui demandes quelque chose, c'est que tu doutes de Lui
Si tu Le recherches, c'est que tu Lui es absent
Si tu recherches un autre que Lui, tu devrais avoir honte devant Lui
Si tu demandes à un autre que Lui, tu t'éloignes de Lui.

Je crois que je ne cite pas correctement, mais je suis resté en arrêt un certain temps devant. C'est à la fois paradoxal et très beau. On dit par ailleurs qu'on peut tout demander à Dieu, pourvu que l'intention soit juste. Alors comment comprendre cet aphorisme ? Je n'ai pas la réponse aujourd'hui. Je sais juste que sa seule lecture me laisse rêveur.

Bon il y a cette idée de s'en remettre totalement à Dieu. L'idée aussi que ce n'est pas le cheminant qui va vers Dieu, mais Dieu qui l'appelle à Lui. Hum tout ça est un peu confus. Mais au moins c'est beau.

Pour revenir un peu sur terre j'ai entamé la re-lecture de l'excellente Initiation au Soufisme d'Eric Geoffroy. Je l'ai lu il y a 3 mois, mais naturellement c'est un peu différent aujourd'hui.

discussion inattendue avec un proche

Vendredi j'ai discuté longuement avec un ami très proche. Il ne sait rien de ce qui m'arrive. Mais je constate une fois de plus avec surprise que la spiritualité m'ouvre des perspectives totalement inattendues.

Je découvre en quelque sorte une autre facette de gens que je connais depuis longtemps. Là en l'occurence on a fini par parler du fait que (je le cite) il y a quelque chose dans l'univers qui nous dépasse, et qu'il faut accepter le fait qu'on n'a pas le pouvoir sur tout. En somme il me parlait de Dieu. Il m'a même dit "insha allah"... là j'étais carrément étonné. En fait il faisait référence à un épisode qui lui est arrivé il y a près de 15 ans lors d'un voyage au Pakistan et en Afghanistan qui l'a beaucoup marqué. Il voulait parler du fait que pour les musulmans, il y a cette certitude que si on doit mourir aujourd'hui, rien ne sert de s'en faire (je résume).

Autant j'ai du mal à parler de tout ça avec des gens très cartésiens (et je me mets au nombre des cartésiens), autant avec lui j'ai senti qu'on pouvait parler spiritualité... attention, je ne prétends pas que certains ne peuvent pas comprendre, mais là j'ai été surpris : je n'imaginais pas qu'il pensait à Dieu, fût-ce sous une forme un peu vague.

Il est architecte. Il a une bonne culture historique sous l'angle à la fois des idées et de la culture. J'ai commencé à lui parler du livre de Guénon (quand je parle de ce livre à mon frère il a un peu du mal). Et là non seulement il avait l'air de comprendre de quoi ça parlait, mais il était même plutôt en phase avec les idées que développe Guénon. Notamment le fait qu'en Occident on a totalement renoncé à la connaissance disons spirituelle qui existait au moyen âge.

Cet ami m'a cité des exemples dans le domains de l'architecture qui allaient dans ce sens. Ainsi (apparemment des générations de gens ont essayé de l'expliquer sans vraiment y arriver) sous Notre Dame (comme sous d'autres cathédrales) il y a une feuille de plomb qui épouse toute le plan de la construction. Je ne suis pas assez expert sur le sujet pour y comprendre quelque chose, mais le point important c'est que selon lui personne ne sait pourquoi les bâtisseurs ont fait ça.

Il m'a cité aussi l'exemple célèbre de ce tombeau de pharaon déplacé par l'Unesco en vue de la construction du barrage Nasser (je crois que c'est tout simplement Toutankhamon). En dépit de toutes les techniques les plus modernes, on n'a pas été capable de "caler" le tombeau comme il l'était avant : le jour de l'anniversaire du pharaon, un rai de lumière entrait dans le tombeau et venait frapper un certain point. Apparemment on ne sait pas faire ça aujourd'hui. Tout ça est peut être un peu délirant, je ne fais que répéter ce que cet ami m'a dit.

Quoi qu'il en soit je découvre cet "accès" à lui que j'ignorais. C'est peut être le fameux face à face des coeurs dont parle Faouzi Skali. C'est en tout cas agréable de pouvoir parler ... de Dieu avec lui. Si on m'avait dit il y a 6 mois que j'écrirais ce genre de chose j'aurais hurlé. Comme quoi il ne faut jurer de rien.

14.1.05

glossaire

J'ai relevé cette page (sur un site euh... ami on va dire) qui donne un glossaire bien fait de plein de termes soufis et musulmans.

Pour ceux à qui ça peut servir...

anecdote sur l'orientation

Une anecdote qu'on m'a racontée cette semaine, qui illustre ce que ça peut être que l'orientation. Une jeune femme américaine qui apparemment s'intéresse à la voie s'est vu remettre par quelqu'un d'autorisé un dhikr "préparatoire" comprenant, comme pour beaucoup les gens qui ne sont pas encore dans la voie, 100 fois "la ilaha illa Llah".

Or elle a mal compris. Elle ne disait la phrase qu'une fois par jour (!). Et apparemment ça a suffi à lui provoquer des états spectaculaires en pleine journée, même à son travail. J'ai déjà parlé des états (hâl) ; ça peut prendre plein de formes différentes, on peut très bien cheminer des années sans en éprouver.

Là en l'occurence c'est rarissime qu'en invoquant seul et juste avec une phrase dite une fois on éprouve ce genre de chose. Je suppose que cette femme a une nature particulièrement prédisposée, ou bien qu'elle est exceptionnellement bien orientée.

J'ai du mal à comprendre ce que c'est que l'orientation, donc j'aurais du mal à l'expliquer. Mais c'est quelque chose de très important. Il faut que je parle un peu du rôle du sheikh. C'est un sujet à la fois simple et complexe. Je ne suis pas sûr d'avoir les idées suffisamment claires à ce sujet pour le moment. Disons que le sheikh est quelqu'un qui nous permet de nous rapprocher de Dieu. S'orienter vers le sheikh, penser à lui, c'est se faciliter l'orientation vers Dieu.

C'est délicat parce que certains croient à tort (ou à dessein) que ça revient à adorer le sheikh, alors qu'on n'adore que Dieu. Le sheikh est en quelque sorte quelqu'un qui nous montre la porte à franchir (hum je crains de ne pas être clair). Il est vrai que dans certaines voies il est arrivé que le sheikh se fasse vénérer pour lui même, ce qui a prêté le flanc à la critique.

Là ça m'amène à parler d'une tarte à la crème dans les critiques du soufisme : certains accusent les soufis d'association, ce qui est un des pires péchés en Islam. Justement à cause du rôle du sheikh. Alors que c'est justement lui qui nous fait sentir l'Unicité, ce principe qui est à la base de tout. Hum voilà encore un vaste sujet. Faudra un jour ou l'autre que je revienne sur les critiques faites sur le soufisme, je crois qu'il y a un très bon livre sur le sujet je crois que c'est ça.

livres

Je réalise quelque chose de pas banal. C'est devenu tellement naturel que je n'y fais pas attention, mais quand même...

Auparavant je ne lisais que des romans, quasiment pas d'essais. Là depuis quelques mois je lis des livres spirituels ou religieux (je ne lis pas que ça mais ça prend le gros de mon temps de lecture). Et là je décrouvre un rapport très différent aux livres.

Sans même parler du Coran, les livres que j'ai lus sont pour la plupart des livres qui ne se "donnent" pas comme ça. Je veux dire qu'ils ont souvent un abord pas simple. Les textes d'Abd el Kader par exemple sont assez difficiles. La difficulté peut venir du fait que comme dans un livre de philo les thèmes abordés demandent la connaissance de concepts ou d'idées. Mais elle vient souvent aussi du fait que ces livres essaient de parler de choses qui sont plutôt subtiles.

Du coup je me rends compte que la plupart de ces livres sont à lire et relire, ce qui est nouveau pour moi. Je viens par exemple de recommencer la lecture des Hikam d'Ibn 'Ata Illah. Si ça se trouve c'est un livre qui m'accompagnera le reste de ma vie, je le relirai peut être des dizaines de fois.

Et quand je pense à tous les sujets que je n'ai pas encore abordés ! Rien que dans l'ordre de la connaissance musulmane "de base", il faut que je lise au moins un livre sur la vie du prophète et que je me procure un recueil de hadiths (les hadiths sont les "dits" du prophète, la "tradition" ou sunna comprend le Coran et les hadiths). Il y a également pas mal de livres plus spirituels que je lirai certainement : les grands soufis (dont certains ont aussi été de grands docteurs de la loi) comme Ibn Arabi, Al Ghazali, Rûmi et j'en passe...

Je ne crois pas avoir déjà vécu ce rapport aux livres... bon certains de ceux que j'ai lus le sont une fois pour toutes, mais il y en aura certainement pas mal que je lirai et relirai. Je sens que le frère qui m'a donné la shahada n'a pas fini de me voir.

lecture du Coran

Hier soir j'ai passé un peu de temps à lire le Coran. J'essaye d'en lire un peu régulièrement. Là j'ai lu les sourates "L'abeille" et "La caverne" (16 et 17 je crois). Je ne sais pas pourquoi, mais pour la première fois depuis que j'ai commencé à le lire, je commence à y prendre vraiment du plaisir.

Le Coran est inépuisable à ce qu'on dit. Et puis il faut passer par la phase où on se dit "que de violence, que de menaces de châtiments terribles, etc...". Le style est très déroutant (ça s'adresse parfois au lecteur et parfois au prophète, des choses sont dites et redites, la cohérence est difficile à trouver pour qui n'est pas habitué, ça mélange des histoires, des paraboles, des presciptions, etc...). Je ne sais pas bien en parler.

Toujours est-il que je commence à "goûter" la lecture. C'est indéfinissable. Mais certains versets me parlent. Je suis un lecteur assez contemplatif de nature : déjà avec un livre normal ça m'arrive de passer 10 minutes à rêvasser au détour d'une phrase... inutile de dire que là ça ne s'arrange pas. Encore que là je ne sais pas si rêvasser est le terme approprié.

Je commence à passer par dessus le côté un peu rébarbatif du texte. Je comprends que des lecteurs extérieurs puissent avoir du mal. J'ai du mal à croire que j'ai pu changer d'approche aussi vite d'ailleurs. Encore un sujet sur lequel il faudra que je revienne en cours de route.

Au passage les gens qui me disent que j'ai l'air de plus en plus détaché des aspects matériels ils ont peut être raison... je regarde plus trop la télé, je lis. Quand mon demi-frère me parle de son nouvel ordi ou de sa nouvelle moto ça me passe carrément au dessus de la tête (bon ça c'était déjà le cas avant).

13.1.05

patience encore

Je crois que la première leçon que je suis en train de prendre c'est sans doute la patience. Je suis loin d'y être je rassure le lecteur. Je crois que ça va me prendre beaucoup de temps pour changer, pour goûter la foi.

Par moments je voudrais que tout vienne d'un coup. Mais ce n'est pas comme ça que ça marche. Je ne crois pas que ça soit du masochisme, simplement il faut que je sois capable de me raisonner, d'admettre que si je change intérieurement ça prendra des mois, des années.

De ce point de vue le blog est intéressant : quand je me relirai d'ici quelques mois, ça risque de me faire sourire. Le responsable du groupe de Paris m'encourage. Ma foi si ça peut intéresser soit des foqaras soit des gens qui ne sont pas encore dans la voie mais qui s'intéressent au soufisme...

C'est tellement personnel. Je ne peux pas prétendre à un savoir suffisant pour faire des cours sur le sujet. C'est juste un témoignage au jour le jour. Il y a des sites (pas assez à mon goût) sur le soufisme, il y a quelques blogs en anglais. Comme beaucoup de choses, j'imagine que je comprendrai mieux le sens de tout ça d'ici quelques mois.

Un sentiment : je ne sais pas si c'est parce que j'ai beaucoup de temps libre, mais je suis impatient de faire ma prière le soir. Et le dhikr. C'est peut être le goût qui commence à me prendre. J'ai déjà parlé du fait que c'est par le goût qu'on avance dans cette voie (à ce qu'on m'a dit...) Je sens un peu ça. J'ai parlé avec l'élue de mon coeur aujourd'hui, je lui ai dit que j'ai cette soif que je sens grandir. Pourvu que ça dure.

pacte, amour

Pris le pacte hier soir. C'est très simple en fait. Et c'est dans la droite ligne de ma shahada de vendredi. Voilà je fais partie de la tariqa à présent. Ca ne va rien changer du jour au lendemain, les changements sont lents et progressifs.

Hier soir un frère d'Avignon était là, on a pas mal discuté. Il n'est pas du tout dans ma situation, mais on a parlé d'amour. Amour divin bien sûr, mais aussi amour pour une femme. Il aime une jeune femme et m'a dit une chose qui m'a beaucoup touché : "mon amour s'est totalement purifié, il n'y a plus d'aspects psy, plus de recherche de la mère, même plus de désir d'enfants, il ne reste que l'amour à l'état pur".

Je suppose que ça ne veut pas dire qu'il n'envisage pas des enfants s'il a le bonheur de faire sa vie avec cette femme, mais la pratique l'a en quelque sorte "nettoyé" des scories qui enveloppaient son sentiment. Inutile de dire que ça m'a parlé, et que j'ai été très touché.

Je me réveille fréquemment la nuit en ce moment. Je dois être un peu troublé par tout ça. Et clairement je suis troublé par l'amour que je porte à l'élue de mon coeur. Ce matin vers 6 h 30 j'ai ouvert un oeil, je ne me sentais pas trop bien. Et là l'oiseau qui chante le matin près de ma fenêtre depuis quelques jours s'est mis à chanter. Je ne dis pas que ça m'a totalement calmé, mais c'était beau.

12.1.05

hikam sur l'intention

Hier lors du déjeuner le responsable du groupe de Paris m'a rappelé ce hikam de Ibn 'Ata Allah : "les oeuvres sont des formes mortes, dont l'esprit est le secret de la pureté d'intention qui est en elles".

Il cherchait à me rappeler l'importance de l'intention par cette phrase magnifique. Quelque soit l'acte qu'on accomplit et notamment les actes rituels il faut essayer de tendre vers ça.

Naturellement je ne peux pas m'empêcher de traduire ça aussi dans mon contexte. Je crois que vis à vis de l'élue de mon coeur mon intention est pure : je veux l'épouser, vivre avec elle dans le droit chemin, et "que l'un des deux enterre l'autre". Incha Allah comme on dit.

Pour le moment je me contente d'essayer de me rappeler l'intention dans des contextes plus modestes.

signe ?

Je vois peut être des signes là où il n'y a pas lieu d'en voir. Mais je repense à ce rêve qu'avait fait l'élue de mon coeur il y a près d'un an (j'étais très loin de me douter qu'un jour je me convertirais...). Dans son rêve j'étais à ses côtés dans une mosquée, vêtu de blanc.

J'y repense parce que c'est la première chose qui m'est venue à l'esprit quand le frère m'a donné mon prénom. Le fait d'être en blanc n'a rien de discriminant : c'est une couleur qui a certainement un sens en Islam mais qui n'est pas réservée à qui que ce soit.

Et pourtant je tombe sur cette anecdote archi connue, et là ça m'a fait froid dans le dos. Attention, je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas. Je trouve juste que la coïncidence est étonnante. J'ai déjà dit que ce prénom m'avait énormément touché. De là à penser que ce rêve annonçait ce prénom... je ne sais pas.

annonce

J'ai dîné hier soir avec mon ami qui est disons pas trop favorable aux religions. C'est un des deux seuls non musulmans à être au courant de mon chemin.

J'ai fini par lui annoncer ma conversion. Sans surprise, il a réagi de façon mitigée : dans un sens, il trouve ça intéréssant, et par ailleurs il me ressert les questions suivantes :
- qu'est-ce qui m'a donné la foi ? (difficile de répondre c'est tellement un ensemble de choses)
- qu'est-ce qui pourrait me la faire perdre ? Qu'est-ce que je pense des gens qui se massacrent au nom de la religion ?
- est-ce que j'ai pas l'impression de renoncer à plein de choses ?
Et j'en oublie. Globalement je ne suis pas sûr qu'il prenne ça très bien. Mais je suis content de lui en avoir parlé : c'est mon meilleur ami, et je crois que s'il juge la religion il ne me juge pas trop.

Bon par ailleurs il a l'impression que tout ce chemin m'éloigne des réalités matérielles. Par exemple il a l'impression que je ne m'intéresse que peu au travail (ça c'est vrai qu'il faut que je me réveille) et que je me moque de l'argent. Je crois que pour l'argent ce n'est pas si simple. C'est agréable d'en avoir, mais je crois que mon rapport à l'argent est exactement le même qu'il y a un an ou cinq ans.

Je pense qu'il va falloir un peu de temps pour qu'il s'habitue. Je crois aussi que c'est en me voyant changer au jour le jour qu'il va se rendre compte. Bon depuis quelques temps il m'appelait souvent "Abdel Ramon" par dérision... je suppose qu'il va devoir m'appeler autrement.

11.1.05

prénom

J'ai oublié quelque chose dans mon compte rendu de ma shahada : le frère qui me l'a donnée m'a aussi donné un prénom. Naturellement ça non plus je ne m'y attendais pas.

Il m'a regardé, a fermé les yeux puis m'a dit "Gibril". J'ai cru que j'allais tomber par terre. C'est un de mes prénoms musulmans préférés. Et préféré ou pas c'est celui que j'attendais je crois. En tout cas j'ai su en l'entendant que c'était ça. Il y a des choses qui paraissent évidentes comme ça.

Comme c'est un prénom lourd à porter (l'archange Gabriel est le messager, c'est lui qui a transmis le Message au prophète), il a complété en disant "Ahmed Gibril". Mais pour les intimes Gibril ira très bien. Ou mon prénom français, que je continue à porter fièrement.

Gibril ne se donne quasiment pas au Maghreb, mais se donne pas mal en Afrique noire. Allez y comprendre quelque chose : le frère qui me l'a donné est d'origine algérienne. Les voies du seigneur...

l'eau coule

Déjeuné avec le responsable du groupe de Paris. C'est toujours aussi agréable, rien que d'être avec lui. On a parlé de beaucoup de choses. Du fait que certaines fois on se complique inutilement la vie.

A ce sujet il m'a cité une phrase de Sidi Hamza qui m'a bien plu : "l'eau coule, c'est nous qui mettons les pierres". En d'autres termes, c'est nous qui mettons des obstacles, des barrières, alors que parfois la vie serait tellement plus simple si on la prenait comme elle vient.

C'est un peu comme l'adage soufi "ce que tu as, abandonne le ; ce que tu sais, oublie le ; ce qui t'advient, ne l'esquives pas".

On a parlé aussi de l'intention. Il m'a rappelé (et c'est pas inutile) que chaque acte qu'on accomplit ne vaut que par l'intention. C'est quelque chose qui m'aurait paru très creux il y a quelques mois, mais aujourd'hui ça me parle vraiment. Evidemment ça s'applique aux actes rituels, mais aussi à tout ce qu'on fait.

Je reviendrai sur ces histoires d'intention. C'est un peu compliqué quand on cherche à l'appliquer à certains domaines. Pour ce qui est de l'élue de mon coeur, je crois que mon intention est pure. J'ai enfin la certitude que je veux l'épouser. Et ça même si la situation n'est toujours pas simple c'est déjà quelque chose.

leçon

Bon j'ai naturellement plein de choses en tête en ce moment, je suis très troublé. Mais j'ai aussi des moments de paix. Hier matin j'ai parlé à un monsieur que je vois depuis longtemps il est très souvent assis dans la station de métro où j'arrive le matin. C'est un africain, assez âgé. Je le voyais depuis longtemps annoter un livre écrit en arabe...

Pas besoin de beaucoup réfléchir pour comprendre que le livre c'est une partie du Coran. Ce monsieur a un look assez "musulman". Mais je n'avais jamais osé lui demander ce qu'il faisait. Je lui ai donc parlé hier matin. Il m'a expliqué qu'il apprend tout simplement l'arabe, comme il peut, en lisant et en annotant.

Quand je pense à ce monsieur qui a certainement 70 ans et qui passe du temps tous les matins à apprendre, ça me fait tout drôle. Il y a sans doute une leçon à en tirer, même si c'est pas trop mon genre de prendre des leçons.

10.1.05

crash test

Je crois que ma conversion "précipitée" aura le mérite de me mettre au pied du mur. J'en ai parlé ainsi que du soufisme à l'élue de mon coeur. Sans surprise, elle réagit mal (elle pense que je vais vers la religion pour elle et que du coup mon intention n'est pas pure).

Du coup je vais assez vite savoir si j'en suis arrivé là pour de bonnes ou de mauvaises raisons. Peut-être que ce n'est pas la bonne façon de poser le problème ; on verra bien. Cette jeune femme pense aussi que c'est le malheur qui nous fait nous tourner vers Dieu, et que dès que Dieu nous soulage, on l'oublie (y a un verset qui parle de ça)... tout un programme.

Ce serait sans doute trop simple si je pouvais juste lui dire "on s'aime, on cherche tous les deux à aller vers Dieu, marions nous". Quoi qu'il en soit, je me sens seul... ce qui est sans doute mieux. Seul face à Dieu je vais sans doute me rendre compte assez vite de si oui ou non une forme de foi, de certitude m'habite.

Hum tout ça n'est pas très clair. Pourquoi faut-il que je me tourmente à ce point ? Je voudrais juste un peu de paix. Et y voir plus clair. Dieu fasse que j'y arrive. Ce week end j'ai vécu la prière avec intensité. Mais comme me l'a dit quelqu'un un jour, l'islam c'est une course de fond, pas un sprint. C'est peut-être cet aspect qui est le plus contraire à mon caractère impatient.

PS 5 minutes après avoir fini cette note je reçois un mail d'elle où elle me félicite pour ma conversion... elle a l'air bouleversée. Elle me demande si je crois toujours au hasard. Inutile de préciser ce que j'ai répondu. Elle est à la fois heureuse pour moi et profondément triste... pas très étonnant : elle a passé tellement de temps dans le chagrin à tout faire pour renoncer à l'amour qu'elle me porte. Et voilà que tout ce chagrin lui retombe dessus. Dieu puisse la soulager.

mon frère

Dîné avec mon frère ce week end. Il doit de plus en plus me prendre pour un fou : je lui ai parlé de René Guénon. Je lui ai parlé de foi, de spiritualité (en restant un peu vague), le lui ai même dit que je connaissais des soufis.

Peut-être est-ce précipité. Je devrais attendre un peu. Mais en même temps je crois qu'il se doute de quelque chose. Et vu nos liens j'ai besoin sinon de son approbation du moins d'essayer de lui faire comprendre ce qui m'arrive.

Il est profondément rationnel, il est (comme moi avant) assez effrayé je suppose par la religion. Je crois que je vais devoir me réfréner, ne pas lui parler de tout aussi vite que je le voudrais. Il faut dire que quand je l'ai vu j'étais encore sur la lancée de la shahada... j'ai passé au moins 24 heures à planer.

randonnée en montagne

Quand j'étais petit, j'ai fait un peu de randonnée en montagne. Il y a quelque chose que connaissent tous ceux qui on fait ça : on voit de très loin le sommet qu'on cherche à atteindre. Puis il est caché, on monte, on atteint un sommet intermédiaire, et là on voit à nouveau le sommet lointain. Il semble toujours aussi loin.

Alors naturellement l'analogie s'arrête là : dans le cadre du chemin vers Dieu on n'atteint jamais le sommet, ou peut-être quand on meurt. Mais ce que j'essaie d'expliquer c'est que comme en montagne l'important c'est autant le chemin que le but final.

Ainsi de la conversion : c'est un sommet intermédiaire. Je ne suis plus le même. Mais en même temps tout ce que je découvre c'est que le sommet est toujours là, toujours aussi loin. Et qu'il ne me reste qu'une chose à faire : cheminer.

Hum on va encore me prendre pour un illuminé.

7.1.05

shahada

Ce matin je suis allé à la librairie. Je pensais acheter un livre, en fait on s'est mis à discuter assez longuement avec le patron. Naturellement on a parlé soufisme, spiritualité. A un moment il a été étonné quand je lui ai dit que je n'étais pas musulman.

Qu'à cela ne tienne : à la fin il m'a tout simplement proposé de prendre la shahada (c'est à dire de prononcer la profession de foi). J'ai accepté quasiment sans réfléchir. J'ai suivi mon coeur. Et voilà : je suis musulman. A un moment je me suis dit "mais qu'est-ce que tu viens de faire" mais en fait je crois que j'ai tout bêtement été heureux.

J'ai du mal à réaliser. J'ai l'impression de planer gentiment depuis. Je crois qu'il va falloir du temps pour que je mesure tout ce que ça implique. Mais en même temps c'est dans la droite ligne de ce que je vis depuis des mois.

Je suppose que ça devait venir un jour, et le fait que ça m'ait été proposé si simplement et si naturellement je le prends comme une chance. D'un côté ça n'a pas eu le "poids" d'une décision longtemps attendue et planifiée, mais c'est peut être mieux ainsi.

Drôle de journée du coup. J'ai besoin d'en parler. Je suis détendu. Je me suis regardé dans un miroir : j'ai eu l'impression d'avoir rajeuni (hum on va vraiment me prendre pour un dingue ou un illuminé !!). En même temps ça n'a qu'une importance relative : ce n'est pas un but en soi, l'important c'est le chemin je crois.

Au passage j'ai acheté un livre qu'on m'avait maintes fois conseillé : La crise du monde moderne de René Guénon. Encore de la lecture...

dîner

Dîné hier soir avec un ami proche. C'est un des deux non musulmans au courant de ce que j'entreprends. Il est naturellement "spirituel" : il ne pense pas que l'on doive s'attacher aux formes extérieures d'une religion, mais il a ce que je dois bien appeler une forme de foi.

Il m'a raconté à nouveau hier un rêve qu'il avait fait il y a longtemps : Dieu lui était apparu ! Il en parle comme d'une sorte de révélation. C'est marrant mais quand je lui parle de certains sujets j'ai l'impression qu'il comprend. On parle de signes par exemples (il m'a dit hier "il y a des signes partout il suffit de les voir"). Je lui ai dit en plaisantant à moitié qu'il était soufi sans le savoir.

En même temps je suis de plus en plus effrayé ou repoussé par les gens qui pratiquent ou professent un islam "dur". Quand je pense que l'élue de mon coeur m'a dit que les salafistes "ils sont pas méchants au fond ils font de mal à personne" je sais pas trop quoi en conclure. Qu'il y a plus radical encore ? Je ne sais pas. Je ne sais plus trop.

Pour revenir à ce dîner ça m'a fait du bien. C'est marrant qu'on puisse être autant en phase sur ces sujets. Attention, en même temps il pense et me l'a dit que je vais abandonner une partie de ma liberté et que c'est dommage. Pas qu'il désapprouve le chemin que je prends, mais il pense qu'il ne faut pas s'attacher à des textes, à des interdits, etc...

6.1.05

exemple des compagnons

Je n'ai encore rien lu sur la vie du prophète ni sur ses compagnons. Il y a des allusions par exemple dans le livre d'Ibn 'Ata Allah que je suis en train de lire. Cette anecdote par exemple : un des compagnons offre une tête de mouton à un autre, qui se dit qu'un autre en a plus besoin, et ainsi de suite si bien que la tête de mouton passe par 7 personnes avant de revenir au premier.

Il y a plein d'autres exemples, où à chaque fois les compagnons (mais c'est vrai aussi de saints etc...) font preuve d'une abnégation, d'une générosité quasiment surnaturelles. Je ne sais pas pourquoi mais ça me met mal à l'aise. Comme si j'avais du mal à y croire. C'est un peu "too much".

Peut-être est-ce parce que je m'en sens si loin, je ne sais pas trop. Mais j'avoue que dans tout ce que je lis c'est dans ce genre de cas que je me sens le plus déconnecté, que ça me parle le moins finalement. C'est difficile à expliquer.

Sur le repentir aussi j'ai un peu du mal. Encore un vaste sujet. Bon au moins tout ça ce sont des sujets qui sont un peu révolutionnaires pour moi. On verra bien.

Abd el Kader suite

Je me suis un peu emmêlé les pinceaux sur Abd el Kader. J'ai mélangé deux idées. Le fait qu'un verset dise que si Dieu l'avait voulu tous les hommes auraient la même religion c'est une chose.

Mais le verset dont il fait l'analyse c'est (17:23) un verset qui dit (je crois) "Dieu a décrété que vous n'adoreriez que lui". D'où cette idée à la fois audacieuse et très simple : quoi qu'on adore, et même si on se dit athée, ce ne sont que des façons d'adorer Dieu.

C'est une idée essentielle. Pas parce qu'elle justifie une sorte d'oecuménisme, mais parce qu'elle pose deux choses : que Dieu est tellement inconnaissable que l'on ne peut en adorer qu'une idée imparfaite, et que l'on ne doit pas juger quelqu'un sur sa croyance puisque c'est Dieu qui règle tout.

Hum tout ça n'est pas clair encore... je me sens de plus en plus incompréhensible pour un lecteur qui ne serait pas croyant. Pas grave.

5.1.05

soufisme dans le grand public

C'est un vrai sujet d'étonnement pour moi : le soufisme est très à la mode ; on trouve paraît-il des oeuvres de Rûmi dans les rayons "new age" des librairies, notamment aux Etats-Unis, je viens encore de lire une citation de Bernard Werber (un crétin fini selon moi) qui parle de la "philosophie soufi". On sait aussi que dans une interview, Villepin a parlé du soufisme.

Apparemment c'est présenté comme un viatique, un rempart contre l'islamisme, que sais-je encore. Ca me trouble un peu. D'une part parce que même si dans un sens c'est vrai (les voies soufi prônent la tolérance, notamment vis-à-vis des non-musulmans) il me semble que l'essentiel est ailleurs. D'autre part parce que j'ai l'impression que les gens se font des idées.

J'ai lu deux citations : une qui dit "lire 50 livres d'Ibn Arabi ne fera pas de toi Ibn Arabi" et une autre qui dit (je cite de mémoire) "cheminer sur la voie intérieure sans guide revient à avoir le Shaytan pour guide"... brrr. Je crois que je comprends ce que ça veut dire. Je reparlerai de l'importance d'être guidé. Mais le fait est que le soufisme c'est pas quelque chose qui s'apprend dans les livres.

Sidi Boumedienne (le prédécesseur de Sidi Abbas, le père de Sidi Hamza) interdisait je crois la lecture d'autres livres que le Coran et des recueils de hadiths, à l'exception des sapiences de Ibn 'Ata Allah.

C'est marrant la disproportion entre le nombre de gens qui en parlent et le peu de gens qui pratiquent dans une voie. Je ne sais pas comment l'expliquer. Je ne sais pas... je devrais me réjouir que les gens s'intéressent au sujet, aient une image positive du soufisme, mais mes sentiments sont assez mélangés sur tout ça.

Faudra que je mette tout ça au clair. Comme me l'a dit le frère barbu de la librairie, l'important c'est que j'écoute mon coeur.

rêves bizarres

En ce moment je fais des rêves dont je ne garde aucun souvenir, si ce n'est qu'il s'y passe des choses bizarres. Ca n'est pas super agréable j'ai l'impression. Du coup je suis à nouveau dans des turbulences.

Heureusement réunion ce soir ça va me faire du bien. Je ne sais pas expliquer pourquoi, mais les réunions me regonflent. Je suis un peu au jour le jour en ce moment ; j'ai l'impression que l'avenir est très incertain, j'ai besoin de confiance.

Ces rêves un peu bizarres m'alertent. Il se passe des choses dans ma tête. Peut-être que tout ça c'est mon ego qui se défend. Je n'en sais rien. Ce matin j'ai fait le dhikr pendant 1/2 heure, ça m'a paru passer en 5 minutes. Ca au moins c'est quelque chose sur quoi je pense pouvoir m'appuyer : le dhikr (même si je n'y suis que très rarement concentré) me fait toujours autant de bien.

Pour le reste on verra. Je m'accroche au célèbre "ce que tu as donne le, ce que tu sais oublie le, ce qui t'advient ne l'esquive pas". Pas facile. Et puis dans ma vie je dois avancer (trouver du travail en particulier). Chaque chose à son tour. L'année commence difficilement on dirait.

4.1.05

engagement

Je réfléchis de plus en plus à ce que ça signifie de s'engager. Je réalise que c'est quelque chose dont j'ai certainement besoin, mais en même temps ça fait peur.

Je crois bien qu'il en est ainsi du mariage aussi : je ne me suis jamais marié, j'ai passé longtemps à vivre avec une jeune femme mais sans qu'on parle jamais de construire quelque chose ensemble. Et je réalise que l'idée du mariage aussi m'a fait et me fait encore un peu peur. Alors bien sûr il y a des engagements qui se font naturellement, sans qu'on ait besoin d'y penser.

Je crois que pour la voie c'est ce qui m'arrive : pour le moment je n'ai pas eu l'impression de faire des efforts (ça risque de changer mais ce n'est pas le sujet). Tout se passe comme si j'étais conduit naturellement à m'engager. Pas que ça se fasse à mon insu (loin s'en faut). Mais tout simplement je suis mieux avec la voie que sans.

Je me suis demandé récemment (pour voir) ce que ça signifierait aujourd'hui de renoncer à la voie. Et je dois dire que ça n'a pas été une pensée agréable. Alors peut-être que je suis "dépendant"... je n'en sais rien. Le seul fait que ça me fasse du bien devrait me suffire.

Mais je suis ainsi fait que j'aime me faire des noeuds au cerveau. Quand je repense à ce discours si simple de ce frère (le barbu) à la librairie Al Ghazali, je me dis que je devrais prendre les choses beaucoup plus simplement.

Quoi qu'il en soit, je sens que m'engager va me faire grandir, que c'est quelque chose que je cherche confusément depuis longtemps. Il y a plein de façons de s'engager, et je suis loin d'être content de moi dans tous les domaines. Mais le fait d'avancer me donne l'impression d'avoir enfin un peu prise sur les choses.

Le paradoxe c'est que pour avoir prise sur les choses j'ai choisi un chemin où on me demande justement de lâcher prise. Décidément que de paradoxes.

prière régulière ?

Depuis samedi je fais précéder mon dhikr du soir par des ablutions puis une prière (version courte). Bon ce qui m'embête c'est de lire des trucs en arabe "phonétique" sans comprendre ce que ça veut dire. Au moins la fatiha ça y est je la sais par coeur et je sais plus ou moins le sens par coeur aussi. Mais bon assez vite je vais savoir ce que je dis.

Pour le moment le fait d'avoir fait les ablutions ne change rien pour moi. Encore une fois je suppose que tout vient de l'intention qu'on y met. Et pour la prière j'ai carrément l'air de rien à lire dans mon petit livre... mais c'est avec l'habitude que je pourrai donner un contenu intérieur à la prière j'imagine.

Je ne sais pas du tout si je vais persévérer dans la prière. Je me fais encore une montagne de l'idée de faire les 5 prières quotidiennes, aux heures prescrites. C'est clair que pour ça je ne suis pas prêt du tout. Et que je ne le serai peut être pas avant des années. Pas grave, je crois que le sens de la prière est plus important que la forme extérieure.

Et mon ego dans tout ça ? Je crois qu'il se défend... c'est un peu normal. Dans un sens je trouve un certain plaisir dans la vie "ascétique" que je mène depuis quelques temps, et en même temps je me dis que c'est une illusion : mes désirs n'ont pas disparu, et prendre plaisir dans la privation n'est pas forcément le bon chemin. Mais ça c'est un vaste sujet.

3.1.05

Adam et la chute

Encore un résultat de mes lectures... cette fois chez Ibn Ata' Allah. Un petit passage m'a beaucoup plu. Ca parle de la chute d'Adam.

Pour l'auteur, l'épisode de la pomme et le fait qu'Adam croque la pomme puis soit pour la peine envoyé sur terre est une preuve... de la miséricorde divine ! En effet, d'une part puisque Dieu sait tout, impossible d'imaginer qu'Adam ait fait cela sans que Dieu l'ait prévu. En quelque sorte, en chutant, Adam répond à ce que Dieu attendait de lui.

Par ailleurs, le fait d'être banni du paradis et envoyé sur terre est une occasion de s'élever pour Adam. Alors qu'il ne connaissait que la situation de confort du paradis, il a l'occasion de devenir meilleur, et de découvrir d'autres facettes de la grandeur divine.

Bon je résume à grands traits, et si un athée me lit il va me prendre pour un fou. Vu mon niveau de connaissances, si ça se trouve j'enfonce une porte ouverte avec ça : peut être que le catholicisme parle mieux de tout ça. Mais cette idée de chute qui permet en fait l'élévation m'a plu.

perplexité sur Abd el Kader

J'ai toujours pas fini le petit livre d'écrits spirituels de l'emir Abd el Kader. Un passage m'a laissé un peu perplexe ; j'ai pasé pas mal de temps à y réfléchir. Bon la perplexité n'est pas un problème, j'ai même l'impression que ça risque d'être mon lot assez régulièrement.

Les gens qui ne s'intéressent pas à tout ça me prendraient sans doute pour un fou, mais c'est pas grave. En l'occurence le point soulevé par l'emir est tout à fait concret. Je rappelle que pendant sa captivité en France il a beaucoup impressionné certains religieux catholiques en France, et qu'on lui prête une phrase qui disait à peu près "si je pouvais expliquer certaines choses aux croyants des diverses religions, beaucoup de guerres n'auraient pas lieu".

Il part d'un verset du Coran qui dit (je crois) Dieu n'a créé les hommes que pour qu'ils L'adorent. De là il déduit que si Dieu avait voulu que tous les hommes aient la même religion il en aurait fait ainsi. Par ailleurs l'interprétation qu'il fait de ce verset c'est en quelque sorte que quelle que soit la forme ou l'objet de l'adoration d'un homme, elle se ramène à adorer Dieu comme Il l'a voulu.

Je ne suis pas sûr d'être bien clair, mais ce que j'en comprends c'est un appel à respecter les croyances et la foi même chez les ... non croyants ! Alors naturellement je ne suis pas certain d'avoir tout compris. Et ce d'autant que sur la fin il conclut qu'il est tout de même préférable et supérieur de reconnaître le Coran et le message du prophète.

Ca m'a plongé dans des abîmes de réflexion. Pas sûr que j'en ressorte de sitôt !

prière, ablutions

Samedi pour la première fois j'ai essayé de faire une prière. Ablutions d'abord. Puis j'ai pris mon petit livre et j'ai essayé de suivre les étapes.

Pour l'instant je ne sais pas trop ce que ça va donner. C'est light disons (je fais la prière la plus courte, sans me fixer d'heure). Et il y a plein de trucs à apprendre par coeur il va falloir que je prenne le temps. Je ne peux pas dire que je m'y mette avec ardeur, mais en même temps je me dis qu'il vaut mieux que j'y aille doucement.

Du coup pour l'instant ça n'a pas vraiment de sens, contrairement au dhikr. En parlant du dhikr, ces derniers jours je me trouve assez peu concentré. Les hauts et les bas je suppose.

Je ne suis même pas sûr de continuer à faire ne serait-ce qu'une prière par jour. On verra bien. Quand je pense que l'élue de mon coeur m'a raconté que quand elle s'y est mise elle se sentait comme sur un tapis volant tellement elle sentait l'appel de Dieu.

Mais chacun sa route. Il n'y a sans doute pas deux parcours qui se ressemblent, et pas deux rapports à la foi qui sont identiques. Je constate que mes idées changent sur certains sujets. Mais c'est le coeur qui doit changer.

toujours le coeur

Je reviens à nouveau sur cet échange avec ce frère à la librairie. Il m'a parlé du coeur d'une façon très simple et très belle. En gros il m'a dit "quand on est un petit enfant on se tourne de façon confiante vers ce qui est bien, sans se poser de questions, eh bien c'est ce rapport avec le coeur qu'il vous faut écouter".

En somme il oppose le coeur à l'intellect, siège des passions et de la raison. Quand je dis passions c'est tout ce qui est de l'ordre du moi, de l'ego. C'est un thème "soufissime" (je suis trop ignorant pour l'affirmer mais ça ne m'étonnerait pas que ce frère soit soufi). En fait c'est un thème qui est sans doute tout simplement au coeur de l'islam.

L'idée, pour ce que j'en comprends, c'est qu'à la naissance on est naturellement en accord avec ce coeur, et que l'éducation, la formation de la personnalité pose des voiles sur le coeur. On acquiert l'habitude de vouloir tout comprendre, sans parler de tout ce qu'on construit comme désirs. C'est marrant ça me fait penser au fameux "quel est l'obet du désir" qui est au centre de la psychanalyse.

La voie consisterait à retirer ces voiles pour revenir à cet état de confiance originel. Hum tout ça est un peu abstrait j'imagine. Un truc étrange : certaines choses me parlent mais sans que je sois capable d'expliquer pourquoi.

nouvel an

Passé une bonne soirée à une fête de nouvel an. Pour moi c'était un test sur le sujet de l'alcool : aussi loin que remontent mes souvenirs ça ne m'est jamais arrivé d'être dans une fête sans boire. Je peux l'affirmer maintenant : on s'amuse autant sans alcool. Je n'avais pas vraiment de doutes à ce sujet mais c'est quand même pas mal.

En même temps, passer une soirée avec des gens qui ont fait les mêmes études que moi, qui sont comme moi à l'âge des premiers bilans, ça m'a fait un peu drôle. Je mesure la distance (qui n'a rien à voir avec mes découvertes spirituelles) qui me sépare de certains d'entre eux : ils ont une carrière, une famille, etc...

En revanche, je note que le côté spirituel déclenche des conversations intéressantes avec les gens. J'ai discuté avec un type que je connais depuis longtemps mais très mal. On a jamais échangé plus de 3 mots. Et là il s'est livré avec sincérité quasiment d'emblée (un effet de mon ébauche de changement intérieur ?).

Je lui ai dit que je me posais des grandes questions sur la vie, et il a aussitôt embrayé sur la religion, sur la foi. La conversation n'a pas duré longtemps mais j'ai eu l'impression d'un échange vrai et sincère.

Ca ne veut pas dire que je suis incapable d'avoir ce genre d'échange si ce n'est pas au sujet du spirituel, au contraire. Simplement que ce versant des choses que j'ignorais totalement ouvre des mondes dans les échanges avec les gens.

Je ne sais pas encore bien comment dire ça de façon plus précise. On y reviendra (air connu).

This page is powered by Blogger. Isn't yours?